Né en 1941, dans la vieille Castille, Lauzarin fit ses études secondaires à Madrid dans les écoles salésiennes. Grand amateur d'Opéra, il pensa que sa voix aurait pu le conduire au temple de l'art lyrique de Milan, mais il abandonna cette chimère par manque d'hardiesse. L'arrivée en France à l'âge de dix-neuf ans interrompt ses études littéraires en langue espagnole pour les reprendre en langue française.
Il a pu comparer deux cultures littéraires, l'une censurée, l'autre relativement libre. Rien ne destinait Lauzarin à écrire. Plus de quatre ans furent nécessaires pour parachever cette trilogie dont voici le premier tome. Il l'a commencée au début de sa retraite, après une vie bien remplie comme ingénieur mécanicien. Il est évident que les dommages causés par le coup d'Etat franquiste furent infiniment dévastateurs pour l'Espagne ; par les assassinats durant la guerre civile et surtout lors des purges d'après-guerre.
Ce furent les enfants, dont la plupart étaient plongés dans l'indigence, qui subirent les plus atroces vilenies. Ils furent privés de nourriture, de chaleur parentale, de soins médicaux, et surtout de cette énorme joie de vivre qu'est l'enfance. Ce fut une génération gâchée. La mort guettait Tony dès sa naissance. Il manquait de tout dans cette Espagne anéantie, appauvrie et ravagée. Franco, ne pouvant pas alimenter la totalité de la population, ne nourrissait que ses inconditionnels ; les autres ne méritaient pas ses faveurs, ils étaient abandonnés à leur sort.
Les affamés ne purent que prier au Ciel. L'arrestation du père de Tony laissa sa famille sans ressources et le bourg où ils habitaient confondu. Rares furent les vaillants qui affrontèrent les inquisiteurs. L'amour de sa mère pour rendre son fils heureux ne put compenser son enfance gâchée, dilapidée et perdue : Tony peina pour s'intégrer dans un monde qu'il considérait cruel, un monde qui le priva de son père en interposant d'effrayants barreaux entre eux.