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Au coeur d'un maquis méditerranéen surgit un homme fourbu et sale. Soldat inconnu échappé d'une guerre indéterminée, il semble fuir sa propre violence dans le hors-champ des batailles. Une rencontre le force à recalculer sa trajectoire et sa notion du prix d'une vie. Aux alentours de Berlin, à bord d'un petit paquebot de croisière, le 11 septembre 2001, un colloque rend hommage à Paul Heudeber, génial mathématicien est-allemand, rescapé de Buchenwald, antifasciste resté loyal à son côté du Mur de Berlin, malgré l'effondrement de l'utopie communiste.
De la tension entre ces deux récits s'élève, comme par une sorte de magie - poétique, spatiale, mathématique -, tout ce qui se joue, en amour comme en politique, entre l'engagement et la trahison, entre la fidélité et la lucidité, entre l'espoir et la survie. Les phrases tirées de l'Evangile le sont dans la traduction de Frédéric Boyer (Gallimard, 2022), le quatrain d'Omar Khayyam est traduit par Gilbert Lazard (La Différence, 1995).
Déserter
Une langue somptueuse de poésie, minérale, qui s'écoule dans les plis de paysages arides et ceux d'un soldat, fuyant la violence d'un monde et d'un théâtre inconnu, vibrant de ses déflagrations, de ses lutes les plus intimes.
Une autre qui enlace les élans d'une vie d'engagement et la figure d'un grand mathématicien, résistant est-allemand, rescapé de Buchenwald.
Deux langues éclatés de reflets, de désirs et de brisures, pour deux récits qui s'entrelacent, deux histoires tendues par un fil infime, qui sondent notre part d'humanité, la guerre et sa violence, ce qu'il reste de nous, dépouillé de tout.
Un texte plein d'échos, de dialogues et de savoirs, qui traversent le siècle et les ombres de l'histoire, étincelant de vertiges et de profondeurs, de questionnements sur les horizons d'un monde qui reste à dessiner de nécessités, le notre.
Enard, c'est toujours un voyage, et celui-ci est assez fascinant.