Enfin réédité !!
Comment parler de ce roman-araignée ? Qui est aussi un livre-objet où l'on peut parfois circuler, voir se perdre sur plusieurs niveaux de textes ? Il y a une double mise en abîme : Jonnhy trouve une malle où se trouve le texte de La Maison des feuilles, un fouillis de notes et de ratures, il va donc se charger de le remettre en ordre, d'en faire une introduction, de rédiger des notes et des annexes : l'ensemble de ce corpus est entre les mains du lecteur. Le roman a donc la forme d'un ouvrage universitaire, il traite d'un film devenu culte qui a fait l'objet de nombreuses
études : le Navison Record... Le sujet de ce film est une sorte de reportage sur la maison où le cinéaste vient d'emménager, après beaucoup d'interrogations, il se rend à l'évidence : la maison est plus grande à l’intérieur qu’à l’extérieur... Cela commence avec une porte, un couloir qui semble interminable, et une obscurité totale qui cache un espace sans limites.
Le lecteur est mit à rude épreuve par son érudition sans limite, sa typographie bouleversée ainsi que les polices de caractères, le livre étant parfois creusé lui-même par un vide, la lecture du texte lui-même devient une épreuve physique. Je me souviens avoir lu ce livre étant dans un bus, ou en train de boire un café, et les gens autour de moi pouvaient me voir à certain moment tourner mon livre à l'envers pour pouvoir poursuivre ma lecture, revenir en arrière, voir en tenant le livre par le milieu, en résumé j'avais l'air d'un dingue ! Le côté fantastique nous fait penser à Lovecraft, mais c'est en même temps une plongée troublante au cœur de l'âme humaine, les notes écrite par Johnny envahissent parfois le texte dont il est en train de faire le commentaire, racontant son histoire personnelle troublée.
"L'obscurité ne satisfait jamais. Surtout si elle emporte avec elle quelque chose..."
Rarement un livre n'aura autant mérité le statut d'objet littéraire non identifié. La Maison des feuilles emmène son lecteur sur la piste de Johnny Errand, lui-même obnubilé par l'étude obsessionnelle d'un certain Zampano qui a travaillé sur un film documentaire. Un film dans lequel une famille découvre en rentrant chez elle que sa maison est désormais plus grande à l'intérieur qu'à l'extérieur. Commence alors la tentation d'explorer ce qui va se révéler être un labyrinthe sombre, mouvant et potentiellement infini.
Pour peu que vous accrochiez au récit, vous vous rendrez vite compte que le livre parvient à faire de nous ce qu'il fait de ses personnages, nous rendre fous ! Entre les notes de bas de pages qui donnent sur d'autres notes, la charte graphique ou la mise en page qui illustrent l'action, les annexes qui révèlent des choses sur l'auteur du récit et qui font participer le lecteur, le fond comme la forme participent à faire du lecteur un protagoniste de ce récit.
Si vous êtes du genre à aimer vous triturer les méninges, à vous laisser absorber par un récit jusqu'à confondre réalité et imaginaire, alors la plongée dans La Maison des feuilles est faite pour vous.
Un récit marquant, qui ne laisse pas indemne, riche d'une audace qui ne tombe jamais dans le superflu, où tous les choix se justifient pour illustrer le propos.