Politique de la psychanalyse face à la dictature et à la torture - "n'en parlez à personne"

Nous sommes en pleine dictature militaire au Brésil. Le journal clandestin de la Résistance, Voz Operaria, publie la nouvelle selon laquelle un analyste en formation dans l'une des deux sociétés de Rio fait partie d'une équipe de torture. Il est nommé, ainsi que son analyste. Cette information est transmise accompagnée d'une note manuscrite à la revue argentine Cuestionamos que dirige la très sérieuse psychanalyste, Marie Langer, qui, après avoir résisté au national-socialisme, a quitté l'Allemagne pour se réfugier en Argentine et n'a Ussé depuis de s'opposer courageusement aux dictatures.
Par Cuestionamos, la nouvelle circule à travers le monde psychanalytique et la Présidente de la Société Psychanalytique de Paris en 1973 en informe le Président de la Confédération Psychanalytique d'Amérique latine (COPAL) et, comme d'autres collègues le feront, le Président de l'Association Psychanalytique Internationale (IPA) qui est un Français. Officiellement tous tombent d'accord, à la mite du Président de la Société Psychanalytique de Rio de Janeiro, pour qualifier cette information de rumeur, pour dire qu'on cherche encore une fois à nuire à la psychanalyse et pour affirmer "solennellement" que le médecin en formation analytique dont le nom est mentionné fait l'objet d'une calomnie.
Ladite société s'emploiera dès lors à rechercher, non pas l'origine de cette "calomnie", mais la personne qui a pu s'en faire le messager. La note manuscrite qui a transmis l'information sera comparée par un graphologue aux inscriptions faites à un congrès et le rapport de l'expert appelé par le Conseil de la Société de Rio — un officiel du régime en place — conclura qu'il s'agit en mutes probabilités de l'auteur du présent livre.
Dès lors, Helena Besserman Vianna, membre de l'autre Société de Rio affiliée à l'IPA, sera désignée comme "calomniatrice" par les Conseils des deux Sociétés de Rio, soumise aux pires intimidations, exposée à la vengeance des militaires. Elle échappera, souvent de justesse, à l'exécution de nombreuses menaces. Le 11 août 1996, à Londres, le Conseil/Exécutif de l'IPA rend son verdict dans cette affaire.