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Chef-d'ouvre du roman gothique anglais, Le Moine (1796) met en scène la déchéance d'un capucin suprêmement vertueux, pris dans les rets d'une tentatrice diabolique. Péchés de la chair, magie noire, visions infernales, transgression, damnation : rédigé par un jeune homme de vingt ans à peine, ce récit sulfureux, où le fantastique se mêle à l'horreur et où le désir règne en maître, créa le scandale avant d'être érigé en objet de culte par des générations d'écrivains.
On ne compte plus les romantiques qui, comme Hoffmann, Coleridge et Victor Hugo, s'en inspirèrent ; Charles Dickens alla jusqu'à acheter le manuscrit aux enchères ; André Breton en fit un modèle pour le surréalisme ; et Antonin Artaud, qui en proposa une réécriture libre, salua l'envoûtante « sorcellerie verbale » de Lewis : « Je continuerai à tenir pour une ouvre essentielle Le Moine, qui bouscule cette réalité à pleins bras, qui traîne devant moi des sorciers, des apparitions et des larves, avec le naturel le plus parfait, et qui fait enfin du surnaturel une réalité comme les autres.
»
5/5
L’intrigue se déroule en Espagne (l’auteur semble l’oublier quelques fois quand il parle de Strada di San Iago ou Strada di la vida..curieux mélanges hispano-italien, ou alors je ne suis pas au courant de certains faits historiques et culturels), dans une société où la religion et la superstition cohabitent allègrement.
Un moine dont la réputation de saint a fait le tour de Madrid se voit peu à peu sombrer dans le péché et la luxure. Un jeune homme nommé Lorenzo de Medina tombe amoureux d’Antonia, venue à Madrid avec sa mère demander de l’aide à leur beau-frère et oncle, Don Raymond de las Cisternas, ami de Lorenzo. Don Raymond est amoureux d’Agnès, jeune soeur de Lorenzo, mais Agnès a pris le voile, et une évasion est mise en place. Hélàs, la jeune pécheresse est démasquée, l’évasion avortée. Entre-temps, le moine Ambrosio, orphelin voué à la vie monastique dès l’enfance, est séduit par une étrange femme qui le conduira à sa perte. Désormais dépravé, Ambrosio va jeter son dévolu sur la jeune Antonia. Encouragé et conseillé par Matilda, il va commettre les pires crimes pour arriver à ses fins.
Sorcellerie, châteaux hantés, amours contrariées et tragédies ponctuent cette horrible et délicieuse histoire, dense et passionnée. L’ambiance est noire, la descente aux enfers du moine est fascinante. Malgré les quelques longueurs du début le rythme est vite pris et on frémit aux destins funestes des personnages. Démasqué et sur le point de payer pour ses crimes, le moine vendra son âme au diable pour échapper au bûcher. Mais la fuite ne serait-elle pas pire que la reddition ?
Cette histoire gothique écrite à la fin du XVIII ème siècle par un jeune anglais de 20 ans donne un roman à la fois flamboyant et noir.