Ce " rien ", cette chose qui nous est " commune ", réconcilie avec une certaine idée poétique italienne et française, où l'urgence des circonstances s'exprime à travers une richesse et un raffinement formels hérités peut-être de Guittone, D'Aubigné, les grands Baroques : ceux-ci, au-delà des constructions stylistiques, tout tendus vers l'effort de composer des inharmonies, apprivoiser les monstres qui habitent chacun de nous. Ainsi, Rien commun s'inscrit-il loin du divertissement, fût-ce en la légèreté des mots-thèmes (vol, aile, air, rêve, ombre...) et de leur trame, par des images graves qui proposent pourtant çà et là un réconfort, si " renaît la pitié ". L'on retrouve alors une ligne singulière, descendant de Dante à Baudelaire et Montale, ou mieux, à l'inverse, depuis Vegliante re-traversant Montale " vers l'amont Dante " ; et, plus simplement, une possibilité de rencontre avec celui (un " je ", en tout cas) qui déclare, presque scandaleusement aujourd'hui: " A présent je te cherche, lecteur... ", pour " aucune / allégresse où n'aspirent les mots ". Pont jeté hors de soi sur un autre cours de la parole, ses infinies résurgences.
Rien commun est le cinquième recueil de Jean-Charles Vegliante ; deux volumes de ses poésies sont traduits simultanément en Italie et en Grande-Bretagne.