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XXe siècle
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Iran
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Choquant
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Téhéran
« Ils sont à l’abri mais (…) errent dans l’inéluctable va et vient des jours et des nuits », même loin de l’Iran il n’y a point de paix, point de salut pour eux, ils ont « le regard flou des vagabonds », la mémoire silencieuse, l’espoir famélique de revoir le jacaranda. Ils sont morts en silence, brisés dans les geôles, à Evin. « Ici, ce n’était pas un lieu fait pour le bonheur. Ici, c’était Evin. Un endroit fait pour ressentir de la peur, une peur qui mijotait, qui bouillonnait, qui fumait», qui hurlait. « C’était les plaintes d’un corps qui ne s’appartenait
plus, abandonné, réduit à une masse informe, dont le seul signe de vie restait la force avec laquelle il fracassait le silence à l’intérieur des murs de la prison. Et aucun d’eux ne savait quand viendrait son tour, quand il serait happé aussi par le corridor, et qu’il ne resterait de lui que des cris. » La Révolution a beau être finie, la lutte continue. Lutte pour survivre à cette guerre avec le voisin, lutte pour vivre au milieu de ces frères et ces sœurs qui vous guettent, vous épient.
La vie n’est plus pareille à Téhéran, les familles se disloquent, les prisons regorgent de ces morts silencieux tel Amir qui "en quarante-cinq jours, avait appris à connaitre l’odeur de la viande qui pourrit jour après jour, crasse après crasse, interrogatoire après interrogatoire au cours desquels les mêmes questions, les mêmes accusations, les mêmes menaces étaient réitérées comme un cauchemar sans commencement et sans fin, on lui apprenait comment devenir un animal ». Quel avenir pour Neda, Forugh, Sara, Omid et tous les autres nés en prison ? Quel bonheur pour Leila qui pour aider maman Zimat abandonne travail et amour ? Tant de destins abîmé, de corps, de mémoires spoliées, effacées dans cet Iran révolutionnaire.
Sahar Delijani, elle-même née en captivité distille des portraits de famille usés, jaunis par la douleur et la séparation. Des combats politiques, des combats de vie, d’amour pour ces êtres de papiers décrient dans leur quotidien au travers de chroniques. Un monde où les réchappés ont « le même regard que les survivants d’un séisme », où les gens n’ont plus la quiétude d’antan, à l’instar de cette mère qui paraissait « vieille, comme si elle était en deuil. Elle ne l’était pas, elle était seulement triste. Si elle avait pu, elle aurait pris la place de ses filles en prison. Elle aurait été plus heureuse, comme ça, plus en accord avec elle-même ».
Des exactions, des exécutions longtemps tues, reléguées aux fins fonds de la mémoire mais qui ressortent peu à peu. Paradoxe de l’Histoire, ces enfants de la Révolution reprendront les rênes délaissés par leurs parents un beau jour de juin 2009. Après l’excellent Le Jour où les skateboards seront gratuits de Saïd Sayrafiezadeh, on replonge dans la Révolution iranienne et son douloureux héritage.
Merci aux éditions Albin Michel, ainsi qu’à Entrée livres et aux librairies Décitre pour cette découverte.
Les enfants de la Révolution
« Ils sont à l’abri mais (…) errent dans l’inéluctable va et vient des jours et des nuits », même loin de l’Iran il n’y a point de paix, point de salut pour eux, ils ont « le regard flou des vagabonds », la mémoire silencieuse, l’espoir famélique de revoir le jacaranda. Ils sont morts en silence, brisés dans les geôles, à Evin. « Ici, ce n’était pas un lieu fait pour le bonheur. Ici, c’était Evin. Un endroit fait pour ressentir de la peur, une peur qui mijotait, qui bouillonnait, qui fumait», qui hurlait. « C’était les plaintes d’un corps qui ne s’appartenait plus, abandonné, réduit à une masse informe, dont le seul signe de vie restait la force avec laquelle il fracassait le silence à l’intérieur des murs de la prison. Et aucun d’eux ne savait quand viendrait son tour, quand il serait happé aussi par le corridor, et qu’il ne resterait de lui que des cris. » La Révolution a beau être finie, la lutte continue. Lutte pour survivre à cette guerre avec le voisin, lutte pour vivre au milieu de ces frères et ces sœurs qui vous guettent, vous épient.
La vie n’est plus pareille à Téhéran, les familles se disloquent, les prisons regorgent de ces morts silencieux tel Amir qui "en quarante-cinq jours, avait appris à connaitre l’odeur de la viande qui pourrit jour après jour, crasse après crasse, interrogatoire après interrogatoire au cours desquels les mêmes questions, les mêmes accusations, les mêmes menaces étaient réitérées comme un cauchemar sans commencement et sans fin, on lui apprenait comment devenir un animal ». Quel avenir pour Neda, Forugh, Sara, Omid et tous les autres nés en prison ? Quel bonheur pour Leila qui pour aider maman Zimat abandonne travail et amour ? Tant de destins abîmé, de corps, de mémoires spoliées, effacées dans cet Iran révolutionnaire.
Sahar Delijani, elle-même née en captivité distille des portraits de famille usés, jaunis par la douleur et la séparation. Des combats politiques, des combats de vie, d’amour pour ces êtres de papiers décrient dans leur quotidien au travers de chroniques. Un monde où les réchappés ont « le même regard que les survivants d’un séisme », où les gens n’ont plus la quiétude d’antan, à l’instar de cette mère qui paraissait « vieille, comme si elle était en deuil. Elle ne l’était pas, elle était seulement triste. Si elle avait pu, elle aurait pris la place de ses filles en prison. Elle aurait été plus heureuse, comme ça, plus en accord avec elle-même ».
Des exactions, des exécutions longtemps tues, reléguées aux fins fonds de la mémoire mais qui ressortent peu à peu. Paradoxe de l’Histoire, ces enfants de la Révolution reprendront les rênes délaissés par leurs parents un beau jour de juin 2009. Après l’excellent Le Jour où les skateboards seront gratuits de Saïd Sayrafiezadeh, on replonge dans la Révolution iranienne et son douloureux héritage.
Merci aux éditions Albin Michel, ainsi qu’à Entrée livres et aux librairies Décitre pour cette découverte.