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Traduction du russe de Boris de Schloezer. Un des textes les plus caractéristiques du grand écrivain russe, un récit très connu et toujours très lu dans le monde entier, avec La Sonate à Kreutzer, qu'il écrivit la même année (en 1889). La lecture de Tolstoï nous confronte directement, comme toujours, aux questions essentielles qui inquiètent l'âme humaine : ici, la prise de conscience de soi devant la mort imminente...
Le héros est un fonctionnaire, magistrat, satisfait de lui et de sa vie ordinaire. Jusqu'au jour où la maladie, à travers des souffrances qui le conduisent inéluctablement à la mort, lui ouvre les yeux et le met face à face avec lui-même, avec son égoïsme et sa petitesse. C'est lorsqu'il atteint le fond du désespoir que le héros, de petit, devient grand, transfiguré et réconcilié avec lui-même par le sentiment d'un pardon mystique.
Signe que la mort est toute proche. Or en vérité la mort n'existe pas car la peur a disparu... Serait-ce cela la rédemption ? ... A une époque où personne n'est plus à l'abri d'une maladie subite sans espoir de guérison, ce texte est d'une pertinence poignante, et redonne à tout lecteur la conscience de lui-même, s'il l'avait perdue... L'histoire est "des plus simples, des plus ordinaires et des plus atroces" .
On y assiste aux derniers jours d'un homme, sous le regard de ses proches et, plus terrible encore, de sa conscience. Rien de purement abstrait, pourtant : petites frivolités, quotidien ordinaire, sentiments circonstanciés sont les pierres de l'édifice qui menace ruine. La concision du texte en assure l'intensité ; selon un rythme étudié, l'angoisse grandit, devient épouvante, pèse de tout son poids sur les derniers jours d'Ivan Ilitch et le précipite, avec le lecteur, à la rencontre d'une mort forcément trop proche.
L'agonie la plus célèbre de la littérature, et qui n'en a pas fini de susciter des interprétations tranchées et contradictoires. Dans un style épuré, Tolstoï ne se contente pas de poser les questions fondamentales : il nous les fait vivre et connaître l'insoluble angoisse face à l'absurdité de la vie et à une improbable rédemption.
Yvan Ilitch ou grandeur, vanité et décadence!
Relire des classiques...
Je ne peux que remercier mon amie de lecture, Palamède, pour m'y avoir incitée, car j'y ai pris beaucoup de plaisir. Je pense même que notre éducation littéraire nous les impose trop tôt et nous empêche de les apprécier pleinement, en méconnaissance des expériences personnelles que la vie nous apporte.
En quelques pages d'une concision radicale et brillante, Tolstoi nous déroule en accéléré la chute inéluctable par maladie d'un homme de la bourgeoise russe, face à l'incurie de la Faculté.
Et par son introspection au seuil de la mort, entre rage, espoir de guérison, fatalisme effrayé, regrets et souvenirs, de multiples réflexions tournent en boucle: vanité de la réussite professionnelle, hypocrisie de la société et de la famille, fragilité et solitude extrême face à la maladie et à la souffrance.
Dans sa haine des vivants et sa frayeur de grand départ, Yvan Ilitch nous renvoie à nos propres questionnements, au dérisoire d'une vie égoïste, régentée par les codes que nous nous donnons pour mieux paraitre aux yeux d'autrui.
Petit roman d'une grande modernité, dont la redécouverte est un plaisir.