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En juin 1958, une équipe de tournage française débarque à Rio de Janeiro. Dans les quartiers pauvres se répand la nouvelle d'un drôle de casting : on recherche de jeunes comédiens amateurs noirs. A sa réécriture du mythe d'Orphée et Eurydice, Aurèle Marquant a l'intention de donner pour cadre une favela vibrante de tragédie et de joie. Le réalisateur a reconnu son Eurydice en Gipsy Dusk, danseuse américaine métisse rencontrée à Paris.
Breno, footballeur brésilien au chômage, sera Orphée ; Eva, comédienne martiniquaise, et Norma, Carioca pauvre mais ambitieuse, seront les deux autres visages féminins. Déjà les décors se montent, les acteurs s'apprivoisent et les premières scènes sont tournées sur des airs chantés à la guitare. Cette effervescence artistique ne passe pas inaperçue : deux agents locaux de la CIA flairent un coup à jouer avec la bossa nova, tandis que le film aiguise les intérêts du Brésil, mais aussi de la France de Malraux, soucieuse de se placer dans la compétition internationale que constitue le festival de Cannes.
Un livre à ne pas rater
« Nos étoiles les plus filantes » est un superbe roman qui immerge totalement le lecteur dans tout le processus de création du film. Il en suit les étapes successives au travers des regards de ses différents protagonistes : comédiens mais aussi musiciens ainsi que tous ceux qui ont pu graviter, de près ou de loin autour du tournage. La multiplication des points de vue ne nuit pas du tout à l'intrigue, bien au contraire. En effet, Estelle-Sarah Bulle parvient parfaitement à faire exister chaque personnage. Ainsi, le lecteur va découvrir le parcours de chacun mais également ses sentiments ainsi que ses attentes liées au film. L'ensemble sonne particulièrement juste et parvient à l'emporter avec lui. le livre illustre tout un pan de l'histoire du Brésil avec sa parenthèse démocratique et son désir de construction d'une nation menacée par l'influence néfaste et grandissante des militaires et des pressions extérieures. En parallèle, le lecteur assiste à la naissance et l'essor de la Bossa Nova mais également sa récupération commerciale par les Etats-Unis. Mais surtout en filigrane transparaissent le racisme et la ségrégation, présents dans toutes les sphères. Ainsi les autorités brésiliennes sont plus soucieuses de renvoyer une image de carte postale du pays, quitte pour cela à tenter de gommer la présence des favelas et des populations qui les habitent. La situation n'est pas meilleure dans le cinéma, aussi bien français qu'américain, où être une femme noire semble condamner votre carrière à se heurter à un plafond de verre. Car comme le dit le journaliste François Chalais à l'actrice principale, métis, du film : « Évidemment, vous ne pourrez jamais interpréter la Dame aux Camélias ».
Pour tous ses protagonistes, le film a constitué une sorte de parenthèse dans une période de bouillonnement artistique tant du point de vue cinématographique que musical. Et leurs espoirs d'ascension ne dépasseront pas, face aux réalités sociologiques et politiques de leur époque, le stade des étoiles filantes figurant au titre du livre. Un livre à ne pas rater lors de cette rentrée littéraire.