Avez-vous déjà essayé de décrire vos rêves ? On a tous essayé un jour où l’autre de reformuler ces images dilatées et d’y poser des mots. Le résultat est décevant. C’est comme si les rêves étaient séquestrés dans des vaporisateurs. Des vaporisateurs qui ne diffusent qu’une ambiance ouatée.
Denis Michelis s’est emparé du vaporisateur et il en fait ce qu’il veut !
Le personnage principal de son roman c’est l’ambiance et rien que ça, c’est une performance.
Albertin est un mauvais fils. Son père est fatigué d’élever ce mauvais fils. C’est un bon père
! Ce bon père a besoin de changer d’air alors il emmène son mauvais fils à la campagne. Goûter à l’air pur... Un bon père a bien droit à ça non ?
Le lecteur est d’emblée frappé par le côté ordinaire d’Albertin. C’est un ado de 16 ans, il galère en classe et semble bien inoffensif.
Et doucement ça commence... Denis Michelis gonfle son univers comme s’il gonflait un ballon et nous devenons des petites bulles qui flottent dedans.
L’école est bizarre, les professeurs sont bizarres, les camarades de classe d’Albertin sont bizarres. L’attitude des personnages est surréelle, leur attitude donne le ton. Elle cadence le roman.
Hans débarque dans leur vie. Hans est un ami du père, un ami dont personne ne se souvient. Il accepte une mission. Il accepte de transformer ce mauvais fils en bon fils. Hans est artiste. Hans est beau. Hans est intéressant. Tout l’inverse du père d’Albertin.
Il endosse le rôle du géniteur et il rebaptise le jeune homme. Albertin s’appellera désormais Constant et tout le monde trouve cela normal, même le lecteur. Dans ce roman à remous, le changement de prénom glisse comme une anguille.
Le meilleur ami de Constant est un arbre. Cet arbre, c’est le frêne qui trône dans la cour de la maison. Comme Constant ne réussit pas à se transformer en bon fils, il est souvent privé de discussion avec son arbre.
À Noël, le père offre son fils à Hans et c’est le coup d’accélérateur. Tout s’emballe, tout se tord, tout devient ambigu et l’auteur sort son jeu de cartes. Il va jouer avec nous.
Qui parle ? Denis Michelis distribue les cartes et le lecteur répond : C’est Hans, et là c’est Albertin ou plutôt Constant qui s’adresse à son arbre. Le jeu est délicieux. On ne s’égare jamais et le texte nous empoigne par sa profondeur.
L’auteur ne se relève d’aucun genre. Je le comprend et je respecte sa position. « Le bon fils » est un mélange de conte, de fiction et de fantastique. Denis Michelis aurait-il inventé le «confique» ? Mais où placer la part de poésie alors ? Ces moments bruts et aussi efficaces que ceux de Prévert. J’adore !
Annick FERRANT
RECOMMANDE PAR CULTURE-CHRONIQUE
Avez-vous déjà essayé de décrire vos rêves ? On a tous essayé un jour où l’autre de reformuler ces images dilatées et d’y poser des mots. Le résultat est décevant. C’est comme si les rêves étaient séquestrés dans des vaporisateurs. Des vaporisateurs qui ne diffusent qu’une ambiance ouatée.
Denis Michelis s’est emparé du vaporisateur et il en fait ce qu’il veut !
Le personnage principal de son roman c’est l’ambiance et rien que ça, c’est une performance.
Albertin est un mauvais fils. Son père est fatigué d’élever ce mauvais fils. C’est un bon père ! Ce bon père a besoin de changer d’air alors il emmène son mauvais fils à la campagne. Goûter à l’air pur... Un bon père a bien droit à ça non ?
Le lecteur est d’emblée frappé par le côté ordinaire d’Albertin. C’est un ado de 16 ans, il galère en classe et semble bien inoffensif.
Et doucement ça commence... Denis Michelis gonfle son univers comme s’il gonflait un ballon et nous devenons des petites bulles qui flottent dedans.
L’école est bizarre, les professeurs sont bizarres, les camarades de classe d’Albertin sont bizarres. L’attitude des personnages est surréelle, leur attitude donne le ton. Elle cadence le roman.
Hans débarque dans leur vie. Hans est un ami du père, un ami dont personne ne se souvient. Il accepte une mission. Il accepte de transformer ce mauvais fils en bon fils. Hans est artiste. Hans est beau. Hans est intéressant. Tout l’inverse du père d’Albertin.
Il endosse le rôle du géniteur et il rebaptise le jeune homme. Albertin s’appellera désormais Constant et tout le monde trouve cela normal, même le lecteur. Dans ce roman à remous, le changement de prénom glisse comme une anguille.
Le meilleur ami de Constant est un arbre. Cet arbre, c’est le frêne qui trône dans la cour de la maison. Comme Constant ne réussit pas à se transformer en bon fils, il est souvent privé de discussion avec son arbre.
À Noël, le père offre son fils à Hans et c’est le coup d’accélérateur. Tout s’emballe, tout se tord, tout devient ambigu et l’auteur sort son jeu de cartes. Il va jouer avec nous.
Qui parle ? Denis Michelis distribue les cartes et le lecteur répond : C’est Hans, et là c’est Albertin ou plutôt Constant qui s’adresse à son arbre. Le jeu est délicieux. On ne s’égare jamais et le texte nous empoigne par sa profondeur.
L’auteur ne se relève d’aucun genre. Je le comprend et je respecte sa position. « Le bon fils » est un mélange de conte, de fiction et de fantastique. Denis Michelis aurait-il inventé le «confique» ? Mais où placer la part de poésie alors ? Ces moments bruts et aussi efficaces que ceux de Prévert. J’adore !
Annick FERRANT