Zola écrivait la Réalité et ses ennemis le traitaient d'éboueur ; Zola disait la Vérité et les antidreyfusards criaient au traître. L'histoire et le verdict anonyme d'innombrables lecteurs ont fait justice à l'homme et à l'écrivain. C'est du Zola, dit-on couramment devant une situation sordide. Pourtant, le romancier naturaliste est surtout un créateur de mythes dont la plume s'envole "de la vérité au symbole". Jeune provincial pauvre égaré dans le Paris impérial, il veut écrire et y parvient en jouant la carte de la défense de la modernité. A travers l'"histoire naturelle et sociale d'une famille sous le Second Empire", il décrit et il dissèque en prenant appui sur les lois de l'hérédité, un parti pris scientifique qui ne réduit en rien son génie de poète épique. Dans les mois qui suivent J'accuse... !, l'homme le plus insulté de France réclame "après quarante ans d'analyse le droit à l'utopie". Zola meurt le 29 septembre 1902, peut-être assassiné, laissant inachevé Justice, le dernier des quatre "évangiles" qu'il écrivait pour la France du XXe siècle. Ce livre-catalogue, édité à l'occasion du centenaire de la mort de Zola et de l'exposition qui lui est consacrée à la Bibliothèque nationale de France, retrace son parcours à la fois littéraire, biographique et historique. Par-delà l'observateur intrépide du réel, on découvrira le poète et le peintre, le passionné et le rêveur. On s'apercevra aussi que l'écrivain se renouvelle sans cesse, accompagnant toujours, précédant souvent une époque dont il fut le témoin agissant. Le Zola de 1900 n'est plus celui de L'Assommoir, il est pleinement présent à son temps, à ses interrogations morales, spirituelles et politiques, à son esthétique aussi, qu'elle soit dramatique, picturale ou musicale. L'ouvrage comporte près de trois cents illustrations : manuscrits, imprimés et gravures provenant des propres collections de la Bibliothèque nationale de France, tableaux et dessins (Cézanne, Manet, Monet, Pissarro, Renoir, Van Gogh et bien d'autres), photographies (dont beaucoup prises par Zola lui-même), objets prêtés par des collectionneurs privés, par la Maison d'Emile Zola à Médan et par de grands musées, en particulier le musée d'Orsay. Dirigé par Michèle Sacquin, conservateur en chef au département des Manuscrits, cet ouvrage comporte une introduction d'Henri Mitterand et rassemble les contributions de spécialistes du Centre d'études sur Zola et le naturalisme de l'Institut des textes et manuscrits modernes du CNRS (Colette Becker, Jean-Pierre Leduc-Adine, Jacques Noiray, Alain Pagès, Chantal Pierre...) et d'historiens (Maurice Agulhon, Jacqueline Carroy, Alain Corbin, Michelle Perrot). Ils portent sur Zola les regards croisés d'une critique pluridisciplinaire et contemporaine.