En cours de chargement...
Salomon est un vieil homme meurtri par la mort récente de sa femme et qui réalise en ce matin de pâque juive qu’il se réveille dans le lit à la place que Sarah, son amour occupait jusque-là.
Et c’est depuis ce lit, partagé si longtemps avec sa femme, qu’il va se rappeler les nombreuses soirées de Pessah passées avec les siens. On ne peut qu’être bouleversé par l’histoire de ce survivant des camps à l’humour si particulier qui évoque avec drôlerie et tendresse les travers de ses proches. Ce livre sonne juste, jusque dans ses maladresses. L’amour que Salomon porte à
sa femme est d’autant plus déchirant, qu’il est sobre, c’est un amour du quotidien, celui d’une vie partagée.
"C'est vrai, tu ferais ça? Tu me paierais le voyage? Une partie? Ah bon, et pourquoi pas tout? Bon, bon, je vais y réfléchir... Tu ferais ça pour ta mère? Oh ma fille ! T'es une chieuse mais t'es comme moi dans le fond"
Les parents ce n'est pas toujours simple, être la fille de cette femme est sans doute très difficile.Seule, malade et bipolaire, elle ne cesse de changer d'avis de souffler le chaud et le froid avec sa fille qui subit ses remarques désobligeantes.
De cette conversation entre mère et fille nous n'avons que la voix de la maman et pourtant Carole Fives parvient à nous
faire ressentir de l'empathie pour celle qui reçoit ces appels. On devine en filigrane la douleur, mais aussi l'amour, l'amour malgré tout.
Original, drôle et touchant, ce livre vaut vraiment le détour.
« Survivre ne suffit pas »
99% de la population mondiale disparaît en quelques jours succombant à une nouvelle forme de grippe. Les quelques survivants voient la civilisation moderne s'effondrer, ses organisations politiques ses infrastructures et ses réseaux de communication avec, les laissant isolés dans un monde violent.
Une troupe nommée la Symphonie itinérante sillonne les bords du lac Michigan jouant dans les colonies de survivants, Shakespeare et Beethoven. Le temps passant ceux qui ont connu l'ancien monde et qui en cultive la nostalgie vont devoir vivre avec une génération
pour laquelle ce monde n'a jamais existé. C'est étrangement une ode à l'humanité que nous livre Emily ST. John Mandel à travers ce roman post-apocalyptique. Que reste-t-il quand tout à disparu ? La part d'humanité qui réside en nous peut-elle survivre à un tel cataclysme ?
Un livre plein d'espoir dans un monde d'où on pourrait le croire absent.
« La France du capitaine a besoin que nous fassions les sauvages quand ça l'arrange. Elle a besoin que nous soyons sauvage parce que les ennemis ont peur de nos coupe-coupes,...La seule différence entre eux et moi, c'est que je suis devenu sauvage par réflexion. »
Après avoir vu son ami, son « plus que frère »agoniser sous ses yeux et finalement mourir, Alfa culpabilise de ne pas avoir eu le courage de l'aider en abrégeant ses souffrances.
Depuis ce moment la sauvagerie encadrée de la guerre ne lui suffit plus.
Mais dans la folie et l'absurdité de la première guerre mondiale
on ne tolère que la guerre « civilisée ».
Livre puissant sur l'amitié et la guerre qui rend fou, qui détruit tout.
« Sa mère lui avait raconté qu’il y avait des pays de plaines vertes, de champs hauts, où le ciel ne fume plus, où la terre ne brume plus, mais couve et fonde, germine et emblave comme ce lit qui la requinque ce soir. »
De Magda, on ne sait finalement pas grand-chose, si ce n’est qu’elle est la femme de Joseph Goebbels et qu’elle a tué ses enfants dans un bunker sombre et humide quand tout s’effondrait autour d’eux. Mais on connait moins son histoire d’amour avec un juif et surtout que son beau-père et père adoptif était également juif.
Dans ce premier roman qui vous
prend littéralement aux tripes, Sébastien Spitzer imagine que Richard Friedländer le beau-père de Magda aurait écrit à sa fille depuis son lieu de déportation. Ces lettres auraient traversé la guerre passant de mains en mains, de déportés en déportés, chacun y intégrant un peu de son histoire.
Quelle claque que ce premier roman ! Dans un monde où on a tendance à penser de façon binaire, Sébastien Spitzer rend sa complexité à Magda, traversée par son temps, ses amours et ses ambitions.
Saul Karoo est ce qu'on appelle un script doctor, son métier consiste à retravailler un scénario ou un film. Mais Karoo est surtout un homme bourré de problèmes en voici quelques-uns :
-Alcoolique impénitent, l'alcool n'a plus d'effet sur lui, mais il continue de simuler l'ivresse pour conforter ses amis dans l'idée qu'ils se font de lui.
-Il ne supporte pas de se retrouver seul avec une autre personne, même si c'est son fils.
-C'est un lâche prêt à tous les renoncements.
-Son cynisme connait peu ou pas de limites.
Mais le pire est que Saul est bien conscient de ses défauts et
c'est ce qui fait que ce roman est drôle et tragique à la fois. On éprouve pour cet homme des sentiments contradictoires entre empathie et dégoût.
Il est difficile de vous dire à quel point cette histoire est géniale et l'écriture de Tesich magnifique.
Karoo est un chef-d’œuvre terminé peu avant son décès, il marque de son empreinte la littérature américaine contemporaine.
A NE PAS MANQUER
Il y eut un jour en Algérie, un jeune un peu fou, qui décida de fonder une libraire maison d’édition dans un local minuscule situé au 2 bis rue Hamani qu’on appelait autrefois rue Charras. Ce n’était pas qu’une librairie mais aussi un lieu pour la culture en général et surtout pour les amis et quels amis quand ils s’appellent Camus, Sénac…. Et comme il faut bien trouver un nom à ce lieu, il trouvera sans doute un des plus beaux noms qu’une libraire puisse porter, « Les vraies richesses » (d’après un texte de Giono).
A travers l’histoire d’un jeune homme, Ryad qui
est embauché à contre cœur pour vider ce lieu, lui qui n’aime pas les livres, Kaouther Adimi nous raconte l’histoire de cette aventure et de ceux qui l’ont fait vivre.
Hommage vibrant à Edmond Charlot, homme de l’ombre, fondateur de cette librairie, passionné qui a consacré sa vie aux livres et aux auteurs. Kaouther Adimi nous livre un texte fort et émouvant où « les vraies richesses » prennent tout leur sens.
« Des fois, les choses tournent mal. Quand elles arrivent dans la vie, on peut presque toujours les régler. Mais quand elles arrivent à l'intérieur d'une personne, elles sont plus difficiles à réparer. »
Eldon est un père qui a abandonné son fils, son alcoolisme l'a détruit et se sentant proche de la mort il appelle son enfant qui n'en est plus vraiment un pour lui demander son aide pour aller mourir sur la terre des ancêtres. Ce sont donc ces quelques jours, les derniers pour Eldon, que nous retrace ce roman.
C'est un roman pudique et d'un grande justesse, à la fois transmission
d'une tradition, une évocation de la nature sauvage berceau de ce peuple, mais c'est surtout l'histoire de ce père qui se raconte à son enfant sans fausse pudeur.
Richard Wagamese, aujourd'hui décédé, révèle dans ce premier roman traduit en français tout son talent.
Gaël Faye, rappeur de talent, est la révélation de cette année 2016. Il nous offre avec son premier roman Petit Pays un texte magnifique, sensible et pudique.
Il nous raconte l’histoire de Gabriel jeune garçon, fils d’un français et d’une mère Tutsi rwandaise réfugiée au Burundi. Il vit dans un quartier d’expatriés, protégé des troubles et des tensions qui agitent la région. Son quotidien c’est les jeux dans le quartier avec ses copains, voler des mangues dans les jardins des voisins. Mais nous sommes en 1994, le Rwanda va s’enflammer et le Burundi à sa suite. Le temps
de l’innocence est alors bel et bien fini...
Roman d’une grande justesse, Petit Pays est assurément un des plus beaux romans de cette rentrée littéraire 2016, à ne surtout pas manquer.
un livre à ne pas manquer
Et si un dilemme vous était imposé ? Charybde ou Scylla ? Le choix qui est laissé à Vera Kaplan le personnage de Laurent Sagalovitsch ne lui laisse aucune issu, quelque soit son choix, la honte et la culpabilité l’attendent. Tenter de sauver ses proches en condamnant d’autres juifs ou accepter la mort de ses parents ? Vera Kaplan va trahir son peuple à un moment ou l’histoire brouille les lignes entre le Bien et le Mal. Quand parfois faire le bien signifie la mort pour ceux qu’on aime.
Vous aurez sans doute envie de la juger, les justifications qu’elle avance ne vous convaincront peut être pas, mais vous ne pourrez pas la condamner. Peut-on reprocher à une personne de faire le pire pour vivre et sauver ses proches?
C’est un magnifique roman que nous offre Laurent Sagalovitsch, nous restons fasciné devant le destin de cette femme que tout accuse et pourtant...