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Le réel est ce qui est sans double : il n'offre ni image ni relais, ni réplique ni répit. En quoi il constitue une " idiotie " : idiotès, idiot, signifie d'abord simple, particulier, unique, non dédoublable. Traiter de l'idiotie est évoquer le réel. Un réel lointain, car à jamais relégable dans le miroir. Un réel voisin, car toujours en vue. C'est une tentation inhérente à l'intelligence que de remplacer le réel par son double.
Dans L'Ile de la raison, de Marivaux, tout le monde finit par quitter ses illusions et rendre justice au réel ; tous sauf un, le philosophe. Probablement parce qu'un tel aveu suppose une vertu qu'aucun génie philosophique ne peut, à lui seul, produire et remplacer : l'art de faire coïncider le désir et le réel, qui est la définition de l'allégresse. Chez Clément Rosset, on fait d'intéressantes rencontres : le consul de Malcolm Lowry, qui s'est, comme à l'accoutumée, saoulé avec du whisky, Molloy, le " héros " de Samuel Beckett, et Monsieur Hulot, créature de Jacques Tati...
Ce philosophe répugne à suivre les chemins trop. fréquentés. C'est un esprit déconcertant, et, pour cette raison, attachant, qui avance à contre-courant des modes intellectuelles.