La narratrice de ce roman, (jamais nommée au cours du livre) traductrice trentenaire un peu dépassée par la vie, réagit à peine lorsque le même jour, son amant lui signifie la fin de leur relation et son mari la quitte… Mais trois semaines après qu'il soit parti « avec le matelas ergonomique du lit conjugal, le matériel de camping et dix cartons de livres » elle n'est plus tout à fait la même, et ces trois semaines constituent la trame de ce roman léger et pétillant. Trois semaines où elle s'est vue confier la garde de Tumi, un petit garçon sourd de quatre ans, où elle a gagné
deux fois à la loterie, où elle a eu affaire à différents animaux morts, où elle a entrepris un périple autour de l'Islande sous la pluie de novembre, où elle a fait de nombreuses rencontres…
Il faut parfois laisser une deuxième chance à un livre. Voici ma conclusion après la lecture de L'Embellie. Je l'avais en effet emprunté à la bibliothèque et commencé en novembre, mais la narratrice un peu agaçante et l'histoire trop loufoque avaient eu raison de moi, et je l'avais rendu sans le finir. Pourtant, quand le père Noël me l'a apporté, (merci, merci !) je l'ai recommencé avec plaisir, et, allez comprendre, en relisant les mêmes pages avec un tout autre sentiment sur les personnages. Cette fois, je me suis laissée emporter sans m'attacher à repérer les comportements irrationnels de la narratrice, et j'ai aimé la fantaisie de l'histoire, jusqu'à en percevoir finalement la profondeur. En effet, beaucoup de choses restent non-dites, notamment ce qui s'est passé au moment des quinze ans de la jeune femme, mais l'on devine petit à petit et cela explique très largement sa personnalité. Les relations originales entre les différentes personnes, le voyage sur les routes islandaises balayées par la pluie, le petit garçon tranquille et plein de sagacité, la réflexion empreinte de légèreté sur la maternité, tout concourt à en faire un moment de lecture agréable. Il s'en dégage une philosophie de la vie originale et pleine d'humour.
Bien sûr, ce livre n'a pas l'attrait de la nouveauté qu'avait Rosa candida que j'avais repéré pratiquement dès sa sortie en 2010, mais il est très savoureux tout de même. Sachant qu'il s'agit d'un roman qui précède Rosa candida, contrairement à l'ordre de traduction en français, rien d'étonnant à ce qu'il soit un petit peu moins bien « ficelé ». Ce sont aussi ses imperfections, quelques petites longueurs, quelques traits de caractère un peu flous, qui font son charme. Sans oublier les recettes qui sont regroupées à la fin, et où l'on retrouve l'humour bien particulier qui éclaire très joliment la grisaille de novembre de ce périple islandais.
Rigning í nóvember
Le roman nous entraîne sur les routes islandaises en compagnie d'une jeune femme fantasque et d'un petit garçon. La première qui traverse les péripéties loufoques de son quotidien avec un détachement et une liberté rafraichissante, vient de se faire plaquer de manière plutôt rude. Le second se trimballe un attirail sur lequel tout le monde se retourne, entre les appareils contre sa surdité et ses lunettes en cul de bouteille, ce petit lutin est "abandonné" de manière cocasse par une mère célibataire complétement dépassée et sur le point d'accoucher. La complicité qui va naître entre les deux improbables compères est relatée dans une écriture pleine de drôlerie et d'émotion, le périple à travers l'Islande se fait de manière un peu chaotique et les nombreuses rencontres sont autant de refuges et nous font découvrir la vie quotidienne des habitants des landes islandaises. Cette découverte de la maternité est aussi un voyage intérieur au coeur des blessures qui nous accompagnent toujours quelle que soit notre destination, on se souvient que ce même thème, côté paternité, est aussi aborder dans son roman suivant, le magnifique Rosa Candida. On trouve en fin d'ouvrage une annexe amusante, pleine de malice : « Quarante-sept recettes de cuisine et une de tricot ».