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Jim agite doucement la main en refermant la porte derrière sa femme Annie qu'il a envoyée faire des courses. Il enroule alors soigneusement son pardessus dans le sens de la longueur et le pose au pied de cette même porte. À son retour, c'est un miracle si Annie ne fait pas sauter la maison entière en craquant une allumette dans l'appartement rempli de gaz.
Les chevilles enflées après une journée à faire l'aumône, sour Saint-Sauveur prend la relève des pompiers auprès de la jeune femme enceinte et des voisins sinistrés de ce petit immeuble de Brooklyn.
La nouvelle du suicide étant déjà parue dans le journal, elle échouera à faire enterrer Jim dans le cimetière catholique, mais c'est très vite toute la congrégation qui se mobilise : on trouve un emploi pour Annie à la blanchisserie du couvent où sa fille Sally grandit sous l'oil bienveillant de sour Illuminata, tandis que sour Jeanne lui enseigne sa vision optimiste de la foi. Et quand cette enfant de couvent croira avoir la vocation, c'est l'austère sour Lucy qui la mettra à l'épreuve en l'emmenant dans
sa tournée au chevet des malades.
"Si j'étais Dieu, avait coutume de dire sour Saint-Sauveur, je ferais les choses autrement." À défaut de l'être, les Petites Sours soignantes des Pauvres Malades, chacune avec son histoire et ses secrets, sont l'âme d'un quartier qui est le véritable protagoniste du roman d'Alice McDermott.
La neuvieme heure
C’est l’histoire des héroïnes du quotidien (ici religieuses pour une bonne partie mais cela pourrait être toute personne). Ces femmes de peu, donnant plus qu’elles ne possèdent. Ces femmes arquées par la difficulté des temps, soumises aux vents complexes de l’humanité, qui ne trouvent de salut que dans le salut de tous.
C’est l’histoire d’une somme de petites histoires qui s’emboitent, qui s’imbriquent et font de ce quartier new-yorkais, le refuge de tout, la vie de chacun.
C’est l’histoire des vies attendries par la résilience. On n’abandonne pas malgré les coups du sort. On n’abandonne pas malgré les mauvais tours que joue l’existence.
C’est une histoire de fraternité, de solidarité. Une histoire faite du bois dont se chauffe toute l’humanité. L’union des forces et des faiblesses. La jonction du bien et du mal. On lutte contre l’individualisme, on lutte contre les mauvais instincts. On cherche à tout prix à ne laisser personne sur le bord de la route.
C’est une histoire racontée par une langue formidable, pleine de tendresse et de poésie. Sensitive, dure et amusée, l’écriture de McDermott n’a de cesse de nous charmer par la beauté et la simplicité délicate de ses mots.
Un roman d’une telle beauté que la médiocrité et la misère s’y noient, s’y enlisent. Il n’y a de courage que le courage de vivre pour la vie.
Et puis, le roman se finit sur un murmure, naturellement.