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Après le succès de Volia volnaïa, Victor Remizov explore de nouveau les paradoxes d'une Russie à deux vitesses, entre campagne sibérienne et faste moscovite, pour dresser le portrait d'une jeunesse qui cherche à se construire. Aussi glaçante qu'intense, une fresque brillante où s'entremêlent les destins de deux cousines en quête de repères. A Beloretchensk, en plein coeur de l'immense Sibérie, Katia et Nastia, la vingtaine, lasses de voir leur quotidien s'embourber dans la misère, décident de quitter leur province natale pour les lumières de la capitale.
Elles rêvent d'avenir, d'argent, d'amour ; elles rêvent d'amitié, de joie, de nouveauté. Mais c'est le Moscou de l'argent sale, du mensonge et de la violence qui les accueille. A peine descendues du train, les voici traquant toit, travail, nourriture, craignant à chaque minute de devoir retourner auprès de leurs familles et assumer un échec. Livrées à elles-mêmes dans une jungle urbaine d'une brutalité inouïe, les deux devouchki se verront contraintes de garder la tête froide pour éviter d'avoir à commettre le pire et de sacrifier ce qu'elles ont de plus cher : l'espoir.
Devouchki
J'avais beaucoup aimé le premier roman de Remizov, Volia Volnaïa, et j'attendais donc la sortie de son deuxième avec impatience et une légère appréhension, celle d'être déçu en lisant un remake pâlot. Mais il n'en n'est rien ! Car Remizov affectionne l'art du contre-pied. Volia Volnaïa, c'était des histoires de bonshommes, des chasseurs plutôt âgés, dans la forêt, le silence et la lenteur. Là, c'est le destin croisé de deux jeunes filles (des "devouchki" dit-on en russe) de la taïga emportées dans le tourbillon de la capitale, assourdissante et chaotique. Le Moscou de Katia et Nastia est passablement rock and roll : entre les galères des migrants, les rafles de la police, les (très) mauvaises rencontres au fond des bois, les trahisons entre amies, et les milliardaires repentis. Le roman garde cependant toute la patte de l'écrivain avec une tension puissante dans l'intrigue, des dialogues haletants et des passages très lyriques notamment sur la Sibérie et l'Italie qui viennent comme des refuges où le lecteur peut reprendre son souffle et s'abriter quelques instants du tourbillon moscovite avant d'y replonger avec plaisir. Le pari est vraiment réussi. Ca fait sacrément envie et peur à la fois de découvrir cette Russie pétrie de contradictions. J'avais beaucoup aimé son premier roman à la Tourgueniev, j'ai adoré celui-là à la Dostoïevski. Quelle plaisir de découvrir avec Devouchki un deuxième roman aussi fort que le premier. Vivement le troisième. Mais que va-t-il bien donc bien pouvoir nous concocter la prochaine fois ?