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Écriture et déracinement : le face à face interroge, dès lors que nous cherchons à percevoir l'espace littéraire de l'exil en dehors de ce que Nabokov appelait " l'expression facile de la nostalgie ". Car exil et geste créateur s'affrontent : autant les migrations forcées dévoilent les mécanismes de la haine et dressent des frontières, autant la construction d'une identité artistique réclame l'ouverture des sensibilités.
Le métier du poète (Canetti) devient alors celui du clandestin : il est le passeur impénitent qui préserve le " véritable accès entre les êtres ". Le passant - tel les figures d'un Giacometti - convient à Vladimir Nabokov, Elias Canetti et Yordan Yovkov. Ces trois grands Européens du XXe siècle nous invitent à une approche singulière de l'expérience de l'exil. Canetti imagine un homme étrange : celui qui " court le long des frontières et maudit leur étanchéité ".
Cet homme-là, c'est le Dichter, l'écrivain-poète. Véritable créateur d'espaces, il saisit les identités et les villes traversées - à l'instant de leur métamorphose. La perception migrante découvre une mélancolie prospective.