"J'ai eu envie de raconter mon aventure avec les livres, l'histoire des rencontres parfois cocasses qu'ils ont occasionnées, des voyages dans lesquels ils m'ont entraîné, en Italie et en Espagne, en Angleterre et en Irlande, en Suisse et en Belgique, en Amérique et dans les pays de l'Europe de l'Est du temps du despotisme des républiques populaires, en Russie après la chute du Mur". Comment éviter d'assombrir mon récit "des tristes teintes de la politique", comme s'en désolait Stendhal ? Le remède s'est imposé de lui-même au fil de ces pages : en riant de la politique et de son vaste commerce, de Paris et du Régime, des journalistes et des écrivains qui se coiffaient de leurs articles de foi.
Je n'avais qu'une envie : m'amuser de la comédie sociale, et donc amuser le lecteur. C'est à ce compatriote par l'esprit que je m'adresse. Ca s'impose, c'est pour Anatolia, trancha mon éditeur de la rue des Saints-Pères à qui je proposais ce livre. "T'as intérêt de te trouver une bonne attachée de presse", ajouta-t-il rêveusement en soufflant la fumée de son cigare. J'allai voir une de ces bonnes fées, qui m'émerveilla par sa liberté : " Est-ce que tu balances ? " me lança-t-elle avec un grand sourire.
"Disons que j'ai le goût de la farce. Elle surgit chez moi naturellement dans les situations les plus critiques...". Je me revoyais devant ce rédacteur en chef, mon article rejeté ; au tribunal cantonal, faisant face à un juge ; sur le quai de la gare de Vintimille, pourchassé par des collègues grévistes du temps où j'étais couchettiste à la Compagnie internationale des Wagons-Lits...