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Une gigantesque demeure dans la région de Chautauqua, près du mythique Lac Noir. Six générations d'une même famille l'habitent au cours du xixe siècle : les fortunés et influents Bellefleur. Ils possèdent une multitude de terres, emploient leurs voisins et pèsent sur le gouvernement. Groupe excentrique et prolifique, ils composent un clan des plus bigarrés : un tueur en série, un allumé qui part se terrer dans les montagnes à la recherche de Dieu, un noctambule inquiétant, un brillant scientifique, une enfant singulière, sont autant de personnages qui viennent animer la vie domestique.
Après la naissance de sa fille Germaine, Leah, une jeune femme délicate, décide de restaurer l'empire des Bellefleur, tandis que son mari, Gideon, incorrigible pilote qui cherche son propre plaisir dans des activités égoïstes, s'en éloigne indéniablement, jusqu'à finir par détruire la lignée toute entière dans un acte macabre final. Avec Bellefleur, Joyce Carol Oates signe un roman baroque, foisonnant et riche qui, d'un rythme lancinant, nous entraîne dans les pénombres des consciences.
En mélangeant événements magiques et historiques, elle nous livre une réflexion sur les limites de la liberté individuelle dans une société américaine cloisonnée où les origines et les racines entravent les destins.
Bellefleur
"Ceci est une oeuvre de l'imagination, et doit obéir, avec humilité et audace, aux lois de l'imagination. Que le temps se noue et se déploie, puis d'efface, pour redevenir formidablement présent ; que le "dialogue" se fonde parfois dans le récit, et dans d'autres conversations présentées de façon conventionnelle ; que l'invraisemblable fasse autorité et soit investi d'une complexité habituellement réservée à la fiction réaliste : l'auteur l'a voulu ainsi. Bellefleur est une région, un état de l'âme et il existe réellement ; ces lois, sacro-saintes, sont tout à fait logiques."
Voilà la note de l'auteur en introduction de ce roman de Joyce Carol Oates. Bellefleur a été écrit en 1981, il est un des premiers romans de l'auteur, écrit notamment en réaction à certains critiques qui qualifièrent ces premiers romans de gothique. Cette note nous prévient : inutile de chercher dans ce roman une logique temporelle ou factuelle. Il n'y en a pas et ce n'est pas ce que l'on demande à cette oeuvre.
JCO décrit l'histoire de la famille de Bellefleur sur plusieurs générations, à partir de Jean-Pierre Bellefleur à la fin du XVIIIe siècle. Chaque chapitre se concentre sur une époque, parfois sur un personnage. D'autres chapitres encore sont plus thématiques et présentent par exemple les différentes automobiles au fil du temps. Mais attention rien n'est anecdotique. On sent bien que tout à un sens, les événements s'entrecroisent et se répondent. On aimerait parfois avoir la clé pour comprendre les nombreux mystères de ce roman. Mais c'est là toute la magie de JCO : même en l'absence de réponses, on se laisse emporter, bercés par cet univers gothique, souvent inquiétant, toujours éblouissant.
La famille Bellefleur semble être victime d'une malédiction. Ou bien est-ce le château lui-même, personnage phare du roman ? Quoi qu'il en soit les morts s'enchaînent : accidents mystérieux, suicide, disparition surprenante. Les destins des personnages sont voués au drame. Seuls moyens pour eux d'y échapper ? Prendre la fuite ? Chercher le salut auprès d'un individu qui ne serait pas un Bellefleur ? Les Bellefleur n'aiment pas les étrangers et les mariages ont souvent lieu entre cousins, de quoi faire perdurer encore la malédiction.
C'est un livre prenant, passionnant. Certes un pavé de plus de 900 pages mais qu'on ne sent pas passer tant la lecture est agréable et l'histoire poignante.