Heureusement, la merveilleuse maîtrise de la langue que possède Pierre Houdion ainsi qu'un vocabulaire d'une extrême richesse (permettant de rendre compte admirablement bien de cette fin du 18e siècle où se déroule l'action de «L'art de nuire») viennent consoler le lecteur du triste contenu de ce roman.
Effectivement, «l'art de nuire» dont il est question ici est exactement le même que celui que nous côtoyons quotidiennement à notre époque.
C'est à la jalousie, l'appât du gain, la superficialité des sentiments, la vulnérabilité de l'amitié face au pouvoir, les non-dits
et l'indifférence que doit faire face Mademoiselle de Carvoisin lorsqu'elle fait le choix de devenir vicomtesse de Bombelles.
De nos jours, les moyens employés pour nuire sont autres qu'à l'époque du «bien aimé» Louis XV, mais cet art conserve toute sa puissance et son étendue dans les rangs des familles et des sphères dirigeantes contemporaines.
Merci donc infiniment à Pierre Houdion d'avoir, avec son récit authentiquement documenté, pointé du doigt la cruauté humaine et de l'avoir ainsi dénoncée avec virulence, dans le repect toutefois des traditions de ce 18e siècle qui le passionne, soit avec élégance et dans le profond respect de l'étiquette.
La réalité décrite n'en est pas moins affligeante.
Le titre est éloquent, il faut y ajouter l'humour
Un roman sur la mise à mort sociale. L'histoire se passe à la fin du 18e siècle, et est racontée dans un style qui nous plonge d'emblée dans cette atmosphère. Et en même temps, le roman touche à des cordes toujours sensibles aujourd'hui. L'art de nuire ferait-il partie de la nature des sociétés humaines ? L'humour de Pierre Houdion, son écriture d'une élégance parfaite, qui nous fait voir les choses comme au cinéma, fait de ce livre un vrai bijou.