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Wilfrid Lupano a encore frappé ! Avec Paul Cauuet au dessin, il entame une nouvelle série des plus alléchantes si l'on en juge par ce premier tome des "vieux fourneaux" sous-titré " Ceux qui restent".
Ceux qui restent, ce sont trois septuagénaires que l'on découvrira vite indignes. Amis depuis l'enfance, ils se retrouvent aux obsèques de Lucette, l'épouse d'Antoine, un ancien employé des laboratoires pharmaceutiques GARAN-SERVIER (ça rappelle quelque chose....).Emile et Pierrot, tout aussi délabrés par l'âge et pas la vie, gardent tout de même une certaine verdeur d'esprit. Ronchons,
pratiquant un humour vachard, ils continuent de profiter de la vie avec leurs pauvres moyens. Nostalgiques de leur jeunes années, militants jusqu'au bout des ongles en souvenirs de leur passé très soixante-huitard, ils ont traversé les années d'après-guerre avec appétit et détermination.
Après la lecture d'une lettre de la défunte, Antoine va connaître une montée d'adrénaline. Au volant de sa vieille bagnole, il va foncer vers la Toscane, cherchant à venger un honneur d'un autre âge. Poursuivi par ses deux amis, eux mêmes accompagnés de Sophie, petite fille du veuf, enceinte de sept mois, le périple ne sera pas de tout repos...
Le récit des aventures de ces papys presque flingueurs est un régal ! Emaillée de dialogues dignes d'Audiard, l'histoire avance à grands pas, tout en n'oubliant pas de donner de la profondeur aux personnages. Totalement ancrée dans le présent, le récit mêle habilement les parcours individuels de chacun ainsi que le choc des générations ou comment l'esprit de 68 peut encore donner un sens à des vies que la société de consommation a essayé de rendre d'une individualité affligeante. Et dans les paysages toscans, l'aventure prend une drôle de tournure, laissant augurer une suite que l'on espère découvrir très vite.
Bourré de gags (Ah le running gag avec le fifre !), irrévérencieux, avec un dessin qui fait songer parfois à Wolinski (et pas seulement parce qu'Olympia est nue de la première à la dernière page), "Moderne Olympia" est un album à la folie enthousiasmante, une oeuvre qui démontre que l'on peut apprendre des foules de choses en se gondolant de rire de page en page. Il m'a fait parfois penser à l'univers déjanté des meilleurs films de Bertrand Blier, celui qui s'amusait à démonter avec bonheur les codes des scénarios et de la narration. Sa lecture fut pour moi un bonheur total et devient mon premier coup de coeur BD de 2014 !
La plume plus qu'alerte, l'humour en bandoulière, la remarque qui fait mouche dix fois par page, on ne peut pas dire que Titiou Lecoq ait lésiné sur la drôlerie. Ce qui fait la différence, c'est qu'elle a un vrai regard sur le monde qui l'entoure et des avis bien tranchés sur tout. Elle fonce dans le tas, gratte où ça fait mal, se moque de la bienséance et au final décrit le monde de ce siècle débutant aussi bien qu'un sociologue, l'humour en plus. Dans trente ans, on pourra se pencher sur "Sans télé on ressent davantage le froid" pour étudier ce qu'était une parisienne (un peu
branchée je vous l'accorde) aux alentours des années 2010. On s'apercevra alors qu'elle est relativement libre malgré son manque d'argent dû à une conjoncture difficile, qu'elle baise d'abord et qu'elle drague ensuite quand le coït est à la hauteur de ses envies. Qu'elle aime autant les chats que les têtards.... ah oui, le têtard, c'est un bébé, mais n'est ce pas un peu pareil, ils arrivent tous les deux un peu par hasard. Que la maternité ne ressemble nullement à un livre de Mme Pernoud ( on le savait déjà sauf qu'ici le dézingage du soit disant plus beau moment de la vie est une totale réussite ).
C'est drôle de bout en bout, c'est tout ce que je demandais à ce livre qui n'avait pour but que de me faire passer un bon moment. Il y a réussi pleinement. Alors, que Madame Lecoq en soit ici grandement remerciée !
Dans le créneau qui plaît bien aux enfants : on a toujours besoin d'un plus petit que soi, "Rikiki" devrait enchanter toutes les filles et les garçons qui aiment les aventures. L'imagerie de la piraterie y est entièrement réunie dans de superbes et hilarantes illustrations genre "parchemin pour carte au trésor". Rikiki est craquant et juste méchant comme il faut. Il est entouré de parents vraisemblablement issus du haut du panier des pirates, ce qui n'est pas le cas de l'équipage embarqué qui a la trogne patibulaire. C'est beau et drôle à la fois. En tant qu'adulte, l'histoire est
un peu tirée par les cheveux mais je n'ai pas l'âge de la cible visée qui est atteinte en plein dans le mille.
Très bel album sur le thème de la piraterie et accessoirement des bienfaits d'un bébé hurleur. A offrir donc aux enfants épris d'aventures de flibustiers mais aussi aux parents dont les nuits sont anéanties par les pleurs d'un bébé aux cris stridents.
Après avoir été emballé par les premières pages, le procédé de cette enfilade de petites nouvelles a fini par perdre de la saveur au fil de la lecture. C'est écrit avec précision comme toujours, mais l'intérêt faiblit par cette volonté manifeste de ne pas vouloir terminer de façon virtuose chaque portrait. "La petite foule" ne forme qu'un tableau bien esquissé mais manquant sérieusement de panache pour arriver à enthousiasmer le lecteur.
Avec un écriture simple, mais où chaque mot fait mouche, Annie Ernaux exprime librement et magnifiquement toute une myriade de sensations que tout un chacun a éprouvé lorsqu'il s'est trouvé à pousser un caddie parmi ces rayons regorgeant de produits ( " 50 000 références alors que je dois en utiliser 100" dit-elle). Lieu de rencontre, de distraction de populations très diverses, véritable reflet de la réalité sociale française, l'hypermarché est également un lieu où notre intimité est dévoilée, le contenu de nos chariots déposé sur les tapis de caisse devant le regard des autres, est un révélateur de nos goûts et de notre position sociale. C'est en pointant scrupuleusement tous ces petits détails de notre quotidien, sans en oublier les replacer dans une sphère économique globale, qu'Annie Ernaux fait encore mouche, en touchant une nouvelle fois le lecteur en plein coeur, mettant des mots forts et simples sur ce quotidien qu'on occulte le plus souvent. Du grand art et un livre à lire toute affaire cessante !
Ce voyage dans un temps pas si lointain m'a fait replongé agréablement dans cette époque enchantée où tout était possible mais où, la science et les hommes n'ont hélas pas su attraper la perche tendue. Le monde est ainsi fait. Il est possible de rêver un peu mais la réalité se charge de nous remettre sur les rails bien huilés d'un chemin que l'on ne choisit pas complètement. "Expo 58" est le reflet de cette réalité là. Dommage peut être que l'auteur ait eu du mal à choisir entre comédie d'espionnage et récit profondément mélancolique.
Si vous avez des enfants, filles ou garçons, "Le rayon fille" ne cherchera qu'à les distraire de la plus belle des façons : en s'adressant à leur cerveau ! Avec humour, un zeste de sérieux, et beaucoup de tendresse, Denis Lachaud enfonce le clou en envoyant voler les stéréotypes et en nous offrant un personnage féminin en tout point exemplaire, avec ses doutes, ses faiblesses, ses forces. Ce n'est pas une sorcière, ce n'est pas une fana de cheval ni une apprentie chanteuse, juste une petite fille d'aujourd'hui, une vraie !
Trop obsessionnel
La maison Grasset au dos du livre ne cache pas que "Printemps" est un cri d'alarme et de révolte. Oui l'homme, l'écrivain, est révolté, cela se sent. Cependant, malgré le bien-fondé de cette colère, la façon dont elle nous est assénée se révèle à la longue un peu pénible. Revenant sans cesse sur les mêmes faits jusqu'à plus soif, le lecteur que je suis a, au bout d'un moment, décroché et terminé péniblement sa lecture. Obsessionnel sur certains événements qui nous sont psalmodiés comme une prière, prière pour ne pas oublier qui nous sommes, d'où l'on vient et combien le monde est cruel, le romancier a fini par me lasser à force de redites. Heureusement, çà et là, restent des passages d'une force inouïe mais noyés dans cette hargne répétitive. Ils ne sont que quelques rares perles au milieu d'un discours qui finit par être dérangeant, non pas par le propos évidemment sincère, mais par cette obsession du complot qui se faufile au milieu de tous les événements décrits.
Sentiment mitigé pour ce "Printemps" à la parole évidemment rendue furieuse par un monde fanatique, analphabète, pétri de libéralisme, à la violence sourde et inquiétante, mais dont l'écriture obsessionnelle bien que légitime, pour les mêmes drames, finit par plonger le lecteur dans un certain ennui.