Considérée autrefois comme une oasis de prospérité dans un désert de misère et de souffrance, en Afrique de l'Ouest au sud du Sahara, la Côte d'Ivoire est aujourd'hui au cœur de tous les tourments. De l'envoi des missions gouvernementales à l'intérieur du pays, en février 2001, pour recueillir les doléances des populations pour parvenir à une paix durable entre les ivoiriens, suivi de la publication du rapport de synthèse du corps préfectoral sur cette mission, en passant par les ateliers de Grand-Bassam des 17 et 19 mars, puis le forum de la réconciliation nationale qui s'est achevé fin décembre de la même année, et surtout dans le temps, l'avènement des rebelles qui occupent environ plus de la moitié du pays, les questions relatives à la constitution, à la nationalité, l'accession à la magistrature suprême, et l'exercice du pouvoir en particulier, sont au cœur de l'imbroglio ivoirien. En effet, compte tenu de l'environnement social, économique, politique et du degré de maturité des ivoiriens de l'époque, la première constitution ivoirienne a été bâtie autour d'un exécutif fort. Nonobstant toutes les réformes constitutionnelles qui ont été opérées jusqu'à la constitution de juillet 2000, les constituants ivoiriens se sont arrangés de telle sorte que l'exécutif, donc le chef de l'Etat soit le seul devin essentiel et véritable du système politique ivoirien, en d'autres termes, le cerveau, le personnage central, la clé de voûte des institutions. Ainsi, sous l'apparente division des pouvoirs, nous avons à faire en réalité à un système d'unité du pouvoir au profit d'un homme, en l'occurrence le Président de la République pratiquement irresponsable. Ce livre donne une vue d'ensemble sur cette question. Mais ce n'est pas tout. A l'heure actuelle où la tendance qui domine la pratique constitutionnelle dans le monde, en règle générale, est l'autolimitation du Président de la République, peut-on aujourd'hui encore empiler les pouvoirs entre les mains d'une seule personne ? De ce point de vue, les accords de Marcoussis ne tracent-ils pas les voies de cette réforme audacieuse ? La question centrale qu'on est en droit de se poser est celle de savoir s'il est plus avantageux d'être gouverné par un homme très éminent en vertu ou par de très bonnes lois qui délimitent parfaitement les compétences des organes étatiques, les uns par rapport aux autres ?