En cours de chargement...
Publié dans le cadre du challenge Écris-moi une critique odieuse : [...]
Il faut le dire, la recette de Sept jours pour une éternité est efficace : de l’action rapide comme dans les meilleurs mauvais films, de l’amour sans nuance, de l’humour convenu même pas drôle, une symétrie facile à assimiler, des supra gentils, des méchants en fait gentils et des méchants vraiment méchants. C’est une machine à lire où tout est calculé pour fabriquer une lecture facile, pour divertir sans prendre la tête. Même la typo est énorme dans l’édition grand format et dans le poche.
Est-ce
là ce qu’on attend de la littérature ? On a l’impression de lire sans être impliqué dans l’histoire : c’est trop facile et rapide pour apprécier l’histoire d’amour, c’est trop creux et trop caricatural pour être pris au sérieux, c’est trop débile pour éprouver un quelconque attachement pour les personnages.
Lisez le début de la critique sur mon blog :
http://www.bibliolingus.fr/sept-jours-pour-une-eternite-marc-levy-a106269558
[...]
Il faut croire en ses chances n’est pas seulement un roman sur l’écriture et sur ce que l’écrivain est prêt à faire ou non pour passer à la postérité. C’est avant tout un roman sur l’égarement, sur les doutes qui nous assaillent lorsque le moment est venu de prendre des décisions qui vont changer notre manière d’être, notre environnement, notre identité.
C’est aussi un roman comique (mais méchant aussi quand on y pense) où le décalage incessant entre Martinez et son entourage est décuplé par les longs titres des chapitres (une spécialité de François
Szabowski) qui composent une sorte de manuel d’urgence en cas de danger de mort - d’autant plus décalé que les péripéties de Martinez auraient besoin d’un autre type de protocole de secours ! Si les personnages sont farfelus, les dialogues et les descriptions piquantes, le rythme des phrases maîtrisé et la narration bien séquencée, on peut toutefois reprocher que les personnages de l’éditeur et de la tante sont cliché.
Aux forges de vulcain, une jeune maison d’édition indépendante, cache derrière des couvertures pas très jolies une mise en page intérieure esthétique, originale (les numéros de page sur les côtés, vous aimez ?) et confortable. Une maison et un auteur à suivre !
Le début de l'article sur mon blog :
http://www.bibliolingus.fr/il-faut-croire-en-ses-chances-francois-szabowski-a106172152
« Vous voulez revenir à la bougie ? - Non, mais… - Alors il faut poursuivre le nucléaire. »
Face à des arguments aussi simplistes, le petit ouvrage des éditions du Muscadier est le bienvenu. Surtout que, étonnamment, deux ans après Fukushima la course au nucléaire n’a pas été ralentie dans le monde, bien au contraire. Hormis l’Allemagne qui réinvestit dans le charbon, les pays en fort développement comme la Chine et l’Inde achètent de nouvelles centrales nucléaires. À l’heure actuelle, 31 pays dans le monde possèdent des réacteurs nucléaires, et la France est le
pays le plus nucléarisé au monde puisqu’elle produit 75 % de son énergie grâce au nucléaire. Mais François Hollande s’est engagé à réduire la part du nucléaire dans la production d’électricité de 75 % à 50 % à l’horizon 2025.
Le nucléaire est pourtant une énergie récente, âgée d’à peine 75 ans, et dont il ressort, à la lecture de ce livre, que beaucoup d’inconnues tendent à considérer le nucléaire comme une énergie dangereuse et non rentable sur le long terme. En fait, le nucléaire n’est pas une énergie parvenue à maturité ; beaucoup d’incertitudes demeurent sur le court et le long terme. Voilà quarante ans que les hommes jouent aux apprentis sorciers avec une énergie qui, si elle est issue d’un processus naturel, est si puissante et si dangereuse qu’on est loin d’en maîtriser le fonctionnement. Ce constat est juste hallucinant.
[...] Le nucléaire, si c’est une affaire économique et politique, est d’abord et surtout une question citoyenne. La décision de construire des centrales nucléaires a été prise avec l’acception d’une probabilité d’accident par les dirigeants et en toute opacité. Or, le nucléaire relève, à cause de sa puissance, du débat citoyen qui nous est refusé. Le gouvernement a décidé pour nous l’énergie qui allait faire avancer le pays. Et vous, que voudriez-vous comme énergie si vous étiez informés en toute transparence ?
Déciderons-nous franchement la sortie du nucléaire lorsqu’il y aura une mobilisation citoyenne de grande envergure, ou lorsqu’il y aura un accident majeur en Europe ?
S’il y avait des collections d’utilité publique, la collection Le choc des idées des éditions du Muscadier serait de celles-là. En 100 pages et avec 10 euros, cette collection aide à comprendre les enjeux économiques, politiques et sociaux qui sous-tendent les débats et occultés par les médias traditionnels. La construction des ouvrages est didactique et efficace : les deux contradicteurs exposent chacun leur point de vue et ont un droit de réponse. À la différence du débat télévisuel, vous avez tout le temps de cerner les arguments de l’un et de l’autre, sans temps imparti, ni coupage de parole, ni publicité.
Faut-il renoncer au nucléaire ? se destine tant aux indécis qu’à ceux qui sont intuitivement pro- ou anti-nucléaire mais qui n’ont pas toutes les clés en main pour aborder la question du nucléaire. Surtout, il est accessible à vous et moi, en des termes simples et de courts chapitres.
L'article entier sur mon blog :
http://www.bibliolingus.fr/faut-il-renoncer-au-nucleaire-collectif-a106014100
[...] Karoo est un riche salopard, cynique, superficiel, bedonnant et consumériste, à l’image des États-Unis à la fin du XXe siècle. Le regard qu’il porte sur lui-même et sur son entourage est à la fois pathétique, désabusé et comique. L’homme populaire du cinéma, à l’apogée de sa carrière, voit s’infiltrer en lui des failles, des questions, des doutes. Il n’est plus le même, mais à force d’avoir usé toute sa vie du mensonge (nous ment-il aussi ?) et du spectacle, personne ne peut croire au changement. L’homme, dépossédé de sa propre identité à force de se
mettre en scène, ne s’assume pas. Sa chute ne sera que plus grande pour lui, et plus jouissive pour nous.
Dans ce roman de plus de 600 pages, Steve Tesich donne à son personnage le temps et le plaisir de raconter les événements, sans concision, de décrire les personnages qui entourent Karoo (lesquels sont, comme son ex-femme et Cromwell, d’excellents personnages secondaires). Il a aussi ce je ne sais quoi qui tient en haleine, en partie dû au travail de l’éditeur : Monsieur Toussaint Louverture, éditeur indépendant et original, a choisi un beau papier de couverture. À l’intérieur, le papier est épais et a une belle couleur, et la mise en page est à la fois hyper confortable, avec de larges interlignes, et hyper esthétique avec de petits détails sympathiques à découvrir.
L'article entier sur mon blog :
http://www.bibliolingus.fr/karoo-steve-tesich-a105883474
Connaissez-vous vos voisins ? Ont-ils déjà frappé à votre porte ou au plafond parce que vous faisiez trop de bruit ? Trelkovsky, qui vient d’emménager dans un petit appartement payé au prix fort, sans cuisine ni salle de bains, vient d’être prévenu par le proprio : pas de bruit, pas de fête, pas d’enfant, pas d’animal. Trelkovsky n’a pas eu le choix, il vient d’être mis à la rue et ne peut qu’accepter toutes les conditions.
Il a quand même fêté sa crémaillère, pas plus de cinq ou six personnes, mais grand mal lui a pris ! Le voilà pris de toutes parts par les
coups de balais, les cris à la porte et les regards de travers. Sa nouvelle vie va devenir un enfer. Les premiers jours, il fait état de quelques bizarreries, mais au fur et à mesure que le temps passe, il observe carrément des phénomènes étranges dans son immeuble. Les premiers avertissements se sont transformés en menaces, puis en tyrannie du silence. Trelkovsky rase les murs et n’écoute plus la radio ; il se contente de lire, éteint la lumière à 10 heures du soir et glisse ses pieds dans des pantoufles silencieuses. Peu à peu, il s’efface, s’efface, jusqu’à devenir invisible.
[...]
Délirant, grotesque, violent, cauchemardesque, jubilatoire ! Le Locataire chimérique frappe par son réalisme, en apparence un locataire discret dans un immeuble banal, sous lequel se cache l’absurdité et l’horreur. Très vite, on devient Trelkovsky, on devient le martyr de ses infâmes voisins. Si le roman paraît loufoque, il est terrifiant parce qu’il dit quelque chose en dessous : il parle de nos pulsions, meurtrières et scatologiques, il parle de l’indifférence, de la mort invisible.
Le Locataire chimérique est à l’image de l’œuvre de son auteur, fascinante et dérangeante à la fois. D’abord fascinante parce qu’elle est esthétique, et dérangeante parce qu’elle est terriblement transparente : elle est humaine, dans ses contradictions et ses horreurs. Roland Topor fait partie de ces artistes qui savent s’exprimer à travers un art limpide et accessible à tous ; nul besoin de médiateur pour comprendre et ressentir son œuvre. Roland Topor, volontiers provocateur, a peut-être été là où il ne fallait pas, en tout cas, son œuvre est passée à la trappe. Il est toujours temps, notamment grâce au travail de Buchet-Chastel et de Phébus, de découvrir au moins ses textes.
Lisez l'article entier sur mon blog :
http://www.bibliolingus.fr/le-locataire-chimerique-roland-topor-a105679232
[...]
Quand les enfants de l’assistance publique disparaissent, il n’y a personne pour les rechercher. Quand ils meurent, il n’y a personne pour les enterrer. La Sauvage fait vivre un personnage attachant qu’on aime suivre dans les sommets comme dans les vides. Anais est magnifique, mais elle n’est pas la seule ; tous les personnages ont quelque chose à faire sentir, quelque chose à raconter de ces endroits dont on ne parle pas. L’écriture à la première personne et au présent reprend les états d’esprit d’Anais : lors de ses épisodes psychotique, de ses trips, ou quand
elle découvre qu’elle mérite mieux que cette vie là. L’ambiance des foyers, les relations entre les éducateurs souvent désemparés et maladroits face à tant de violences et d’errances et les autres enfants d’infortune sont décrites avec justesse. La traduction, en reprenant les subtilités du langage, semble très bonne.
Dans ce premier roman publié par les éditions Métailié, les thèmes de l’abandon, de l’identité, et surtout de l’amour des parents, si évident qu’on l’oublierait, sont abordés avec une grande sensibilité. Parce qu’il faut savoir d’où l’on vient pour apprendre à s’aimer et à se vouloir du bien. Ces enfants ne manquent pas d’amour à donner, c’est juste qu’on ne leur a pas montré comment et à qui le montrer.
La Sauvage est un roman sur l’adolescence très sombre, qui mêle avec autant d’intensité les souffrances indélébiles, les espoirs et les illusions d’une jeunesse perdue, mais les romans les plus intenses sont les plus sombres. Une belle lecture.
L'article entier sur mon blog :
http://www.bibliolingus.fr/la-sauvage-jenni-fagan-a105405780
[...]
Rêve général raconte cette journée extraordinaire où les personnages vont croiser des tartes à la crème, de somptueux cornichons, du PQ au thé vert, et même la déesse Occasion. Pourquoi cette journée est-elle si différente ? Parce que les personnages ne réfléchissent pas à leurs actes, ils agissent parce que c’est le moment ; parce qu’ils s’abandonnent à l’élan dans leur cœur qui leur dit : stop, c’est assez. Parce que les gens veulent juste avoir du temps pour eux, du temps qui n’est ni dicté ni compté, parce qu’on ne peut pas être heureux quand tout
va si vite. Parce qu’ils n’ont plus confiance en les hommes politiques qui réforment sans rien réformer, surtout pas. Mais avant tout, cette journée est différente parce que les gens vont à la rencontre de l’autre et s’écoutent. Ils se métamorphosent, sortent de l’enlisement. Ils parlent d’un bien-être commun.
Le texte, qui est composé de chapitres de trois ou quatre pages, met en scène les personnages à tour de rôle, mêle les pensées et les dialogues dans un style indirect libre approprié. L’ensemble est rythmé et bien agencé, mais ce qui compte, au fond, ce ne sont pas tant les personnages, c’est l’idée qu’ils portent ensemble. Le jour où les gens en auront vraiment marre, un mouvement d’ampleur naîtra, pas forcément dans la forme qu’on imagine, et probablement désordonné, mais il naîtra. Rêve général, publié par les éditions Phébus, évoque une idée forte et pas si fantaisiste que ça.
Lisez le début de mon article sur mon blog :
http://www.bibliolingus.fr/reve-general-nathalie-peyrebonne-a104217954
[...]
Au-revoir là-haut est une œuvre magistrale qui semble avoir été écrite dans la colère. Cette œuvre raconte l’écœurante cupidité sans fin des hommes de pouvoir, celle plus pitoyable des misérables qui tentent juste de survivre. Ici, on fustige sans cesse l’auto-satisfaction, les mesquineries, les petitesses, l’égoïsme le plus pur. Même Albert, si bon et si doux, y passe, car il est traité comme il accepte de l’être : comme de la merde.
Cette œuvre parle aussi des femmes de haut rang, calculatrices, qui veillent à préserver leur lignée, et de ceux qui salissent
l’honneur de la famille parce qu’ils sont nés différents. Dans Au-revoir là-haut, la ressemblance avec l’œuvre d’Irène Némirovsky est troublante : on y retrouve l’ambition et le cynisme des hommes, les bourgeois comme les pauvres.
Et pourtant, dans ce texte violent, où l’injustice, l’honneur, l’amour-propre sont les premiers mobiles, on voit aussi les faiblesses de ces hommes, même s’ils sont pratiquement tous détestables. Albert, lui, est un personnage inoubliable, hyper attachant, parce qu’il semble avoir été écrit avec tendresse. Les personnages de cette trempe sont rares ; malgré tous les livres qui passent, ceux-là sont beaux, humains, drôles, pathétiques. Ils resteront figés dans le temps, dans une époque que les hommes veulent oublier, que plus aucun Poilu ne peut raconter. Il y a des choses qu’on ne comprendra jamais parce qu’on n’a pas vécu à cette époque, mais avec Au-revoir là-haut, on peut prétendre s’approcher, un peu, de ce que c’était.
Mais ce n’est pas tout, car il y a le style. Le narrateur se débarrasse des descriptions et épouse à chaque instant l’esprit et le corps de celui dont il parle, quitte à nous apostropher de temps à autre et à nous jouer de petits tours. L’effet est d’autant plus réussi qu’il s’adresse au lecteur contemporain. Tout y est : la maîtrise des temps de narration et d’action, du discours indirect, du rythme, à la fois lent et rapide, du langage oral. L’intrigue est habilement construite, nourrissant une tension constante (les mains crispées sur le livre au plus bas de la tourmente jusqu’aux cris de surprise quand rien ne va plus), et la fin est superbe. Tout est parfait, et pendant plus de 500 pages.
Bref, on en sort secoué, reconnaissant envers Pierre Lemaitre de nous faire découvrir la vie après les tranchées. Difficile, après ça, de plonger dans un autre livre sans craindre d’en être indifférent.
L'article entier sur mon blog :
http://www.bibliolingus.fr/au-revoir-la-haut-pierre-lemaitre-a103701370
À quoi sert le mariage au fond ? C’est établir un contrat pour signifier à l’autre qu’il devient propriétaire de soi, c’est vouloir interdire l’autre d’aimer une autre personne que soi. Surtout, à quoi sert-il s’il est rompu si souvent et si facilement par le divorce ? Où sont les promesses d’éternité ? Et pourquoi avoir besoin de sacraliser l’amour ?
Combien de femmes se posent-elles vraiment cette question : est-ce que je veux être mère ? et pour quelles raisons ?
La contraception ne sert-elle qu’à choisir le moment d’enfanter ? N’est-ce qu’un simple
calendrier hormonal ? Ne peut-on pas aspirer à une autre vie que celle d’être mère ?
[...]
Pia Petersen est de celles qui posent les questions presque interdites, encore au xxie siècle. Elle n’exagère rien, n’invente rien. La narratrice, qu’on suppose être Pia Petersen (mais qu’importe ?) écrit une lettre à celui qu’elle a aimé. Elle livre une réflexion intime sur ses choix de vie, sur la souffrance d’être considérée comme différente. Ce petit texte qui ne paie pas de mine est une source de réflexion pour celles qui ne sont pas d’accord, et une source de réconfort pour celles qui adhèrent !
L'article entier sur mon blog :
http://www.bibliolingus.fr/instinct-primaire-pia-petersen-a103342077
Une comédie cynique et grinçante sur les travers égocentriques des trentenaires bobo
[...] Individualistes, pleins d’éthiques et de principes écologiques mais consuméristes et égocentriques, voilà le portrait que brosse Sam Byers des trentenaires d’aujourd’hui. Malades d’amour et de solitude, ils se voilent la face et se couvrent de non-dits. Idiopathie est une remarquable dissection des comportements et des mécanismes de défense que le lecteur n’aurait pas soupçonné en lui-même. Les Anglais en prennent aussi un coup, tout comme le voyeurisme à la télévision et le moutonisme des goûts. Mais la force de ce roman est son cynisme particulièrement drôle, exacerbé par de longues phrases denses et souvent disgressives et des dialogues qui claquent.
L’histoire, resserrée sur ses personnages particulièrement fouillés, manque pourtant d’élan pour parvenir jusqu’à son terme, même si ce resserrement illustre justement l’individualisme. Si le roman, construit comme une comédie sentimentale, commence en force, il souffre quand même d’un rythme inégal, car la dernière scène intervient trop tard dans la narration. Malgré un début en force avec le personnage de Katherine, l’histoire s’étire en longueur et la narration se dilate à l’excès. Toutefois le cynisme, le style et de nombreux passages savoureux rattrapent l’ensemble : Idiopathie est un premier roman amusant et grinçant.
Le début de l'article sur mon blog :
http://www.bibliolingus.fr/idiopathie-sam-byers-a106411928