C'est le temps des vendanges, au sud de Lyon. Sur cette côtière du Rhône où la farandole des vignes escalade les terrasses, Jean Vitrat achète une ancienne ferme pour retrouver des racines, après vingt-trois années de vie militaire, qui l'ont conduit du Vercors à l'Indochine et l'Algérie. Il a choisi de remiser ses décorations d'officier sorti du rang, avec l'espoir que le temps lui permettra de refermer ses blessures, d'oublier ses guerres et les trahisons de sa femme. Dans cette région, dont le paysage s'élargit de la vallée du Rhône jusqu'aux Alpes, il entreprend de restaurer peu à peu la maison ruinée. En redonnant la vie à la grande demeure, en s'abandonnant au rythme de la terre et des saisons, il parvient presque à écarter la vision de Djamel, l'enfant fauché par une rafale de mitraillette dans le bled... Le monde extérieur vient pourtant le chercher dans son refuge : son voisin, un paysan aux idées avancées, objecteur de conscience pendant la guerre d'Algérie, une directrice d'école catholique dont les convictions sont à l'opposé des siennes. Les transistors font pénétrer le printemps 1968 dans la vie de tous ces personnages qui vont se sentir bousculés par la fièvre de Mai. Les descriptions, remarquables de précision et d'un lyrisme modeste - les travaux de la maison et du jardin, l'observation de la nature et des saisons - font des moments qui captivent le lecteur. La chronique d'une France régionale s'enrichit de l'histoire d'un homme marqué par ses souvenirs de la Résistance et de ses guerres, qui impriment émotion et profondeur à l'intrigue.