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Gérard Genette a résumé la Recherche en trois mots : "Marcel devient écrivain". Mais comment s'effectue cette longue métamorphose de Marcel ? Comment ce "moi qui vit" se transforme-t-il en "moi qui écrit" ? Bref, comment a lieu la venue à l'écriture, la naissance du "moi créateur" ? A ces questions, la présente étude propose une réponse à contre-courant. A l'origine de la création littéraire, nulle miraculeuse mémoire involontaire, qui restitue les êtres et les choses et les sauve de l'oubli, mais la douloureuse expérience de la perte, de la fragmentation du moi.
Ici, deux expériences-clefs : les demi-réveils et le deuil. Au commencement étaient les ténèbres de la chambre du Dormeur éveillé : moi intermittent, ayant perdu jusqu'à sa position stable dans l'espace et le temps. Et pourtant, c'est à partir de l'obscurité de ces demi-réveils que naîtra le moi créateur, et avec lui tout l'édifice de la Recherche. Comme les demi-réveils, le deuil prépare à l'écriture : la perte de l'être aimé bat en brèche l'unité apparente du moi, qui s'avère fragmentaire.
Ici, deux textes capitaux : Albertine disparue, magistrale analyse du travail du deuil, où mémoire et oubli sont étroitement imbriqués, et Les intermittences du coeur, qui ouvre un vaste ensemble incluant la perte de l'objet maternel, le crime inavouable des "mères profanées", l'expiation et l'espoir de rédemption par l'écriture.