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19 septembre 2018, j'aperçois dans un documentaire sur la police de Vichy mon père sortant menotté entre deux gestapistes de l'immeuble marseillais où j'ai passé toute mon enfance. Ils semblent joyeux alors que le visage de mon père exprime la terreur. D'après le commentaire, ces images ont été tournées en 1943. Non seulement mon père n'a de sa vie parlé de cet incident mais je n'ai jamais entendu dire par personne qu'il avait eu affaire à l'occupant.
Moi, le conteur, le raconteur, l'inventeur de destinées, il me semble soudain avoir été conçu par un personnage de roman. R. J.
Récif du père
Comment parler d’un père-mystère, d’un papa là mais loin, comme absent ?
L’auteur ressuscite ici un père qui, toujours, dans l’enfance, lui a fait honte. Ses handicaps – surdité et bipolarité – l’ont isolé, enseveli sous des décombres formant entre eux des murs infranchissables.
La soixantaine aujourd’hui, Régis pense peu à lui. L’a oublié, remisé dans les jardins de son enfance. Jusqu’au jour où il l’aperçoit, à la télévision, dans un reportage sur la Police de Vichy, encadré et menotté par deux gestapistes.
Alfred Jauffret, résignant, peut-être plus résistant, aurait eu affaire à l’occupant, mais personne, étrangement, n’en a jamais parlé.
Souvenir enfui d’un passé remué ou bien tache dans l’histoire familiale, comme une honte que l’on bâche ?
Ces images convoquent, d’outre-tombe, ce père-question qu’il était peut-être enfin temps de comprendre, temps d’aimer.