Depuis dix ans, Madrid est en mouvement perpétuel, comme dans un rattrapage accéléré après quarante années de sommeil et de franquisme. Révolution des mœurs, révolution culturelle: celle-ci moins connue que celle-là est pourtant plus profonde. Qu'il s'agisse de peinture, de rock, de stylisme, de photo, de vidéo ou cinéma, la capitale de l'Espagne est devenue plus cosmopolite, plus inventive, dépassant dans la fébrilité des jours, et surtout des nuits, l'image de sa grande concurrente Barcelone.
La ville elle-même, prise dans ce tourbillon, dans cette quête éperdue de la "fête", change de visage: boutiques, galeries de peinture, bars et restaurants sont bondés en permanence. On y discute de corrida, de flamenco, de zarzuela . Traditions et archaïsmes font bon ménage avec un post-modernisme poussé à l'extrême. Il n'y a pas de place pour la tristesse dans ces discussions sans fin, sans but, dans l'ambiance enfumée des penas et tablaos.
Cette effervescence, cette nouvelle cartographie culturelle, nous avons essayé de les capter, de les dessiner dans ce numéro avec les meilleurs observateurs espagnols et français, parmi lesquels Juan Benet, Guy Scarpetta, Francisco Umbral, Rafael Conte, Marcel Oms, Gérard Imbert.