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Triste
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Bouleversant
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Vibrant
Ce livre est l’un des plus beaux hommages funèbres que j’ai pu lire. Sans verser dans le pathos, Eric Fottorino nous offre une ode poignante à la mémoire d’un homme d’exception. Cet homme d’exception, l’homme qui l’aimait tout bas, c’est son père adoptif, Michel Fottorino.
A travers L’homme qui m’aimait tout bas, le directeur du Monde retrace l’histoire d’une relation entre deux hommes, qui, sans partager le même sang, ont su recréer un lien familial mais surtout affectif et profond. On découvre avec plaisir le portrait tout en douceur et en nuances de ce père
qui n’a d’adoptif que le qualificatif, et qui a soutenu l’auteur en véritable père.
L’autobiographie devient alors le moyen de déclarer haut et fort un amour tacite, fondé sur la confiance et le partage. Il est surtout émouvant de voir la détresse d’une famille devant l’apprentissage du deuil, doublé de l’incompréhension devant le suicide d’un homme. En effet, c’est sur le siège passager de sa voiture, sur un parking désert, que Michel Fottorino s’est donné la mort, sans autre explication que des lettres qui sont arrivées chez ses enfants quelques jours plus tard.
Comme tous les « survivants », Eric Fottorino se demande s’il aurait pu l’en empêcher, mais il le fait avec délicatesse et pudeur, sans souiller l’image de son père.
Il revient sur les souvenirs de son enfance, qui sont comme auréolés d’un éclat de tendresse et d’authenticité. On le suit sur le vélo de son enfance, et on parcourt avec lui les méandres de sa mémoire, au gré des explorations du quotidien de ce père qu’il connaissait si bien et si peu. Chaque objet devient symbolique et retrace un instant de la vie de cet homme hors du commun. Un homme aux mains magiques qui a mis toute sa vie au service des autres, effrayé par les papiers administratifs, au sourire éclatant et généreux, qui a finit son existence comme il l’avait vécue, maître de son destin mais dans le silence. «Mon père s'est tué d'une balle dans la bouche le 11 mars 2008. Il avait soixante-dix ans passés. J'ai calculé qu'il m'avait adopté trente-huit ans plus tôt, un jour enneigé de février 1970. Toutes ces années, nous nous sommes aimés jusque dans nos différences. Il m'a donné son nom, m'a transmis sa joie de vivre, ses histoires de soleil, beaucoup de sa force et aussi une longue nostalgie de sa Tunisie natale. En exerçant son métier de kinésithérapeute, il travaillait "à l'ancienne", ne s'exprimait qu'avec les mains, au besoin par le regard. Il était courageux, volontaire, mais secret : il préféra toujours le silence aux paroles, y compris à l'instant ultime où s'affirma sa liberté, sans explication. "Ce sont les mots qu'ils n'ont pas dits qui font les morts si lourds dans leur cercueil", écrivit un jour Montherlant. Mais il me laissa quand même mes mots à moi, son fils vivant, et ces quelques pages pour lui dire combien je reste encore avec lui.»
L’homme qui m’aimait tout bas est donc un remerciement bouleversant, d’un fils à son père, écrit sur un ton juste et naturel, juste vivant. C’est là qu’on se dit que le meilleur moyen de ne pas mourir, c’est de continuer à vivre dans le livre, qui est l’un des plus beaux hommages à la vie.
Une fin malheureuse
"Le 11 mars 2008 en fin de journée, dans un quartier nord de la Rochelle, mon père s'est tué d'un coup de carabine". Ca commence comme ça, le récit d'un père et d'un geste qui laissa une question. C'est le récit d'un homme soleil pour lequel on imaginait sans doute une autre fin? Le récit d'une paternité extraordinaire, d'un héritage profond et singulier, l'origine d'un nom qu'on porte parfois comme un talisman. Le lourd a gagné. On ne peut s'imaginer parfois que son père vivant alors il faut chercher les mots, les signes, les lieux pour continuer le dialogue, renouer avec sa présence, lui être fidèle, dire le père magnifique qu'il a été, le père providentiel. Une obsession filiale, un deuil qui se vit dans les gestes, dans les apprentissages. Récit d'un homme qui appris à ses enfants à se tenir debout, toujours libre et tenace contre un vent contraire. Bouleversant.