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À découvrir
SYLIRE n'a pas encore complété son profil
Ce roman nous offre le portrait finement esquissé d'une vieille femme égoïste et sans coeur. Au fil du roman, nous remontons le temps pour tenter de comprendre comment une jeune fille si enthousiaste et romantique a pu devenir une personne aussi détestable.
Très vite après son mariage, Marie se montre irritée par le comportement calme et patient de son mari, lui reprochant de manquer de charisme. Bien vite elle se met à jalouser les femmes dotées de maris plus riches et plus ambitieux que le sien, simple instituteur. De frustration en frustration elle s'aigrit et son mal-être va crescendo.
Aurait-elle été plus heureuse si elle avait rencontré un homme lui correspondant davantage ? Difficile de le savoir. On peut toutefois imaginer que son mari ne lui a pas rendu service en se pliant à ses moindres désirs, imaginant apaiser son mal-être alors qu'il ne faisait que le renforcer. Pour ce mari, j'ai éprouvé de l'empathie, presque de la pitié, surtout à la fin du roman. Marie ne s'épanouit pas davantage dans la maternité,totalement égocentrique et aveuglée par ses ambitions démesurées.
Hervé Bel décortique la personnalité de Marie pour analyser toutes ses facettes. L'analyse psychologique très fouillée. C'est également une réflexion sur le couple, sur le façonnage d'une personnalité au contact d'une autre. Cet aspect-là est assez terrifiant car on voit peu à peu le fiasco du mariage s'étaler sous nos yeux et le pauvre mari s'efforcer en vain de satisfaire son épouse jusqu'au bout.
Un portrait de femme absolument saisissant...
En finir avec Eddy Bellegueule
On a beaucoup parlé de ce livre, écrit par un jeune homme de 21 ans que l'on peut qualifier de "miraculé". Issu d'un milieu défavorisé, il est parvenu à sortir de l'engrenage infernal de la reproduction sociale. Il poursuit aujourd'hui de brillantes études à l'Ecole Normale Supérieure. Edouard Louis, (c'est le nom qu'il s'est attribué, abandonnant celui de sa naissance "Eddy Bellegueule"), ne cache pas que son roman est autobiographique et que le récit qu'il nous offre est celui de son enfance et adolescence.
Eddy est un enfant différent des autres, sensible et efféminé, dans un monde où un garçon se doit d'être "un dur" sous peine de passer pour "une tapette". Il se rend compte très vite, dans le regard des autres, de sa singularité. Il doit faire face à leurs moqueries, subir des persécutions (certaines scènes sont insoutenables). Eddy tente de ressembler aux autres, de nier son penchant pour les garçons, sans succès. Le fossé avec les autres ne cesse de se creuser.
La famille d'Eddy est pauvre, financièrement et culturellement. Les seuls dérivatifs à leur vie de labeur sont la télévision et les soirées alcoolisées avec les voisins. Un logement plus que vétuste, des conditions de vie précaires, on peut parler de "sous-prolétariat". Edouard nous dresse un portrait de ses parents peu glorieux, mettant en avant leur inculture et leurs moyens intellectuels limités. C'est grâce à l'école qu'Eddy parvient à s'échapper de ce milieu, mais uniquement à l'adolescence.
Je dois dire que je sors mal à l'aise de cette écoute. Je comprends qu'Eddy ait voulu témoigner de sa souffrance. Son livre est percutant, il émeut, révolte et donne un coup de projecteur sur un milieu social dont on parle assez peu. Je ne conteste pas ses qualités littéraires. Au vu de son jeune âge, on ne peut qu'être admiratif de son travail d'écriture. Je pense par ailleurs que ce récit peut permettre à tout un chacun de mieux comprendre les difficultés rencontrées par ce type d'enfant. Je pense notamment aux enseignants.
Mais je ne peux pas m'empêcher de me mettre à la place des parents d'Eddy dont l'histoire et la vie intime sont dévoilés, décortiquées et analysées sans complaisance par leur propre fils. Eddy aurait peut-être dû attendre quelques années avant d'écrire cette autobiographie. Avec un peu de recul, il aurait peut-être dépassé le rejet de son milieu d'origine et présenté un récit plus apaisé, moins traumatisant pour sa famille, moins violent. Comment gèrera-t'il dans le temps, le séisme familial qu'il a créé et que les médias ont relayé plus que largement ?
Un autre point m'a dérangée. Les difficultés rencontrées par Eddy sont en grande partie liées à son orientation sexuelle. Or, l'homophobie n'est pas l'apanage des milieux défavorisés, ce que son récit pourrait laisser supposer. L'herbe n'est pas toujours plus verte ailleurs.
Quelques mots sur la version audio : Le lecteur a su trouver le juste ton et adapter sa voix aux deux registres de langues utilisées par l'auteur (celle de son milieu d'origine et celle qu'il utilise aujourd'hui). Une interview de l'auteur constitue un bonus très appréciable.
Un texte qui ne peut laisser indifférent, qui soulève beaucoup de questions et se lit sous plusieurs angles différents.