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2010, Rome. Ilaria, la quarantaine, trouve sur le seuil de sa porte un jeune Ethiopien qui dit être à la recherche de son grand-père, Attilio Profeti. Or c'est le père d'Ilaria. A quatre-vingt-quinze ans, le patriarche de la famille Profeti est un homme à qui la chance a toujours souri : deux mariages, quatre enfants, une réussite sociale éclatante. Troublée par sa rencontre avec ce migrant qui déclare être son neveu, Ilaria commence à creuser dans le passé de son père.
A travers l'enquête d'Ilaria qui découvre un à un les secrets sur la jeunesse de son père, Francesca Melandri met en lumière tout un pan occulté de l'histoire italienne : la conquête et la colonisation de l'Ethiopie par les chemises noires de Mussolini, de 1936 à 1941 - la violence, les massacres, le sort tragique des populations et, parfois, les liens qu'elles tissent avec certains colons italiens, comme le fut Attilio Profeti.
Dans ce roman historique où l'intime se mêle au collectif, Francesca Melandri apporte un éclairage nouveau sur l'Italie actuelle et celle des années Berlusconi, dans ses rapports complexes avec la période fasciste. Naviguant habilement d'une époque à l'autre, l'auteur nous fait partager l'épopée d'une famille sur trois générations et révèle de façon bouleversante les traces laissées par la colonisation dans nos sociétés contemporaines.
Un roman historique aux allures de documentaire sur l'Italie fasciste et colonialiste
Le presque centenaire et désormais sénile Attilio Profeti a officiellement eu trois fils et une fille, Ilaria. Aussi, quelle surprise pour celle-ci lorsqu'un réfugié venu d'Ethiopie se présente chez elle en se déclarant petit-fils d'Attilio. Ilaria, amenée à se pencher sur le passé de son père, découvre un homme qu'elle ne connaissait finalement que bien peu. Au travers de la vie du vieil homme, c'est toute l'histoire de l'Italie fasciste et colonialiste qui resurgit, tout un passé occulté qui a pourtant laissé bien des traces, parfois inattendues, jusqu’à aujourd’hui.
S’il pèse souvent lourd dans l’estomac en raison de la relation des manipulations d’embrigadement fasciste, des obsessions racistes et phrénologiques, des comportements et des crimes de guerre de la « race pure » à l’encontre de ses « inférieures », mais aussi parce qu’on finit, d’une part, par étouffer dans l’évocation de l’omniprésente corruption, passée et contemporaine, qui infeste la société italienne, d’autre part, par ressentir un véritable malaise face au traitement infligé de nos jours aux migrants qui affluent à Lampedusa, ce long et dense roman prend les allures d’un documentaire lucide et sans concession, fondé sur une analyse sérieuse et solide qui interroge tant le passé que le présent.
Ce remarquable roman historique mérite largement l’effort de sa lecture, éprouvante et consternante, mais édifiante et nécessaire. Il vous fera découvrir un pan d’histoire méconnu des Italiens-mêmes, rétablissant courageusement une vérité occultée dans la mémoire collective.