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Michel, F-D-L https://fureur-de-lire.blogspot.com n'a pas fini de compléter son profil
Au mois de juillet 2016, le Tour de « France » est terrifié : un assassin, caché au sein du peloton, menace les 198 concurrents.
Les favoris sont mis « hors d’état de nuire ». Steve Panata – le leadeur américain de La « Fonar », assisté de Marc Moreau, surnommé Annibal (1), son ami franco-colombien depuis 10 ans et « gregario » (2) de l’équipe - demeure le seul susceptible de gagner la course pour la cinquième fois consécutive.
La victoire des équipes favorites, rivales de la « Fonar », est compromise. Les soupçons se dirigent très vite en direction des leadeurs
de quatre autres plus modestes susceptibles, toutefois, d’inquiéter Steve Panata.
Pour démasquer le coupable, garantir la loyauté de la compétition, Marc Moreau, le narrateur, assiste - au cœur de l’organisation, durant les 21 étapes - l’inspecteur Favre. Annibal doit redoubler de sagacité : aider Steve à gagner, confondre le coupable résolu à voler la victoire ou, plus redoutable, à ruiner la crédibilité du Tour de France.
Le temps presse. Rencontres et discussions dérobées "agrémentent" les dessous du « Tour ». Annibal et son "amante", Fiona, responsable technique de l’équipe, le colonel Lombard, son mentor, Ray, le journaliste et, bien entendu, l’inénarrable inspecteur Favre s’efforcent d’élucider le complot.
Tous les suspects ont un mobile ; l’enquête est laborieuse ; les hypothèses ne cessent de varier. De l’italien Matosas, désormais favori, à Steve lui-même, jusqu’au directeur sportif de l’équipe « "Fonar" », menacé de limogeage si Steve échoue ; tous seront un instant soupçonnés.
Annibal est-il aussi innocent qu’il n’y parait ? En effet, une autre réflexion le tourmente. Exploitera-t-il les circonstances pour trahir son ami, Steve : s’échapper, aux derniers instants décisifs de la compétition, à la conquête du maillot jaune ?
Mort contre la montre, publiée en France au mois de juin 2019 (Actes Sud - Actes Noirs), est le dernier roman de Jorge Zepeda Patterson. Diplômé de plusieurs universités d’Amérique du Sud et d’un doctorat de sciences politiques, délivré par la Faculté de la Sorbonne à Paris, Zepeda Patterson, journaliste et écrivain, est né, en 1952, à Mazatlán (Mexique, Etat du Sinaloa). Son premier roman, les « corrupteurs » (2013), est finaliste du prix Hammett. L’année suivante, il publie « Milena ou Le Plus Beau Fémur du Monde ». Ces deux romans dénoncent la corruption au Mexique ; ils sont également traduits pour les éditions Actes Sud.
« Mort contre la « montre » est une performance pour qui ignore tout et n’accorde aucun intérêt au Tour de France ; les plus rompus identifieront d’authentiques références - champions, anecdotes et scandales divers. La totale réussite de ce roman tient de l’invention d’une édition originale du Tour de France intégrée à une remarquable fiction policière.
L’intrigue est prodigieusement conduite et maîtrisée. Durant plus de 300 pages, soit autant de chapitres que composent les 21 étapes du Tour de France – l’auteur domine rythmes et mesures ; aucun répit n’est laissé au lecteur. L’intrigue, élaborée « au cordeau », est méticuleuse, irréprochable, palpitante, crédible. Les enchaînements, les recoupements, mais encore « les fils » secondaires, sont cohérents. Le tempo est vibrant, palpitant, inquiétant, parfois, notamment lors des récits d’étapes. Il apporte une plus-value au suspense de l’enquête criminelle étroitement liée aux stratégies de la course.
Bien évidemment, l’effervescence du récit n’est pas constante durant 300 pages, mais l’auteur possède le goût et l’aptitude d’alterner emballement et répit de l’écriture ; seuls les virtuoses y parviennent sans jamais lasser, ni agacer.
L’intrigue est la matière principale du roman policier, mais elle ne suffit pas à assurer le résultat de celui-ci. Les personnages, principaux et secondaires, la qualité des descriptions - les paysages, les lieux, les ambiances - incarnent des éléments essentiels. Jorge Zepeda « Patterson y parvient admirablement.
Les protagonistes du roman consacrent définitivement la réussite de celui-ci. Steve Panata, mais Annibal plus particulièrement, investissent merveilleusement les rôles de personnages principaux. Jorge Zepeda Patterson extrait ses héros de l’œuvre fictionnelle ; l’on s’éprend, tout au long du récit, pour la personne attachante d’Annibal ; à aucun instant, il ne cesse d’habiter le lecteur.
Marc Moreau et Steve Panata se sont connus, il y a dix ans, lorsque ce dernier intègre, en 2006, la firme belge Ventoux « pépinières légendaires de professionnels » ; ce dernier sera préféré au premier, pourtant plus ancien et non moins talentueux, pour succéder au leadeur historique de l’équipe. Moreau fera abnégation de son talent pour le succès du champion, et encore dix ans après, au sein de l’équipe Fonar.
Pour autant, les deux coéquipiers, au parcours et d’origine sociale très différents, sont comme deux frères :
"Je me demande…si la profonde amitié qui finirait par unir nos vies n’était pas née de cette alliance initiale fondée sur la protection mutuelle. Nous étions éblouis l’un par l’autre…Steve avait grandi dans du coton…au Nouveau-Mexique. Ses parents avaient…encouragé son obsession pour le vélo…il les avait toutes remportées (les compétitions)…Je devins ce que je suis, poussé par les circonstances, comme tous ceux qui s’appellent pas Panata ; j’ai fini par être un cycliste – comme d’autres finissent …employés de bureau…En revanche, Steve était de ces êtres humains dont l’avenir est la conséquence d’un dessein tracé à l’avance… Il trouvait que ma situation de quasi-orphelin était une débauche de liberté…"
(P.14-15)
L’auteur éprouve les sentiments d’amitié, d’amours, de fidélité entre ces deux garçons, ceux d’Annibal, surtout, qui pense, pour la première fois après dix années de loyauté, trahir son ami et lui « ravir » la victoire. Mais peu importe, au fond : Patterson crée un personnage extraordinairement attachant.
Tous sont du même niveau émotionnel : méprisables, généreux, amusants, grossiers, émouvants, ambigus souvent, mais rarement tièdes.
Enfin, l’auteur a effectué un travail précis pour citer tel village, un endroit moins connu en France. Comment aurait-il pu en être différemment, au risque de ruiner la qualité d’un roman policier bâti autour du commentaire des étapes du Tour de France ?
L’intrique est talentueuse, le réalisme assuré, l’atmosphère exprimée.
Bonne lecture,
Michel.
Lien (mes chroniques) : https://fureur-de-lire.blogspot.com
1) A 22 ans, durant ses années de régiment, Marc Moreau fut ainsi surnommé par la presse régionale. Le colonel Bruno Lombard avait formé une jeune équipe de cyclistes dans laquelle il l’intégra. Remarqué pour ses "penchants pour la montagne", les médias le surnommèrent Annibal « » du nom du général punique qui avait entraîné son armée à travers les Pyrénées et les Alpes à dos d’éléphant pour attaquer la Rome antique.
2) Gregario (cyclisme) : terme de cyclisme sur route qui désigne un type de coureur dont l’objectif principal, voire exclusif, est d’aider le leadeur d’équipe à atteindre ses propres objectifs sportifs. Il a pour rôle d’aider le coureur en lui apportant de la nourriture et de l’eau mais également à lui changer de vélo en cas de crevaison ou autres problèmes mécaniques. Il est également sollicité pour aider son leader à réussir son échappée en prenant ses relais ou en "cassant" le rythme des concurrents. (Source Wikipédia)
Le 14 novembre 2014 à 8 heures 30, Eric Deguide quitte le domicile d’Emily. Puis, il disparaît. Que cache ce professeur de droit international Belge trentenaire, à l’esprit aussi brillant qu’impulsif et imprévisible ? Seule certitude, son véhicule est retrouvé abandonné dans le parking de l’aéroport de Zaventem, alors qu’aucune caméra de surveillance ne l’y a vu entrer. Pour autant, la police est convaincue de son départ précipité et définitif : pour les enquêteurs, Deguide a abandonné son travail, ses collègues et sa compagne, Emily.
Emily…
Obsédée par
les chiffres et les nombres jusqu’à la monomanie, celle-ci demeure dans l’incertitude durant 614 jours, deux années pendant lesquelles elle ne cesse de « ressasser » la dernière journée d’Eric, d’espérer… En vain, nonobstant quelques espoirs nés de la rencontre avec le très sulfureux Michel, webmaster d’un site dédié aux personnes disparues.
Alain Lallemand, journaliste au quotidien d’investigation belge « le Soir », secondé par l’inénarrable Fred, s’intéresse à cette affaire : il a connu Eric par le passé. Sa détermination à tenter d’élucider cette affaire est d’autant plus vive lorsqu'Eric réapparaît….
« Un jour comme les autres », publié aux éditions Hervé CHOPIN, est le quinzième « roman » de Paul Colize, vivant à Waterloo. L’auteur a reçu de nombreuses et prestigieuses récompenses, exhortant à relever la qualité de celui-ci : prix Landerneau du Polar (Lauréat), prix Polars Pourpres et Boulevards de l’Imaginaire, prix Arsène Lupin, Grand Prix de la littérature policière… Auteur aux multiples facettes, sa diversité traduit un travail important d’investigation : Zanzara (le journalisme, où apparaît déjà Alain Lallemand), un parfum d’amertume (le polar de détective), un long moment de silence (l’enquête historique)…
Il est peu aisé d’assigner péremptoirement un genre à cet ouvrage : policier d’enquête, de victime…Mais il est évident que ce récit se situe à la périphérie de la « Littérature ». Les lettres de Massimo, « personnage secondaire », en sont le témoignage par exemple :
« …ce matin, le lac était enveloppé de cette brume qui apeurait votre chien ; Vos visites me manquent. Nos rencontres me comblaient d’un bien-être jusqu’alors ignoré. Je vous revois, vous agitant…passant du rire aux larmes, vous moquant avec attendrissement de mes silences, bousculant sans le savoir mes plus intimes convictions… »
(P.175).
Paul Colize crée une enquête parfaitement maîtrisée - dont l’intrigue policière, soumise à la perspicacité du lecteur - n’est qu’un prétexte à la narration et à la dénonciation de scandales géopolitiques d’une éclatante actualité. Dans ce contexte, l’auteur met en exergue le rôle difficile et bien compris des lanceurs d’alerte et des journalistes d’investigation en soulignant, pour ces derniers, l’importance d’un travail rigoureux. Colize ne cache pas la réalité de la plupart de ses personnages, Alain Lallemand plus particulièrement, journaliste d’investigation au « Soir » et romancier.
C’est avec une maîtrise exceptionnelle de la langue française – de plus en plus délaissée dans la littérature de ce genre - que Colize nous propose un « roman » précis, au moyen d’une documentation recherchée, servi par une intrigue très aboutie et addictive.
L’originalité du récit, structuré sur le modèle d’un opéra en quatre actes – réside dans sa construction « journalistique ». L’auteur déroule la trame, sur plus de 400 pages, élaborée au moyen de très courts chapitres qui pourraient constituer un « dossier de presse sous forme de puzzle ».
Cet ouvrage n’est pas un documentaire, mais un « roman », tout au moins dans sa forme, destiné à satisfaire le besoin de suspens du lecteur… L’auteur y parvient magistralement.
Les personnages, principaux ou secondaires, sont très travaillés et gorgés de richesse : attachants et cocasses souvent (Fred, collègue de Lallemand et Camille, sa compagne) ou répugnants, parfois (Michel, le webmaster…). L’auteur s’applique à leur donner toute la richesse et la finesse psychologique avec parfois un sens de l’humour grinçant pour amplifier leur personnalité tout en allégeant la dramaturgie du récit.
Je remercie très chaleureusement les éditions Hervé CHOPIN et BEPOLAR de m’avoir permis de découvrir le dernier récit de Paul Colize et pour ces quelques heures de bonheur et de délectation à le lire.
Michel BLAISE.
Lien :
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Un roman remarquable.
De nos jours à Paris. Jean FAREL, septuagénaire, célèbre journaliste politique de radio et de télévision et Claire, son épouse, essayiste et féministe engagée, forment un couple socialement et culturellement privilégié, célèbre et influant. Alexandre, leur fils, brillant étudiant à l'université de Stanforf(1), réside habituellement en Californie. L'union s'est rapidement transformée en "une vitrine de façade" (P.35) ; noceurs ou migrants en quête d'amour, les époux ne se singularisent plus par la fidélité.
Ainsi, à la faveur d'un débat dans la classe d'Adam WEIZMAN, professeur de français dans une école juive, Claire s'éprend de celui-ci ; l'attirance est réciproque. Marié à une femme juive orthodoxe, Adam n'est pas préparé à laisser une situation familiale établie, délaisser ses filles, plus particulièrement l'aînée, Mila, très fragilisée depuis l'attentat perpétré dans son école quelques années plus tôt. Mais en conséquence de sa révocation d'enseignant et de sa soustraction au joug de son épouse, il se résout à se séparer. Il emménage avec Claire et Mila.
Lors d'un séjour en France, Alexandre, à contrecœur, est prié, par sa mère et Adam, d'amener Mila à une soirée chez des amis. Tandis-que la musique est bruyante, la boisson abondante et la "Marie-Jeanne" enivrante, Mila accepte de suivre Alexandre à l'extérieur pour fumer. Nullement effrayée, la jeune fille consent à s'enfermer avec Alexandre dans un local insalubre dans lequel ils ont une relation sexuelle singulièrement graveleuse.
Que s'est-il réellement produit, durant ces quelques minutes dans ce local à déchets, dans l'esprit d'Alexandre et de Mila ? Toujours est-il que cette dernière, quittant les lieux immédiatement après, déposera une plainte pour viol prétextant une extorsion de son consentement. C'est un séisme dans la famille FAREL exposée à une avalanche d'assauts médiatiques féroces et vengeurs. Alexandre nie vigoureusement avoir forcé Mila, mais il est arrêté, déféré et finalement incarcéré. Ses études à l'université de Stanforf sont interrompues et définitivement compromises.
Au terme d'une instruction judiciaire, où chacune des parties maintient sa version, Alexandre invoque le consentement de Mila contesté résolument par celle-ci. Il comparait devant la cour d'assises pour y répondre du chef de viol avec violences. Sur leur seule intime conviction, les jurés doivent décider si Mila a consenti à cette relation ou si Alexandre la lui a imposée...
"Les choses humaines" est le onzième roman de Karine TUIL, juriste de formation, paru, en 2019, aux éditions GALLIMARD. Il a été très favorablement accueilli par les lecteurs et les critiques à l'instar des précédents dont les plus notables - "l'invention de nos vie" et "l'insouciance" - ont été traduits en plusieurs langues.
Karine TUIL a reçu de nombreux prix et distinctions : le Prix du Roman News (2011), pour "six mois six jour", le Prix littéraires Les Lauriers Verts (2013) pour "l'invention de nos vies" ; les insignes de chevalier de l'ordre des arts et des lettres (2014), elle y sera élevée au grade d'officier, en 2017. Nombreux de ses ouvrages ont été sélectionnés pour le Prix Goncourt.
Les romans de Karine TUIL sont très souvent symboliques, pour ainsi dire métaphoriques, des réalités sociales et sociétales - à l'image, dans un autre univers, de "l'insouciance" (Gallimard, 2016). C'est au moyen d'une expression souple, accessible, intelligible, intelligente et d'un récit habile et presque linéaire que l'auteur montre, une fois encore, sa parfaite maîtrise de l'écriture. La structuration absolue et harmonieuse du roman est remarquable.
Ainsi, après une présentation et le récit de différents catalyseurs ("diffraction" (2)), Karine TUIL introduit l'effet déclencheur de l'intrigue - le présumé viol ("le territoire de la violence"), puis relate enfin minutieusement le procès d'Alexandre, et ses suites, devant la cour d'assises ("rapports humains").
Estimer "les choses humaines", une fiction sociale et sociétale, d'abord à l'aune de sa forme – de son style irréprochable et de sa structuration habile - n'est pas un exercice de circonstance. le récit du crime imputé à Alexandre survient seulement à la 153ème page/342 pages. Mais à peine de ruiner l'oeuvre de ses qualités singulières, l'auteur ne pouvait faire l'économie d'une exposition préalable caractérisée. La tonalité du contexte socio-culturel, l'intelligence des personnages, les décors ou encore le paysage de l'oeuvre instruisent sur l'intrigue et accroissent la portée du roman ; Karine TUIL y réussit remarquablement sans ennuyer ni déprimer le lecteur.
"La forme, c'est le fond qui remonte à la surface". le roman de Karine TUIL ne réfute pas la pensée de Victor HUGO.
Quoique facile, distrayant et passionnant, le roman de Karine TUIL n'en est pas moins exigeant par ses multiples perceptions et pénétrations de la société contemporaine : la justice - bousculée par la puissance des réseaux sociaux, des médias et de "l'opinion" - la dépravation du monde politico-médiatique, les groupes ultra féministes, la condition des juifs en France, le terrorisme islamiste…
Toutefois, l'intrigue oscille et progresse autour du sexe et la tentation de la déprédation: un brillant étudiant, issu d'un milieu très favorisé, est accusé du viol avec violences sur une jeune femme désavantagée par l'existence, la fille de l'amant de sa mère. L'enjeu de l'intrigue dans le roman est évident et saisissant de réalisme : montrer que les violeurs, majoritairement, se réfugient dans le déni de leur acte ; les victimes, quant à elles, sont à telle enseigne en état de sidération lors de l'agression, plus particulièrement lors d'un "viol opportuniste" (P.314), non prémédité, qu'elles n'osent aucune résistance.
Karine TUIL montre précisément, ici, l'amphibie du viol et son incertitude. Car, de fait, l'on n'a aucune information, sinon la parole d'Alexandre contre celle de Mila. Cette ambiguïté est le fil conducteur du roman. La "vérité judiciaire" n'est révélée qu'à la fin du livre. Est-ce à dire que Karine TUIL, quand elle écrit le roman, nonobstant ce choix fictionnel ambigu, ne sait rien du geste de son personnage, Alexandre ? Rien n'est moins sûr : le narrateur, externe et impersonnel, auquel recourt l'auteur semble omniscient et informé de la psychologie des protagonistes. En d'autres termes, Karine TUIL, tout en réservant un suspense au lecteur, ne semble pas, en écrivant son roman, douter de l'innocence ou de la culpabilité d'Alexandre. Celui-ci et son père, Jean FAREL, ne sont pas toujours présentés à leur avantage. Claire, sa mère, pourtant féministe, lui trouve des excuses insensées ; Jean FAREL lors du procès, témoigne ainsi:
"je pense qu'il serait injuste de détruire la vie d'un garçon intelligent, droit, aimant, un garçon à qui jusqu'à présent tout à réussi, pour vingt minutes d'action". (P. 281).
C'est, au demeurant, un autre élément équivoque du roman et un véritable coup de maître de Karine TUIL : Alexandre, accusé de viol avec violences, inspire de la sympathie au lecteur, parfois culpabilisante, renforcée par la posture des réseaux sociaux et de l'opinion lorsque ceux-ci se pervertissent en tribunal populaire :
" de quoi vous ont-ils parlé, sinon des rapports de classe, du sentiment de la honte, de l'affaire Weinstein et du mouvement MeToo ? Et le dossier? On vous cite Gisèle Halimi, d'accord, mais Alexandre dans tout ça…(P.324) "…On vous demande de condamner cet homme parce que la société le réclame au nom de la libération de la parole et d'une révolution féministe salutaire…Vous allez plier à l'injonction publique ?" (P. 325).
L'auteur décrit admirablement bien et fidèlement, à l'occasion du jugement d'Alexandre devant la cour d'assises, le déroulement et les écueils d'un procès pénal : le rôle de la victime, trop souvent "déplacé", de l'accusé et de celle du représentant de la société par la voix du ministère public.
Le livre de Karine Tuil est, sans nul doute, l'un des meilleurs romans de la "rentrée littéraire" de l'automne 2019 quand bien même sa lecture serait parfois déstabilisante et ébranlerait notre confiance dans les relations humaines. Quoi qu'il en soit, Karine Tuil a magistralement accompli son dessein : écrire et dépeindre "les choses humaines".
Bonne lecture,
Michel.
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Notes.
1) En référence à l'affaire du viol sur le campus de l'université de Stanford (Californie), du 10 juin 2016, qui bouleversa les Etats-Unis : (Lien vers l'article de France Info),
2) Phénomène qui se produit lorsque des ondes rencontrent des obstacles ou des ouvertures qui se traduit par des perturbations dans la propagation de ces ondes ; contournement d'obstacles ou divergences à partir d'ouverture dans ces obstacles.