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Agathe est une enfant trouvée du Beaujolais. Abandonnée une nuit sur les marches d'une église de campagne, élevée par une nourrice ivrognesse, adoptée par une religieuse de l'orphelinat, éduquée par un vieil instituteur qui lui enseigna le calcul et la morale en dernier, Agathe était bien partie dans la vie. Inconsolable de la perte de ceux qui l'ont aimée, la voici qui débarque sur l'île de Manhattan, dans une robe à cerises dont l'ourlet est défait, avec une valise de carton à peu près vide et quatre photographies dans son sac à mains.
Parviendra-t-elle à quitter le deuil, à faire de son coeur que sollicitent les vivants autre chose qu'un autel où fleurir la présence réelle de ses disparus ? S'attachent à la détourner de ce devoir trois petites filles un peu sorcières dont elle a la garde, sept pénitents équivoques qui l'attirent dans une ferme délabrée de Pennsylvanie et un amant sans tendresse fabricant de machines à sous. Amoureuse et belle joueuse à l'odeur de musc, heureuse au billard, malheureuse en amour, l'orpheline, entre la maison des maîtres et sa chambre en ville, remplace l'espérance par l'élégance.
Car c'est bien d'un combat singulier qu'il s'agit. Celui, sans merci, que livre Agathe à la mémoire et à la nuit, tout au long d'un roman ni tout à fait noir ni tout à fait rose, qui sent le soufre et les vendanges.
