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Mon Avis: Un court roman est délicat et pur comme un ikebana. Une décence dans la façon de relater l'intime. Un livre très japonais, retenu et poétique écrit avec des phrases courtes, sans chercher d'effet, sans clichés et comparaison qui risqueraient d'annhiler l'imaginaire du lecteur.
Une histoire simple et une évidence : on ne connait pas celui ou celle avec qui on vit.
Loin des pavés érotico-médiatiques qui noient la littérature dans des nuances de grisaille. A lire pour ceux qui aiment la pudeur japonaise sans mièvrerie et la poésie des cerisiers en fleurs.
Biographie:
A. S. est née au Japon et elle vit à Montréal depuis '91. ce livre est la quatrième volet de son second cycle romanesque.
On commence et on ne lâche le livre qu’une fois tournée la dernière page. Ensuite on y repense longtemps. On recherche pour les noter, les graver dans sa mémoire, les phrases qui sonnent le glas de notre confort occidental, européen. Le personnage du narrateur nous devient vite familier, comme un cousin. On partage sa rage de vivre, ses efforts pour s’en sortir. On aime sa langue maternelle : le marocain. Et il nous fait aimer l’arabe classique, ces sourates en forme de contes philosophiques qui ne disent pas la haine mais l’amour. Il nous plonge dans ce maghreb du fameux « printemps
arabe ». Son détournement prévisible. Ah ! Démocratie que d’erreurs on commet en ton nom. Ce jeune homme de vingts ans est lucide comme un vieux Sage oriental. Le narrateur nous livre une version duale de l’Islam d’aujourd’hui et son point de vue sur l'engagement et les révoltes. C’est un beau livre grâce auquel on comprend mieux le monde qui nous entoure. Le livre est écrit dans un style économe, avec juste ce qu’il faut de mots pour narrer l’histoire, les sentiments, les réflexions. Ce n’est pas gai – parce que notre monde est comme ça - mais c’est plein d’humour de dérision de soi, pas de sentimentalisme pour faire pleurer Margot ! Les larmes, si elles viennent sont d’une autre nature. On est obligé de constater que notre monde est devenu fou et qu’on y participe, nous sommes les acteurs de notre servitude. L’auteur rejoint ici La Boétie. Le personnage conscient, imaginé par Mathias Enard nous dit que ce n’est pas en train de s’arranger. Il suffit de regarder autour de nous pour le voir. Et si l’acte final du narrateur est tragique, c’est qu’il a mal lutté pour le bien. Dans ce roman tout est vrai.
A lire absolument, pour l’histoire, l’Histoire, le style, l’absence de manichéisme de l’auteur. Je n’en dis pas plus. J’espère vous avoir donné envie de vous plonger dans la Rue des voleurs.
L'auteur a voulu faire écho au sermon de la chute de Rome, que prononça saint Augustin en 410 dans la cathédrale d'Hippone, pour dire "l'effrayante fugacité des mondes".
L'écriture en phrases longues à la Marcel Proust n'est pas dépourvue de fluidité. C'est une écriture, épique, lyrique qui ne ménage pas les sensibilités, c'est cru, charnel plus que sensuel. Il y a un nombre impressionnant de personnages bien campés, tous sont les acteurs et les témoins de la mort du monde qui les a vu naitre.
C'est un livre déroutant et fascinant tout à la fois, un peu pompeux à mon goût.