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À découvrir
Dix petits nègres "débaptisés".
Agatha,
Au fond, cette décision ne t’aurait pas choqué. Toi, qui, aussi bien dans ta vie personnelle que d’écrivain, n’as cessé de tricher. D’abord avec les codes du roman d’enquête : "le meurtre de Roger Ackroyd", le coupable ne doit jamais être le narrateur ; « le crime de l’Orient express " : on ne doit jamais, dans un whodunit, mettre en scène plusieurs coupables (ici, en l’occurrence, ils le sont tous) ; de même que les domestiques ne sont jamais des assassins, alors que souvent tu as usé et abusé du procédé.
Bref, chère
Agatha, il semblerait... que ton arrière-petit-fils aurait autorisé, sans pression... , la modification du titre de ton roman, "Dix petits nègres ". Eh oui, on récolte toujours ce que l’on sème, même au fin fond de l’éternité.
L’hypocrisie et la malice, que tu as toujours fort bien mises en scène, notamment un jour lorsque mystérieusement et lâchement tu disparus, te rendent visite par-delà les morts.
Mais tu étais une femme libre, Agatha.
À ces traits, ajoutés à la trahison du whodunit par la violation de ses codes les plus élémentaires, que reste-t-il de toi ? : ton livre, peut-être le plus populaire, travesti par des ayatollahs de la pensée – « couvrez ce sein que je ne saurais voir » -, au profil de ceux, lobotomisés, qui, déjà depuis longtemps, ne savent plus penser et réfléchir !
Au fond, je dois les remercier, Agatha. Je réfléchissais au un titre de mon roman à paraître dans quelque temps. Le voici : « Dix petits nègres » Celui-ci n’est-il pas libre, désormais ? Et de mon vivant, nul ne le débaptisera.
C’est une chronique quelque peu funèbre, Agatha. Certes. Mais avec la dépouille des soldats de l’an II, ceux de la résistance, de Colbert, de Jean Jaurès, de Picasso ou de Stefan Zweig et de tant d’autres - hommes et femmes politiques, résistants, poètes ou écrivains, mais tous épris de liberté -, je te souhaite de reposer en paix, Agatha.
Michel BLAISE.
NB : Tous ceux qui agissent ainsi, qui agitent le spectre du racisme - que je n'ignore pas - sans en connaitre le sens exact sont les artisans d'un mouvement hygiéniste et indigéniste, mais qui sont racialistes eux-mêmes qui, malheureusement, excitent les masses incultes Parce que, dans ces conditions, c'est toute la littérature mondiale, pour ne citer que cet art et, plus particulièrement, la littérature française, qu'il faut réécrire : que penser de Flaubert qui, dans madame Bovary, emploi à l'envi le mot "nègre" et qui fait dire au personnage de" Lleureux" " Nous ne sommes pas des juifs".??.. Ces gens sont incapables de replacer les choses dans leur contexte parce qu'ils ne connaissent rien.
La région de Tchernobyl, trente ans après l'effroyable catastrophe du 26 avril 1986, est devenue une attraction pittoresque. À Pripiat - ville à jamais désertée, toute proche du fatal réacteur numéro 4 de la centrale nucléaire - sous le regard épouvanté de tout un bus bondé de touristes baltes et occidentaux, l'inspecteur Joseph Melnyk et sa partenaire, Galina Novak, fraiche émoulue de l'école de police, décrochent le corps d'un homme suspendu à la façade d'immeuble. Dans le bâtiment, Melnyk découvre de nombreux oiseaux récemment empaillés. La victime, Léonid Sokolov, est
le fils d'un ancien ministre ukrainien des années 1980. Ce dernier, richissime et exilé en Russie, a une confiance limitée dans la police de Kiev. Aussi, il s'approprie, à grand renfort de dollars, les services l'inspecteur de police moscovite, Alexandre Rybalko, afin qu'il trouve l'assassin de son fils. C'est donc parallèlement que les deux policiers vont enquêter sur cette terre dévastée et d'exclusion de Tchernobyl sur laquelle tout est interdit et « permis », en même temps : pillages, trafics ou violences en tout genre.
Ce polar est absolument génial. D'abord, deux hommes très différents, aussi bien par leur histoire que par leurs motivations, mais également fascinants, attachants et intenses. Mais surtout parce que cette « chasse » en terrain défendu est fascinante et saisissante de réalisme, je vous jure que c'est la pure réalité : la zone d'exclusion et ses habitants clandestins, l'affolement perpétuel des compteurs Geiger, le pillage des habitations abandonnées, le trafic du matériel irradié, des poupées d'enfant désarticulées que l'on trouve encore sur le bitume, des chiens errants, dont on se demande ce qui leur reste de domestique et si l'on ajoute à tout ça un tueur cinglé et empailleur, l'on obtient « de bonnes raisons de mourir » de Morgan Audic (Albin Michel,2019).
Bonne lecture.
Michel.
A lire avec beaucoup de réserves
Elias Naccache, le très célèbre homme d'affaires franco-libanais dans le domaine des nouvelles technologies de l'information, a bâti sa fortune en rétrocédant opportunément sa première start-up juste avant l'explosion de la bulle spéculative d'Internet du mois de mars 2000. Quelques années plus tard, il renonce à tout, puis part pour la Syrie combattre Daech aux côtés des Chrétiens d'Orient lorsque, à la fin de l'année 2017, la presse révèle sa soudaine et mystérieuse disparition à Raqqa.
Le retentissement médiatique de l'affaire conduit un célèbre magazine, qualifié pour investiguer sur les « splendeurs et gloires déchues » du monde du spectacle, de la politique, de la mode, ou de l'actualité (Vanity Fair), à solliciter d'un écrivain la rédaction de la biographie de Naccache. L'auteur était connu pour ses chroniques sur France Inter. En outre, les deux hommes étaient amis d'enfance, écoliers en province, puis adultes à Paris, jusqu'à leur brouille, peu de temps avant le départ d'Elias qui manifestait des opinions politiques extrémistes de droite et identitaires.
Pour ce faire, le journaliste convoque ses souvenirs de lycéen en Pays de Loire, puis d'adulte à Paris ; il entend les témoins - amis épouse et maitresses, qui ont rythmé et influencé la vie de son ami.
Au début de l'année 2018, il entreprend l'écriture d'un ouvrage :
« Ce livre est le fruit d'un éclairage nouveau, tout en explorant certains aspects de la vie d'Elias qui m'avaient largement échappé. Ce récit peut être vu comme la version augmentée d'un programme défaillant. Je m'y suis autorisé un ton plus personnel ». (P.8).
Ce livre s'intitule « La déconnexion ». L'on comprend immédiatement la singularité du « roman » d'Éric L'Helgoualc'h qui prend la forme d'un récit dans le récit, d'une histoire dans l'histoire. L'auteur du livre, (le chroniqueur de Vanity Fair dans le « roman » d'Éric L'Helgoualc'h), n'est autre que le narrateur choisi par L'Helgoualc'h lui-même dans son propre roman.
Éric L'Helgoualc'h donne ainsi le ton et utilise intelligemment les modèles de la narration en provoquant volontairement une confusion entre l'auteur et le narrateur, entre la réalité et la fiction. Mais n'allons pas trop vite, nous reviendrons sur ce point essentiel du récit…
La « Déconnexion » est le premier « roman » publié par Éric L'Helgoualc'h aux Édition du faubourg. Sa critique n'est pas aisée, pour autant que l'on veuille être objectif. Et pour faire litière de chicanes ou controverses, celle-là aurait pu se limiter à : « Un récit intelligent soutenu par une expression linguistiquement remarquable, mais effroyablement manichéen et intellectuellement malhonnête en considérant que l'auteur, bien au fait de son sujet, fait preuve d'une parfaite mauvaise foi. ».
Un chouia sommaire…
En premier lieu, « La Déconnexion » est un roman très plaisant à lire et très bien écrit. Quand bien même l'intrigue peut, au premier abord, paraitre convenue - impression vite dissipée au deuxième - on ne s'ennuie pas un instant. le récit n'est pas, cependant, un polar ou un thriller comme certains commentaires ont pu le laisser entendre. le narrateur ne part pas «physiquement » à la recherche d'Elias Naccache et la question de son retour ou de sa disparition définitive ne semble pas essentielle à l'auteur. Les inconditionnels du suspense se délecteront cependant du dernier chapitre.
L'intrigue, infiniment plus subtile, concerne la perspective psychologique de la métamorphose d'Élias Naccache l'ayant poussé à se « déconnecter », à renoncer à la prospérité, à se radicaliser à l'extrême droite et à fuir combattre Daech en Syrie. La psychologie est omniprésente dans le roman autant dans l'analyse de la situation que dans celle des personnages du narrateur que d'Élias Naccache.
Au demeurant, lorsque le narrateur décide d'écrire son livre afin de s'y «autoriser un ton plus personnel », Éric L'Helgoualc'h, pour reprendre les mots de son éditeur, confronte alors « deux quadras en déconfiture d'égo ». C'est encore la preuve des confusions entretenues par l'auteur : les deux ouvrages n'en sont qu'un ; le narrateur et l'auteur seraient la même personne. En outre, cette « confrontation » constitue l'un des conflits, au sens littéraire, le plus intéressant et éclairant de l'intrigue tout au long du récit.
Néanmoins, l'organisation de celui-ci présente quelques défauts et anomalies : des incohérences, chronologiques notamment, et surtout une disposition des évènements très désordonnée. Les retours en arrière (flash-back) ou les projections dans le futur ne sont pas en cause à la condition de rester rigoureux, ce qui n'est pas toujours le cas. La combinaison de ces deux défauts égare parfois le lecteur et ruine quelque peu la qualité du roman. Une lecture attentive de la P. 76, par exemple, témoigne d'une incohérence dans l'agencement du synopsis.
En second lieu, et sur la substance du récit, l'approche de l'auteur est déplorable, empreinte, pour le moins, de raccourcis et de démagogie.
Nous avons vu que la maitrise brillante de la technique narrative par Éric L'Helgoualc'h induit une confusion entre l'auteur et le narrateur et, par voie de conséquence, entre la part de réalité et de fiction du récit. La part de roman s'émousse au bénéfice d'un essai, d'une biographie, ou encore d'une « autofiction ». Dans tous les cas, et plus que dans le roman qui relève essentiellement de l'invention et de l'imagination, l'auteur développe dans ces genres littéraires des thèses lus comme le reflet de sa pensée et de ses croyances.
Soit. S'il est séduisant et enrichissant de lire des avis divergents, il ne faut pas tout de même « charrier avec le beurre » par des propos excessifs, de mauvaise foi, voire mensongers.
La conversion d'Éric Naccache à des thèses identitaires d'extrême droite, haïssable et méprisable évidemment, ne justifie pas les harangues explicites, d'inspiration islamo gauchistes, adressées indistinctement à l'ensemble d'une communauté, en l'occurrence les Chrétiens d'Orient de Syrie, qui seraient tous de dangereux terroristes (1), des confusions systématiques entre racisme et détestation de l'Islam (P. 34), des allusions ad hominem douteuses (contre le philosophe Alain Finkielkraut, juif ancien déporté, pour « sa voix chevrotante » ou encore le journaliste Patrick Cohen parce que très circonspect à l'égard des chroniques du narrateur sur France Inter…), des attaques systématiquement contre Israël et leurs services secrets désignés comme des terroristes, et, en même temps, un quasi-mutisme à l'égard du fléau islamiste et, plus généralement, des raccourcis, sur la guerre en Syrie et les responsabilités de part et d'autres qui ne se traitent péremptoirement pas en quelques pages. La situation est bien plus complexe. Aussi l'auteur en dit trop, et dans ce cas, il le dit mal, ou pas assez.
Aussi, la démarche d'Éric L'Helgoualc'h n'est pas, à cet égard, défendable, sachant qu'il ne peut plus se retrancher, et pour cause, derrière l'écriture pure et simple d'un roman et d'une fiction.
Sous cette réserve importante, « La déconnexion » est un livre, captivant, mais qu'il convient de lire avec un esprit très critique et vigilant.
Bonne lecture.
Michel.
https://fureur-de-lire.blogspot.com