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II était enfin temps de rendre hommage au grand illustrateur alsacien Léo Schnug, le bédéiste, précurseur de l'heroic fantasy, à la vie rocambolesque. Il a vécu à la Belle époque strasbourgeoise, tiraillée entre modernité et tradition, entre la France et l'Allemagne. Schnug, le funambule de l'art local, passe du costume de rêtre du Saint-Empire-Romain-Germanique, à celui de soldat de la Révolution française.
Il s'est follement amusé à dépeindre un monde féerique, avec sarcasme et parfois avec panache. Inspiré par les plus grands maîtres du dessin, d'Albrecht Dürer, à Urs Graf, Schnug s'inspire des illustrateurs comme Gustave Doré ou Joseph Sattler, mais en définitive Schnug a fait du Schnug. Il fait ses armes à Strasbourg, autour des artistes comme Charles Spindler ou Gustave Stoskopf. Son style sécessionniste fait mouche.
Il devient l'illustrateur des historiens, des archéologues, et des collectionneurs d'antiquités. Grâce à la rencontre de l'archéologue Robert Forrer, Léo Schnug entre dans la grande histoire. Il va réaliser les décors du château du Haut-Koenigsbourg, propriété d'un commanditaire aussi prestigieux qu'encombrant, l'Empereur Guillaume II d'Allemagne. Le château va devenir un espace d'affrontement incroyable dans lequel Léo Schnug rencontre la gloire.
Ce fut peut-être le pas de trop, dans lequel Schnug va se perdre. Décrié, isolé, il glisse irrésistiblement vers l'abîme, aidé par l'alcool, qui le consume à petit feu. Lorsqu'en 1918 l'Alsace redevient française, il fuit à l'asile psychiatrique de Brumath, pour trouver la paix. Il dessine encore des soldats dont il a le secret. Il est passé du statut d'artiste raté, à celui d'artiste maudit.