Un très beau roman tout en finesse, où la narratrice devine et invente l'histoire des gens qu'elle rencontre dans son quotidien, comme la caissière du franprix, dont on devine l'enfance, le caractère bien trempé, puis l'exil.
Mêlée à la vie devinée de multiples inconnus, c'est l'histoire de la narratrice qui se dessine, petit à petit, entre doux souvenirs et attente sourde. C'est un très beau texte, où l'on croise des personnages souvent esseulés, malgré eux. Les portraits sont minutieux, les images frappantes de vérité. Et bien sûr, une écriture magnifique.

Marie-Hélène Lafon a l'art de raconter la vie des gens, comme ça, l'air de rien. La vie vécue ou bien la vie rêvée. La vie qui suit son cours, avec ses petits et grands événements, dans l'ordre et dans le désordre.
On passe d'un personnage à un autre, d'un passé réel à un présent imaginé, ou l'inverse. On se perd un peu, on retombe sur nos pieds.
Et surtout, on est emporté par son style si particulier, ses phrases à la fois faciles à suivre et truffées de mots désuets ou savants, qu'on a plaisir à (re)découvrir.
Le lecteur se sent grandi, l'auteur lui fait confiance, et le pari est gagné : bien après la dernière page, le livre et ses personnages continuent à vivre en nous…

Marie Hélène Lafon délaisse ici l'univers rural pour nous parler des existences urbaines. La narratrice observe des inconnus, attentive au langage du corps et imagine leurs destins. Comme souvent chez Lafon, la solitude est un des thèmes principaux du roman mais elle parle aussi des fulgurances, des joies intimes avec maestria.