Consacrer une réflexion aux coopérations dans l'Union européenne peut paraître provocateur, voire iconoclaste. L'originalité de " l'ensemble communautaire " ne réside-t-elle pas fondamentalement dans la mise en œuvre, par la procédure institutionnelle, de compétences en partie substitutives à celles des Etats membres ? Cette réalité juridique, pourtant, ne doit pas en cacher une autre : l'existence de relations fonctionnelles, caractérisées par une collaboration entre des pouvoirs autonomes.
Ce phénomène n'est pas nouveau. Dès l'origine des Communautés, la technique de la coopération a été sollicitée en vue de la réalisation des objectifs des Traités. Elle a connu par la suite un développement remarquable tantôt programmé par le droit originaire et dérivé tantôt sécrété spontanément par la pratique. Le traité sur l'Union européenne, signé à Maastricht, a procédé à une revalorisation sans précédent de la coopération en la reconnaissant comme un mode d'unification à part entière, fondateur de l'Union, et qui vise à conforter le noyau dur communautaire. A partir de là, sont nés tout à la fois des espoirs et des craintes parmi les observateurs de la construction européenne. Pour les uns, les mécanismes de coopération constitueraient une " nouvelle approche " permettant de dépasser les limites de la " méthode Monnet ". Pour les autres, l'unification ne saurait emprunter que la voie de l'intégration, sous peine d'attenter à la perspective d'une Europe fédérale, seul cadre viable et porteur.
Face à un débat aussi passionné, il est apparu opportun à un groupe de juristes d'étudier les principales modalités de la coopération en vigueur dans l'Union européenne. Cette initiative a d'ailleurs été suscitée par la réforme institutionnelle en cours, à laquelle le traité de Nice n'a que partiellement contribué mais qui a été remise sur le métier dans le cadre de la Convention convoquée par le Conseil européen de Laeken.
Le travail collectif consigné dans cet ouvrage a été présenté lors de la journée nationale CEDECE, organisée à Toulon, en avril 2000, par le Pôle européen Jean Monnet en collaboration avec le Centre d'études et de recherche sur les contentieux.
Les propos introductifs soulignent d'emblée le caractère pluriel de la coopération dans l'Union européenne. Les " coopérations intégratives ", c'est-à-dire couplées à l'intégration et susceptibles de la favoriser, ne sauraient être ni opposées à la méthode institutionnelle ni assimilées aux diverses formes de coopération internationales. Etroitement imbriquées les unes aux autres, les coopérations s'articulent autour des procédures institutionnelles en un jeu d'influences réciproques plus ou moins marquées. C'est en se basant sur le degré d'intimité entre les deux types de relations fonctionnelles qu'a été élaboré le plan de ce livre.
Dans une première partie, sont étudiées les coopérations fondées sur le partenariat institutionnel. Les coopérations interétatiques et externes font l'objet de la deuxième partie. L'ouvrage s'achève par une conclusion nuancée du professeur Kovar qui établit une typologie des coopérations avant de préconiser une attitude à la fois réaliste et vigilante devant la montée en puissance de certaines d'entre elles.