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Aline Sitoé Diatta naît en 1920, au beau milieu des forêts luxuriantes de la Casamance, dans le sud du Sénégal. Enfant déterminée, puis adolescente indépendante, solitaire et douce, elle quitte la brousse pour se rendre à Dakar afin d'y travailler comme gouvernante dans une famille de colons. C'est là qu'elle entend, pour la première fois, des voix qui lui ordonnent de rentrer chez elle pour libérer son peuple.
Prônant la désobéissance civile et la non-violence, Aline appelle les Sénégalais à lutter pour leurs terres et le respect qui leur reviennent de droit. S'entourant des anciens, comme le veut la tradition diola, écoutant les conseils de son sage ami Diacamoune, la jeune femme est vite érigée en icône de la résistance, magnétique et insoumise, et est sacrée reine. Menaçant l'ordre établi et mettant à mal l'administration française, Aline, la « Jeanne d'Arc du Sénégal », devient l'ennemie à abattre, mettant, dès lors, sa jeune vie en danger.
À travers Aline, c'est la musique, tragique et sublime, de tout un pays que Karine Silla fait entendre au lecteur par son écriture aussi envoutante et inspirante que la voix de cette femme de lutte et de cour qui plus jamais ne nous quittera.
Splendide hommage à une femme d’exception
Aline Sitoé Diatta naît en 1920 en Casamance, cette région du sud du Sénégal majoritairement peuplée par les Diolas, de tout temps réputés pour leur attachement à la liberté et pour leur refus de toute domination étrangère. Menée par des voix intérieures lui intimant de libérer son pays de la colonisation, prônant la désobéissance civile non violente, Aline est consacrée reine par son peuple et devient l’icône d’une résistance que l’administration française de 1942, affaiblie par la seconde guerre mondiale, décide aussitôt de mater. Arrêtée et déportée, la jeune femme meurt à vingt-quatre ans, devenant à jamais l’héroïne de la résistance sénégalaise à la colonisation.
Franco-sénégalaise, Karine Silla rend un splendide hommage à cette femme d’exception, sorte de version africaine de Jeanne d’Arc et de Gandhi, qui reste totalement méconnue en dehors du Sénégal. Ce roman biographique nous fait découvrir son étonnant portrait, en même temps qu’un grand pan d’histoire du Sénégal, depuis l’arrivée des premiers Portugais puis le début de la colonisation française entre les 15ème et 17ème siècles, jusqu’à la seconde guerre mondiale. On y assiste à la bataille de Dakar, qui oppose De Gaulle aux Alliés et à la France de Vichy en 1940. On y voit partir pour la France des dizaines de milliers d’engagés, pendant que la discrimination raciale du régime pétainiste, les confiscations et l’arrêt des importations françaises ne cessent de dégrader les conditions de vie des autochtones.
Au travers de personnages travaillés en profondeur, notamment l’ambivalent Martin, amené peu à peu à reconsidérer les convictions héritées de son éducation occidentale, s’expriment tour à tour les points de vue des Sénégalais, de plus en plus pressurés et réduits à la famine alors que l’arachide est venue remplacer le riz des cultures vivrières, et celui des colons qui, majoritairement abrités derrière leurs préjugés de supériorité blanche, convaincus d’apporter la « civilisation » aux « sauvages », mettent tout en place pour asseoir leur pouvoir sur ce territoire et en exploiter les ressources au seul bénéfice de la métropole.
Un puissant souffle romanesque traverse cette fresque aussi vivante que passionnante qui, en ressuscitant une figure historique injustement oubliée hors de son pays, nous rappelle avec réalisme les méfaits de la colonisation en Afrique. Coup de coeur.