Biographie d'Alfred Jarry
Alfred Jarry (1873-1907) n'a que treize ans lorsqu'il compose sa première comédie en vers : Les Brigands de Calabre. Il est alors élève au lycée de St Brieuc. Au cours des trois années qui suivent, il continue de rédiger pièces et poèmes. Pendant ce temps, au lycée de Rennes, d'autres lycéens chahutent leur professeur de physique, M. Hébert, surnommé le P. H. ou Père Eb, Ebé, Ebane, Ebouille. A son entrée en première au lycée de Rennes, en 1888, Jarry rencontre Charles Morin, coauteur des pochades consacrées à P.
H. , dont l'une relate les aventures de P. H. devenu roi de Pologne (Les Polonais). La première version d'Ubu Roi, aujourd'hui disparue, est représentée au domicile des Morin, puis chez les Jarry, par les Marionnettes du théâtre des phynances en 1888. S'il n'est pas l'inventeur du personnage, ni le seul auteur du premier Ubu Roi, Jarry est bien le seul créateur des Cornes du P. H. , puis d'Ubu cocu.
De retouches en remaniements, le P. H. prend définitivement le nom d'Ubu en 1891. Chez lui, pour amuser ses condisciples du lycée Henri IV, Jarry met en scène à de nombreuses reprises Ubu Roi et Ubu cocu. La première représentation d'Ubu Roi dans un authentique théâtre n'a lieu que le 10 décembre 1896, au théâtre de l'Ouvre à Paris. Malgré le prestige des décorateurs (Bonnard, Toulouse-Lautrec, Vuillard), du metteur en scène (Lugné-Poe), de l'acteur principal (Firmin Gémier), du musicien (Claude Terrasse), la représentation fait scandale.
Le public, indigné, refuse les outrances de la caricature et les invraisemblances de l'action dramatique. Jarry répond aux critiques en publiant son "drame en cinq actes, en prose, restitué en son intégrité tel qu'il a été représenté". Ce texte est accompagné d'un article, Questions de théâtre, dans lequel l'auteur tire leçon de l'échec d'Ubu Roi et justifie ses choix. Le cycle s'enrichit, en 1899, d'un Ubu enchaîné, d'un Almanach illustré du Père Ubu et, en 1901, d'un Ubu sur la butte.
En dix ans, la pochade des lycéens rennais a pris les dimensions d'un mythe universel. Son créateur, vampirisé par sa créature, signe Ubu certains de ses dessins et parle de lui-même sous ce nom. Jarry meurt le 1er novembre 1907 des suites d'une méningite tuberculeuse. Il allait avoir 34 ans. Le Père Ubu, quant à lui, continue de promener sa "gidouille" sur les scènes du monde entier. Le "primitif d'avant-garde" n'a trouvé son public qu'à la fin des années 1950.
Ubu est entré dans la légende et vit aujourd'hui des aventures que n'avait pas imaginées son créateur. Il peut changer de couleur, de langue, de pays : il conserve ses vices.
De par ma chandelle verte !
Une pièce facile à lire, qui aborde de nombreux thème à travers les personnages de père Ubu et mère Ubu, à la fois grotesques, cruels, tyranniques et avides de pouvoir et d'argent. Je trouve que cette pièce est encore très actuelle par rapport à notre société, où les remises en question du pouvoir et de l'argent sont très fréquentes.
L'écriture peut sembler énigmatique, mais elle est d'une poésie incroyable. Les nombreuses expressions inventées par Jarry nous semblent au fil de la lecture, de plus en plus familières. La spontanéité dans le langage des personnages les rend très drôles, et vraiment attachants.
On peut y voir le destin, on peut y voir la fatalité qui frappe ceux qui en veulent toujours plus, mais je pense qu'il faut surtout y voir une leçon de vie : ne soyez pas grotesque, ne soyez pas ridicule à rechercher toujours plus, mais apprenez à vivre heureux avec ce que vous avez, et dites "merdre !"