En 2015, Henry Worsley, ancien officier de l’armée britannique, entreprend à cinquante-cinq ans la traversée pédestre de l’Antarctique, en solitaire et sans assistance. Ce n’est pas sa première expédition polaire, puisque, depuis toujours fasciné par Ernest Shackleton, il avait déjà relié à pied les deux extrémités du continent, en équipe, menant à bien ce que son prédécesseur n’avait pu terminer cent ans plus tôt. Réussira-t-il ce nouvel exploit que les plus grands spécialistes jugent inouï ?
A pied, sans ravitaillement en cours de route, sans chiens ni voile pour
l’aider à tirer son traîneau sur les plus de mille six cents kilomètres de son périple, Henry Worsley part pour ce qu’il estime quatre-vingts jours d’épreuves, au travers d’un désert où les températures peuvent atteindre moins soixante degrés, les vents trois cent vingt kilomètres à l’heure, et où l’altitude moyenne de deux mille trois cents mètres s’accompagne de dénivelés abrupts parsemés de dangereuses et traîtresses crevasses. Y sévissent de terrifiants épisodes de whiteout, lorsque l’absence totale de visibilité dans un univers uniformément blanc fait perdre tout repère et jusqu’au sens-même de l‘équilibre. Survivre dans un tel environnement exige une condition physique, un mental et des capacités hors normes. Ce dont notre homme dispose comme personne…
Accompagné d'appréciables photographies, le récit embraye directement au plus profond de l’aventure, instituant dès le début une tension qui ne va pas lâcher le lecteur. Henry Worsley est parvenu aux trois quarts de son trajet et, épuisé, il doute. Doit-il s’entêter ou rester fidèle à cette phrase qui a sauvé son cher Shackleton plusieurs fois : “Mieux vaut un âne vivant qu’un lion mort” ? La réponse attendra la fin du livre, le temps d’un arrêt sur image et d’un long flash-back, qui vont nous permettre de comprendre l’obsession d’Henry pour son héros, l’influence de ce dernier sur toute sa vie et sa carrière, et son inextinguible besoin de dépassement de soi. Ce sont ainsi deux fascinants aventuriers, séparés d’un siècle, que le récit nous fait rencontrer, dans une narration fascinante qui fait la part belle à leurs extraordinaires personnalités, autant qu’aux incroyables rebonds de leurs destins. Plongé depuis son fauteuil dans l’aventure la plus extrême, la plus dépaysante et souvent la plus étonnante, le lecteur captivé en prend plein les yeux. Il ne peut que frémir face au niveau d’engagement de ces hommes, constamment à la limite du point de rupture, et que leurs incursions répétées dans la zone rouge du danger exposent à l’inéluctable.
Les ultimes rebondissements du périple d’Henry Worsley ne seront finalement pas ceux auxquels, ni lui-même, ni le lecteur, pouvaient s’attendre. Après la trépidation et les sensations de l’aventure par procuration, ce dernier n’échappera pas à l’émotion et restera songeur face à la puissance de certains destins. Coup de coeur.
White darkness
Qui de mieux que David Grann pour saisir ces vies d’aventures et de vertiges effrénés, pour s’enticher de ces têtes brûlées qui vivent un royaume imaginaire en quête d’infini.
White Darkness c’est l’histoire d’Henry Worsley, militaire britannique, qui s’en va, d’exploration en exploration, dans les traces d’Ernest Shackleton. Worsley fait partie de cette caste d’aventuriers polaires à l’échine parcourue par l’énergie vagabonde et l’électricité solaire propres à ceux qui ont pour idéal les conquêtes impossibles.
Un roman qui possède le souffle des grands larges lointains et des petites voix qui poussent vers des ailleurs périlleux. Mais qui, au-delà de mener quelque part, guident au Grand Soir du Soi.
Ça sent les corps qui se dépassent, ces corps mal lavés qui s’essoufflent mais ne cèdent jamais. Ça sent la trouille parfois, l’idéal toujours. Ça s’engouffre à l’intérieur de nous comme siffle un mauvais blizzard.
Ça transpire le courage, le dépassement de soi et l’envie toujours d’en démordre dans ces horizons glacés, ces impénétrables sanctuaires.
Grandiose et effrayant portrait d’un homme dont la légende garde un goût d’amertume.