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Avec l’avalanche de sondages d’opinion – de l’ordre d’un sondage publié par jour – il est utile de s’offrir une petite initiation à ce que sont les sondages, leurs enjeux, leurs contraintes et leur légitimité. Roland Cayrol propose un ouvrage didactique avec une première partie explicative sur cet instrument du xxe siècle : que sont les sondages ? quels sont les instituts ? qui les commande ? comment sont-ils faits ? quels sont les avantages et les inconvénients de chaque méthode ? Les sondeurs sont soumis à une déontologie stricte – la neutralité et la rigueur – mais
aussi à des contraintes fortes : outre l’exigence d’un travail rapide pour un faible budget, les sondeurs subissent une forte pression politique et économique de la part des commandeurs.
La seconde partie fait un retour historique des élections présidentielles (et des erreurs de sondage) de 1995 à 2007, et évoque notamment sur la présence de Le Pen que les instituts n’avaient pas mesuré dans leurs enquêtes. Roland Cayrol revient sur l’influence des sondages d’opinion lors des élections présidentielles, surtout lorsqu’ils sont omniprésents dans les propos des journalistes.
“Le phénomène a sans doute été renforcé par la relative “désidéologisation” des scrutins. N’ayant, sur le fond – les contenus, les programmes, les propositions des candidats –, rien de bien nouveau à commenter ou à discuter, les médias en sont venus à faire la “une” ou les titres du journal télévisé sur les derniers scores des sondages.”
Et cette influence, qui fait du sondage un outil d’aide à la décision pour l’électeur, explique le vote de la loi de 1977 interdisant la publication des sondages la semaine précédant les élections ; durée qui, d’ailleurs, a été ramenée à la veille des élections par la loi de 2002.
Qui est Roland Cayrol ? En tant qu’ancien directeur de l’institut de sondage CSA, jusqu’à ce que l’institut soit racheté en 2008 par... Bolloré, un groupe industriel et de communication, il n’est pas neutre sur la question des sondages, et a été directement impliqué par les critiques faites sur les techniques de son institut. En fait, il ne peut pas avoir une opinion objective sur les sondages – surtout qu’il y a consacré sa carrière – mais veut-on une approche impartiale ? Probablement pas. Et celle-ci n’est-elle pas d’ailleurs idéaliste ?
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La Tache, le vingt-quatrième roman de Philip Roth (sans compter ses autres travaux), ressemble à un agglomérat de thèmes et de personnages qui lui tenaient à cœur et qu’il n’était pas parvenu à caser dans un précédent roman.
Coleman Silk, le doyen de l’université d’Athena, en Nouvelle-Angleterre, est un professeur reconnu de littérature antique, qui, du jour au lendemain, est accusé de propos racistes. Sans le soutien de la part des professeurs de sa génération, rejeté par les plus jeunes, il se retrouve seul sur le banc des accusés, à une époque où le racisme est
fustigé. Vaincu, il prend sa retraite et vit isolé.
C’est en 1998 que l’écrivain Nathan Zuckermann, le héros de quelques uns des romans de Philip Roth, rencontre Coleman, son voisin à présent retraité, et s’intéresse de près à son histoire. La narration, qui fait de Nathan le témoin du naufrage personnel d’un autre personnage, est on ne peut plus classique : parfois, le « classique » a du bon ; parfois non. Les personnages « tiennent debout » davantage parce qu’ils sont brisés par un passé tragique que parce qu’ils sont décrits avec succès par Philip Roth (et la traductrice).
À travers Nathan qui raconte à la première personne, on découvre que Philip Roth ressort une énième fois la topique de l’identité : Coleman Silk n’est pas ce qu’il donne à voir. À l’âge adulte, il a enterré au fond de son être un secret, que ni sa femme ni ses enfants ne connaissent, au prix du sacrifice. Cet homme, en se réinventant, met en scène le rêve américain. Comment, lorsqu’on est défavorisé par une origine sociale ou ethnique, parvient-on à s’élever au-delà des « handicaps » et à réaliser son rêve ?
Par ailleurs, l’individu qui occupe de hautes fonctions sociales ou professionnelles se doit d’avoir une vie privée irréprochable (marié et bon père de famille) ; et lorsque la vie privée entache l’image de l’homme publique, les répercussions sociales, familiales et psychologiques peuvent être irréparables. Philip Roth a su capter l’air du temps et le puritanisme américain. Mais il a également ajouté à l’ensemble une petite touche faussement contestataire (« c’était mieux avant ») surtout à partir du dernier quart, longtemps après que l’intrigue soit tassée – quand le livre tarde vraiment à se refermer.
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À partir d’une enquête menée auprès d’écrivains de toutes les régions de France, quels que soient leur secteur éditorial et leur notoriété, Bernard Lahire a dressé la sociologie des conditions pratiques de l’écrivain en vue de le « matérialiser ». Dans une société utilitariste, l’écrivain exerce une activité non rémunératrice et pourtant très chronophage : en fait, il est le seul acteur du système à ne pas être considéré comme « professionnel du livre ».
Les écrivains, partagés entre un « second métier » pour subvenir aux besoins matériels et une forte
disposition à l’écriture, sont frustrés et mènent ce que Bernard Lahire nomme la « double vie ». Or, il apparaît dans les courtes notices biographiques des dictionnaires que l’existence des écrivains se réduit à leur appartenance à l’univers social spécifique de la littérature, sans que les conditions extérieures à l’écriture ne soient prises en compte. Pourtant celles-ci, qu’il s’agisse de répondre à une commande ou de préférer un genre plus rémunérateur qu’un autre, jouent un rôle essentiel dans le métier d’écrivain.
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La difficulté de « vivre de sa plume », topoï de la littérature, témoigne d’un grand paradoxe : les écrivains, qui sont pourtant au cœur de la création, sont considérés comme les moins « professionnels » parce qu’ils sont le maillon de la chaîne du livre qui vit le moins de la création. Pour preuve, la répartition du prix du livre illustre ce paradoxe : l’auteur ne perçoit son droit d’auteur que si le livre se vend, tandis que les autres « professionnels » se rémunèrent quel que soit le succès rencontré auprès du public.
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Gilles Maurice Dumoulin (sous les pseudonymes de G. Morris ou Vic Saint Val), définit explicitement son métier : « Prostitué(e)s, nous le sommes tous, auteurs de romans policiers, d’espionnage, d’action, d’anticipation, de suspense, puisque nous devons pour nous vendre, flatter les goûts de notre clientèle. »
Quel est ce second métier ? La plupart des écrivains exercent un métier dans le monde littéraire mais hors jeu littéraire, comme éditeur, directeur littéraire, correcteur, traducteur, responsable de revue ou attachés de presse, ou bien travaillent dans l’enseignement ou le journalisme.
Toutefois, la « double vie » s’accompagne souvent d’une certaine précarité. Si Henry Murger considérait la Bohème comme le stage de la vie artistique, ou de toute la vie comme le souligne justement Bernard Lahire, car la Bohème se transforme en précarité si l’écrivain souhaite vivre de sa plume. La situation instable et le manque de certitudes quant aux revenus posent problème en cas de maladie, de décès, de retraite, de chômage…
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Avec une superficie de 87 km², contre 321 km² pour Londres, 607 km² pour Madrid et 879 km² pour Moscou, Paris a l’une des plus grandes densités au monde : 24 900 habitants au km² sans les bois de Boulogne et de Vincennes.
Ville convoitée par les provinciaux et les étrangers venus de plus en plus loin, Paris est un échantillon représentatif de la population en France : l’immigration apporte le multiculturalisme, d’autant plus repérable que l’espace est restreint. Elle réunit pourtant les plus grandes richesses et les plus pauvres, entre l’Est et l’Ouest, entre la capitale
et la banlieue.
Les riches sont très riches, puisque la capitale rassemble 16,1 % des assujettis à l’ISF, lesquels privilégient de vivre entre soi à l’Ouest de Paris et de la banlieue. Les pauvres se regroupent de l’autre côté de l’axe, où les logements sociaux sont les plus importants dans le 20e arrondissement. S’il y a ségrégation, il y a aussi agrégation : les bourgeois, qui ne sont pas contraints par les prix de l’immobilier, choisissent de vivre avec leurs semblables.
Mais tout Paris « s’embourgeoise » : les prix de l’immobilier qui grimpent opèrent une exclusion par l’habitat. Si les ouvriers et les employés ont été les actifs majoritaires durant la première moitié du xxe siècle, aujourd’hui ce sont les professions intellectuelles qui investissent Paris avec la désindustrialisation nationale. Les « bobos », les « bourgeois-bohèmes », dont l’appellation est inexacte, réinvestissent les anciens logements et locaux ouvriers : c’est la gentrification. En repoussant les moins solvables hors de Paris, la mixité sociale est menacée : encore faut-il savoir ce qu’on entend par ce terme, et si la mixité sociale est bien le but recherché.
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Et si les bourgeois se rebellaient contre la société capitaliste de consommation ? Écrasés par les crédits, le poids de l’immobilier, les frais de scolarité des hautes écoles, les frais d’entretien de la maison et de la voiture, la classe moyenne de l’Ouest londonien fait la révolution. Kay Churchill, Richard Gould, Vera Blackburn et tous les habitants de la Marina de Chelsea s’organisent en manifestations pacifistes, affrontements et actions ponctuelles envers les « bastions de la servitude bourgeoise » pour faire entendre leur situation de « nouveaux prolétaires ». L’ennemi,
c’est l’« impitoyable capitalisme spéculatif qui perpétu[e] le système de classes pour diviser l’opposition et préserver ses propres privilèges ».
« Vacances à bon marché, logement exorbitant, études qui n’assurent plus la sécurité. Si vous gagnez moins de trois cent mille livres par an, vous comptez à peine. Vous n’êtes qu’un prolo en costume trois-pièces. »
En quête d’une signification à leur vie, la population bourgeoise, sans croyance religieuse, craint la mort, espère l’immortalité et se barde de conventions sociales et de tabous.
La société de consommation et du spectacle, tout comme les médias et le cinéma, régulent et assoupissent l’intelligence ; les grandes écoles transforment leurs enfants en une classe de professionnels qui embrassent à leur tour le système et participent à sa pérennité.
« Regardez le monde autour de vous, David. Que voyez-vous ? Un immense parc à thème, où tout est transformé en spectacle. La science, la politique, l’éducation autant d’attractions. Le plus triste, c’est que les gens sont ravis d’acheter leurs billets pour grimper à bord. – C’est confortable. »
C’est avec les yeux de David Markham, psychologue à l’Institut Adler et fiancé à Sally, que la rébellion prend forme. L’attentat à l’aéroport de Heathrow à Londres, lequel a tué son ex-femme, le détourne de sa vie posée et heureuse.
Qui a posé cette bombe, et pour quelle revendication ? Y a-t-il un lien entre Heathrow et la révolte de la Marina de Chelsea ? David délaisse sa fiancée, ses recherches à l’Institut Adler, et commence les investigations auprès des agitateurs bourgeois. Il ne tarde pas à troquer son avis de psychologue pour les banderoles des activistes : attiré par leurs motifs, David s’implique dans les affrontements mais il est très vite dépassé par les événements.
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Branko, Hongrois en fuite, s’intègre dans un camp de réfugiés en Italie. Les Roms, les Tsiganes, les Gitans, les gens du voyage ; qu’ils soient bulgares, roumains, polonais, tchèques, leurs ennemis sont les mêmes : la police, la mairie, les services sociaux, les habitants, et eux-mêmes qui se querellent dans leur quotidien de misère. Cette vie de « passage », qui dure plusieurs années, voire une vie, est l’objet de tous les racismes et incompréhensions. Mis au ban de la société, indésirables et laissés-pour-compte, ils ne doivent pas troubler ni être vus des autochtones.
C’est
dans cet environnement hostile que Branko est mort. Et pourtant c’est lui qui nous raconte, de manière désordonnée, entre le présent, le passé et l’avenir, ce qui lui est arrivé. Progressivement, une vie prend forme, à la fois triste et envoûtante.
Dès son arrivée au campement, Branko capte la curiosité des enfants. Sonija, Ibrahim, les frères Hajdini, Ilma, tous ces enfants, issus de cultures différentes et parfois lointaines, n’ont connu que le camp. L’ancien ouvrier a voyagé avec dix cartons qu’il garde secret. Il a chargé les enfants de les cacher dans l’usine désaffectée à côté du campement, mais en échange, il doit leur raconter son histoire.
Chaque soir, ils se réunissent autour du poêle, luttant contre le froid et l’agression d’un univers qui ne leur est pas destiné. Avec pudeur, Branko se dévoile ; les enfants écoutent, d’abord sceptiques puis intéressés.
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De montagnes et de glaciers, le Cachemire est une région en guerre depuis des temps immémoriaux. Entre l’Inde et le Pakistan, l’Angleterre et la Chine, les hindous et les musulmans, les Cachemiris s’affrontent.
Kirpal, le narrateur, après avoir quitté le Cachemire pendant quatorze ans, y retourne. Son long voyage en train de Delhi à Srinagar est dilaté par les souvenirs qui l’assaillent. Si la trame est conventionnelle, elle permet de cerner les traces du temps et du cancer qui ronge les pensées du sikh.
Alors jeune sikh étranger au pays, il suit le parcours de son père,
mort à l’armée sur le glacier de Siachen. Il intègre l’armée en devenant l’assistant du cuisinier du général Kumar, et s’imprègne d’une culture complexe, née des religions, des coutumes et des langues d’un pays déchiré. L’arme nucléaire en place depuis 1998, une sorte de guerre froide, avec exactions, attentats, tortures et propagande, paralyse la région.
Alors que la guerre déverse les corps des hommes des deux camps dans les fleuves glacés du Cachemire, Kirpal découvre l’art culinaire et cherche l’amour des femmes. Aveugle des crimes et des corruptions de ses supérieurs, il enfreint les lois du régiment pour aider Irem, une Pakistanaise en terrain ennemi.
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Premier livre de chevet de l’éditeur en herbe, L’Édition sans éditeurs amorce les questions d’indépendance dans des métiers de plus en plus pervertis par les phénomènes de concentration.
Dans ce petit ouvrage dont le titre est emprunté à Jérôme Lindon, André Schiffrin témoigne, grâce à son expérience, des conséquences néfastes de la concentration aux États-Unis pour les métiers à vocation artistique et intellectuelle.
Outre l’histoire particulière de son père, Jacques Schiffrin, fondateur de La Pléiade avant que la maison ne soit rachetée par Gallimard,
André Schiffrin a été éditeur chez Pantheon Books aux États-Unis, une maison au catalogue prestigieux et exigeant, puisque les écrivains et intellectuels reconnus en France – Michel Foucault, Jean-Paul Sartre, Marguerite Duras, Simone de Beauvoir – y étaient publiés outre-Atlantique.
Mais si André Schiffrin témoigne, c’est parce que Pantheon Books a été rachetée par Random House, laquelle a été phagocytée par RCA, un géant de l’électronique et de l’industrie du divertissement, lequel n’a pas tardé à revendre Random House à S. I. Newhouse…
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« Il y a des conversions mystiques, pourquoi n’y aurait-il pas des conversions amoureuses ? »
Gaspard Sauvage, dit le Zèbre, n’en fait qu’à sa tête. Notaire à Laval mais excentrique, courageux romantique mais plus pantouflard que voyageur, Gaspard a décidé de reconquérir l’amour de Camille, sa femme, usé par quinze ans de mariage et deux enfants.
Ébranlé par l’accident qui a failli coûter la vie de Camille, le Zèbre se rue sur chaque instant partagé avec elle comme si c’était le dernier. Il met en scène des stratagèmes pour enrayer la routine et rejoue son amour plus qu’il ne l’éprouve. À défaut d’être un grand écrivain, Gaspard veut faire de son amour une œuvre magistrale.
Mais Gaspard, si fougueux et malin soit-il, ne peut forcer l’éclosion de l’amour depuis longtemps devenus tendresse. Et d’autant plus que Camille reçoit les lettres de celui qu’elle appelle déjà l’Inconnu – l’Inconnu qui sait rappeler combien les détails du quotidien, sa tenue, ses cheveux, en apparence anodins, nourrissent l’amour malgré les années qui passent. Tandis que Gaspard cherche dans leur rencontre et l’extravagance les origines de leur relation, l’Inconnu parvient à l’émouvoir de sa plume observatrice et sensible chaque jour.
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