Les radicalités sociales, intellectuelles et politiques se sont réveillées en France et dans le monde au cours des années 1990. La galaxie altermondialiste en est l'expression tâtonnante, fragile, multiforme et exubérante. A travers ces résistances et ces nouvelles graines d'utopie se cherche peut-être un nouveau type de radicalité. Une radicalité qui aurait définitivement rompu avec les totalitarismes du XXe siècle comme avec les vaines postures gauchistes pour se coltiner pragmatiquement la transformation du monde, en étant conscient des faiblesses de l'action humaine. Cette radicalité, en germe dans le mouvement altermondialiste, n'a pas grand-chose à voir, dans sa diversité même, avec la caricature que peut en faire un Alain Finkielkraut, qui l'associe nécessairement au manichéisme, au simplisme et à la violence arbitraire. Notre radicalité est plutôt du côté de la complication du monde et de la fragilité des humains en lutte contre les oppressions qui tendent à les écraser. Être radical, pour Marx, c'était étymologiquement " saisir les choses à la racine ". Or, il y a plusieurs racines emmêlées dans les dynamiques sociales et historiques des relations humaines. D'où le souci de la complication, contre les rhétoriques simplificatrices empruntant, par exemple, les voies intellectuellement pauvres du " complot " (du type " les deux cent familles ", " c'est la faute aux médias ", etc.). Sur la voie de la complication, nous nous sommes d'abord intéressés à la radicalité sociale, telle qu'elle s'exprime dans l'altermondialisme et plus largement les mouvements sociaux actuels. Dans cette partie intitulée " Mouvements sociaux et altermondialisme en débat ", des points de vue divers sont confrontés (ceux de Sylvain Pattieu, Pierre Khalfa, Philippe Corcuff et Michaël Löwy). Le questionnement débouche sur le difficile problème des rapports entre les mouvements sociaux et les partis politiques, avec les textes de Lilian Mathieu et de Samuel Johsua.