J'ai découvert Jonathan Munoz avec « Un léger Bruit dans le moteur », une bande-dessinée dérangeante qui m'a glacée jusqu'au sang. C'est donc avec un peu d'appréhension que j'ai entamé celle-ci. Le dessin de Munoz étant magnifique, je ne pouvais pas passer à coté, alors je me suis précipitée dessus et... j'ai aimé. Il est beaucoup moins... morbide que « Un léger Bruit dans le moteur » !
C'est l'histoire d'un homme (Jean) à la chevelure et à la barbe hirsutes et d'un roux flamboyant, insomniaque et amnésique qui erre pendant des mois afin de réussir à trouver la tranquillité
de l'âme à laquelle il aspire tant. Il ne sait pas qui il est, il ne sait pas où il va, il se connaît pas les origines de ses insomnies, il veut juste trouve le repos. Il arrive dans un lieu en retrait du monde et de la réalité, qui semble calme et idéal, mais les habitants vont se révéler peu accueillants. Voulant partir et continuer sa route ailleurs, il est arrêté par le chute du pont, la seule issue pour sortir de « Bouddumonde ». Bloqué dans cet endroit étrange pour une durée indéterminé, il va devoir cohabiter avec les habitants du lieu. Il va y faire la rencontre de Dorine, une jeune fille dont la seule présence endort (au sens strictement littéral du terme) tout le monde autour d'elle. Souffrant ainsi d'une immense solitude, c'est avec bonheur qu'elle va constater que cet homme - insomniaque ! - ne sombre pas dans un profond sommeil dès qu'il se trouve à ses cotés. Ces deux êtres perdus, solitaires et malheureux vont se trouver, s'apprivoiser, se réconforter, et vivre une relation hors du temps et hors du commun dans un univers sombre et étrange. Jusqu'à ce qu'un concours de circonstances amènent Jean à comprendre qui il est, et ce qui lui est arrivé par le passé...
Sombre, mystérieuse, surprenante, décalée, tendre et drôle, cette bande-dessinée est une petite pépite, qui joue subtilement avec toute une palette de sujets et d'émotions ! Quant au graphisme, onirique et envoûtant, il nous plonge dans des ambiances aux couleurs marquées (avec une dominante ocre et bleue), nous transporte sur cette île coupée du monde et à l'atmosphère pesante.
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Belle au bois dormant à rebours.
Ça commence mal, un homme ayant perdu le sommeil, et la mémoire, arrive dans un petit village où il pense pouvoir trouver le repos, mais l'accueil des habitants - violents sans nécessité et farfelus sans le vouloir, complètement attardés pour la plupart - n'est pas à la hauteur, puisqu'il termine rapidement en cage. Ça se poursuit comme dans un conte de fée... Notre homme fait la rencontre d'une jeune femme-enfant qui telle une belle au bois dormant à rebours a la particularité d'endormir tout être vivant se trouvant à sa portée, à l'exception donc de notre insomniaque, ce dernier tombant à point pour briser enfin sa solitude, il va donc se retrouver assaillit par un déferlement de paroles de la part de Dorine. Malgré les réminiscences de souvenirs qui continuent à le hanter, ils vont essayer de se construire une nouvelle vie... L'auteur nous offre un beau mélange de couleurs monochromes, des dégradés du blanc vers le gris, et quelques explosions de couleurs. Un beau dessin, maîtrisé, tantôt réaliste, tantôt grotesque. Il installe une atmosphère sombre où explose parfois de pure moments de bonheur et des couleurs vives. La narration est tortueuse et les personnages torturés, cela se lit comme un conte entre le rire et le macabre. Poétique, décalé, violent, onirique, après le coup de poing à l'estomac qu'était Un léger bruit dans le moteur, histoire d'un enfant serial killer, adaptation d'un roman de Luciani... Jonathan Munoz compose un univers à part, fort, puissant et dérangeant, et on attend avec impatience sa prochaine publication.