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Au Mali, l'adage dit que "le chef a la main sur le grenier" : des
aînés de famille au souverain, un attribut essentiel du pouvoir
a toujours été d'accumuler et de conserver des excédents
céréaliers pour les redistribuer en cas de pénuries alimentaires.
Dans le Mali contemporain, à la suite des crises alimentaires
de 2005 et de 2008, cette tradition se manifeste par le fait que
la Présidence de la République, au nom du même adage,
conduit une action centralisatrice de contrôle sur tous les
instruments de lutte contre l'insécurité alimentaire : la
légitimité du Pouvoir est en jeu.
Mais cette politisation et la
prolifération des partenaires (institutions onusiennes, FMI,
Banque mondiale, Union européenne, coopérations bilatérales,
ONG, ministères, élus nationaux, communes, associations...)
engendrent un empilement de dispositifs ad hoc reconduits à
tous les échelons de la pyramide politico-administrative et
dont on peut douter de l'efficacité réelle : la fonction profonde
de ce millefeuille technobureaucratique ne serait-elle pas aussi
de mise en scène ? A partir de l'analyse documentaire et des
enquêtes de terrain, les contributions de cet ouvrage
confirment que cette mise en scène, redoublée par un discours
scientiste (la "manie de la quantification" et de la
"méthodologie"), est surtout celle des faux semblants : la
grande pauvreté et la faim restent le lot des milieux populaires,
notamment en ville où l'on ne veut pas voir qu'elles
nourrissent le mécontentement et la désaffection à l'égard du
Pouvoir.