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Cette histoire pourrait être intitulée Les Malheurs de Marco Bueli. Qu'on se rende compte : trois licenciements à 36 ans quand on est issu d'une grande école d'ingénieur ! Il faut dire qu'il a tout pour agacer, faire des envieux, car cet homme est beau, très beau. Mais il est fatigué de faire des sourires, de séduire malgré lui et de finir par se faire avoir. Marco a décidé de se défendre et d'aller en justice pour discrimination liée à l'apparence physique.
Après tout, les Américains ont montré la voie et la législation française le permet. Croyez-le, sa beauté ne l'a pas aidé dans sa carrière, il a souffert.
À travers le personnage du sublime Marco Bueli et de sa détermination à obtenir réparation, ce roman dépeint ironiquement les excès d'une politique de lutte contre les discriminations qui permet, aujourd'hui, à tout un chacun de se considérer comme victime, légitime à se plaindre.
Dans la continuité de ses précédents romans, Emmanuelle Heidsieck pointe ici avec acuité le démantèlement du modèle social français face à la montée de l'individualisme. La concurrence des plaintes entre les discriminés de tous ordres n'annonce-t-elle pas la dislocation de la société ?
Emmanuelle Heidsieck est une romancière qui mêle la fiction littéraire aux questions politiques et sociales et décrit, souvent de façon grinçante, des héros se débattant dans un monde qui tourne de moins en moins rond.
Trop beau est son cinquième roman après À l'aide ou le rapport W (Inculte 2013, réédition en janvier 2020), Il risque de pleuvoir (Le Seuil, Fiction & Cie, 2008), Notre aimable clientèle (Denoël, 2005) et Vacances d'été (Léo Scheer - LaureLi, 2011).
Trop beau
"La beauté est source de discrimination.
Que cette affirmation est dissonante?
Et pourtant, l'auteure nous l'affirme, à travers le récit de Marco. Ce dernier a été professionnellement discriminé en raison de sa grande beauté. Il nous le prouve dans un grand plaidoyer, étayé par des histoires issus de sa famille et de grandes figures artistiques. Car, oui, la beauté est une malédiction et cela, Marco veut le prouver devant les prud'hommes. Pour arriver à ses fins, son avocat l'inscrit à un groupe de parole de personne, comme lui, victime de leur beauté.
La force du propos reposé aussi sur le choix judicieux de l'auteure de raconter l'histoire d'un homme discriminé, et de ne pas être tombé dans l'écueil d'une approche féministe de la séduction.
Ce récit, alternant l'humour et l'amertume nous entraîne dans des réactions allant de la compassion à l'incompréhension d'une situation que l'on n'a pas subi.
C'est en ce paradoxe que réside toute la puissance de ce livre.