Yohann a douze ans lorsqu'il croise l'ami de son père, ermite, chasseur, pécheur, guérisseur… « homme de la nature » et organisateur des battues si fin connaisseur des coins à carpes. Des parties de pêche aux courses dans la forêt médocaine, l'enfance de Yohann se vit en liberté. Et puis viennent les premiers doutes. L'ami de la famille ne peut pas agir « mal »… puisqu'il initie Yohann aux secrets de la vie en pleine nature.
« À douze ans on brûle de curiosité, de renouveau, d'aventures lointaines et inédites. À douze ans on ne se pose aucune question, on se laisse aller, en toute confiance, surtout quand on a en face de soir l'ami du père, que l'on suit aveuglément… » Dans la cabane en bois, il n'y avait qu'une couche… Avant-propos de Roland Dumas
Yohann parle de sa vie à la première personne, et ne réagit qu'à travers un écran. L'écran mental, assourdi, celui de la conscience et de la mémoire, qui l'amène à se focaliser sur le viol qu'il a subi, à l'âge de 12 ans. Et puis l'écran télévisuel, qui ravive, un soir, cette mémoire, à travers un film L'effet papillon, dans un scintillement hallucinatoire, qui offre tout, qui donne tout, et qui reprend tout, et qu'il attribue, sans cesse à son violeur et aux remords qui le tenaillent parce qu'il a conservé le secret durant quinze années.
Et puis c'est la révélation des scènes pédophiles du film, qui s'étalent sous ses yeux, le déclic le transformant en meurtrier, et son départ sur la route à la recherche de René, l'ami de son père, lequel n'a eu de cesse que de «?l'effeuiller, écaille après écaille, après l'avoir capté dans ses filets de pêche ruisselants?». René et sa cabane en bois, où l'enfant se fait abuser, à deux reprises. René l'ermite, l'homme des bois, qui survit seul, à l'aide de petits boulots et de maigres salaires, suivi par l'ombre de son chien, «?bas, rouge comme le sang?».
Suivent l'incarcération, la maison d'arrêt, où il côtoie Johnny sous l'emprise de l'écran du «?net?», et le procès devant la cour d'Assises. C'est le face-à-face hallucinant d'un violeur et d'un assassin, qui se côtoient jusqu'à former un couple transgressif, uni dans l'indicible. C'est aussi le poids de l'écran sur la violence, et la difficulté de vie des enfants violés qui ne sont que les spectateurs de leur existence.
Les thèmes du roman, - le viol, - le silence familial et le non-dit de toute victime de viol qui refuse l'émergence au niveau de la conscience pour éviter d'être détruit mentalement et émotionnellement?; - la vengeance, - la vie en pleine nature, - l'impossibilité d'aimer?; - L'influence de l'écran télévisuel dans l'émergence du passage à l'acte et la confusion des rôles entre le bourreau et sa victime indissociables jusqu'à un couple transgressif?; - Et enfin, le sentiment d'injustice face à l'inertie du pouvoir judiciaire qui peut pousser à la vengeance privée.
Biographie de Dominique Hoflack
Issue d'une lignée d'avocats et de magistrats, Dominique Hoflack a été Procureur de la République à Douai, responsable de la section criminelle à Lille, et Avocat Général au sein des cours d'Assises de Saint Omer, Douai, et Bordeaux. Elle a publié Femmes bourreaux. Femmes victimes (Éditions du Moment, 2015). Elle vit à Bordeaux.
