« La laïcité falsifiée » de Jean Baubérot est une étude, claire et synthétique, qui effectue une remise à plat, nécessaire, de la laïcité.
Originalement considérée comme un principe de la gauche, elle est depuis quelques temps instrumentalisée par l'extrême droite. L'un des exemples les plus frappants se trouve être « l'affaire » des prières dans la rue.
Marine Le Pen a lancé le débat de manière erronée et provocante en la comparant à « l'occupation » et en gonflant les chiffres. La « cécité chronique et dangereuse de la classe politique » a fait le reste.
Dans la réalité, moins d'une dizaine de cas de prières de rue sont référencés (dus essentiellement au nombre insuffisants de mosquées et de salles de prières en France).
Malheureusement, l'imaginaire collectif prend le pas sur la raison. L'effet inflationniste est sidérant. Les personnes interrogées évaluent en moyenne le nombre de lieux où ont lieu les prières de rue à 185 ! Ce nombre s'avère être le reflet d'un débat politique et social qui tend à se focaliser sur la mise en cause de l'islam et des musulmans.
Ce débat résulte de cette « nouvelle laïcité », défendue par l'UMP et le FN, qui s'affirme l'héritière de la loi de 1905. Seulement, cette dernière est totalement mésinterprétée. Comme l'écrit Jean Baubérot, « dans un même mouvement, on la sacralise et on la méprise, on lui fait dire souvent le contraire de ce qu'elle a dit – sorte de viol symbolique ».
Cette « nouvelle laïcité » tend à restreindre celle-ci à la seule liberté religieuse. C'est omettre que la loi de 1905 entendait également la liberté de conscience, notion bien plus large puisqu'elle « assure les droits des citoyens » et « garantit le libre exercice des cultes ».
D'autre part, une formule souhaite enfermer la religion dans la seule sphère privée. « Cette affirmation est à la fois exacte et fausse. »
En effet, la religion n'est pas affaire d’État, elle n'est pas une institution publique. Elle est une affaire personnelle, libre et volontaire. La religion n'a donc aucun caractère officiel. Toutefois, la liberté de conscience et le libre exercice des cultes donne la possibilité de « manifestations extérieures sur la voie publique ».
Sans l'idéaliser, la loi de 1905 a instauré avant tout « une laïcité de liberté et de raison ». Dans l'imaginaire assez répandu, les lois scolaires puis la loi de 1905 auraient été imposées avec une certaine rigueur dogmatique.
Pourtant, les travaux des historiens démontrent une réalité plus pragmatique. Dans les écoles, notamment, les instituteurs « ont souvent été des passeurs entre deux cultures ». Il en a été de même concernant le retrait des crucifix. La pratique républicaine a davantage été le résultat de « compromis et d’accommodements », on est bien loin du « modèle républicain intégriste qu'on s'est remis aujourd'hui à vanter ». D'ailleurs, Jean Jaurès et Léon Blum ont misé sur cette laïcité qui privilégie la liberté.
Actuellement, la « nouvelle laïcité » est au pouvoir parce que les gens, élites comprises, « pensent majoritairement la laïcité dans le cadre d'une culture télévisuelle » : « Le monstre doux ». On est face à un « objet construit de toutes pièces, qui brouille la distinction entre réalité et fiction ». La chose est particulièrement frappante dans l'affaire du foulard. Comme l'explique Jean Baubérot, les partisans de la tolérance ont « perdu la bataille iconographique ». C'est l'image qui guide l'opinion, les médias sélectionnent les photos chocs afin de provoquer la peur et … l'audience. L'actualité telle qu'elle est présentée à la télévision est loin d'être le reflet de la réalité puisqu'elle obéit avant tout aux lois de la « chose à voir ».
La grande réussite de la loi de 1905, c'est l'instauration de « l'équilibre entre le souci de l'individu et les besoins du collectif ». La meilleure manière de bloquer la société consiste à vouloir appliquer, à la lettre et sans aucun discernement, les lois et les règlements.
La laïcité, à l'image de l'application de la loi de 1905, prend sa pleine mesure lorsque comme le roseau, elle se plie mais elle ne rompt pas malgré les tempêtes. C'est là que peut résider sa réussite.
Laïcité falsifiée
« La laïcité falsifiée » de Jean Baubérot est une étude, claire et synthétique, qui effectue une remise à plat, nécessaire, de la laïcité.
Originalement considérée comme un principe de la gauche, elle est depuis quelques temps instrumentalisée par l'extrême droite. L'un des exemples les plus frappants se trouve être « l'affaire » des prières dans la rue.
Marine Le Pen a lancé le débat de manière erronée et provocante en la comparant à « l'occupation » et en gonflant les chiffres. La « cécité chronique et dangereuse de la classe politique » a fait le reste. Dans la réalité, moins d'une dizaine de cas de prières de rue sont référencés (dus essentiellement au nombre insuffisants de mosquées et de salles de prières en France).
Malheureusement, l'imaginaire collectif prend le pas sur la raison. L'effet inflationniste est sidérant. Les personnes interrogées évaluent en moyenne le nombre de lieux où ont lieu les prières de rue à 185 ! Ce nombre s'avère être le reflet d'un débat politique et social qui tend à se focaliser sur la mise en cause de l'islam et des musulmans.
Ce débat résulte de cette « nouvelle laïcité », défendue par l'UMP et le FN, qui s'affirme l'héritière de la loi de 1905. Seulement, cette dernière est totalement mésinterprétée. Comme l'écrit Jean Baubérot, « dans un même mouvement, on la sacralise et on la méprise, on lui fait dire souvent le contraire de ce qu'elle a dit – sorte de viol symbolique ».
Cette « nouvelle laïcité » tend à restreindre celle-ci à la seule liberté religieuse. C'est omettre que la loi de 1905 entendait également la liberté de conscience, notion bien plus large puisqu'elle « assure les droits des citoyens » et « garantit le libre exercice des cultes ».
D'autre part, une formule souhaite enfermer la religion dans la seule sphère privée. « Cette affirmation est à la fois exacte et fausse. »
En effet, la religion n'est pas affaire d’État, elle n'est pas une institution publique. Elle est une affaire personnelle, libre et volontaire. La religion n'a donc aucun caractère officiel. Toutefois, la liberté de conscience et le libre exercice des cultes donne la possibilité de « manifestations extérieures sur la voie publique ».
Sans l'idéaliser, la loi de 1905 a instauré avant tout « une laïcité de liberté et de raison ». Dans l'imaginaire assez répandu, les lois scolaires puis la loi de 1905 auraient été imposées avec une certaine rigueur dogmatique.
Pourtant, les travaux des historiens démontrent une réalité plus pragmatique. Dans les écoles, notamment, les instituteurs « ont souvent été des passeurs entre deux cultures ». Il en a été de même concernant le retrait des crucifix. La pratique républicaine a davantage été le résultat de « compromis et d’accommodements », on est bien loin du « modèle républicain intégriste qu'on s'est remis aujourd'hui à vanter ». D'ailleurs, Jean Jaurès et Léon Blum ont misé sur cette laïcité qui privilégie la liberté.
Actuellement, la « nouvelle laïcité » est au pouvoir parce que les gens, élites comprises, « pensent majoritairement la laïcité dans le cadre d'une culture télévisuelle » : « Le monstre doux ». On est face à un « objet construit de toutes pièces, qui brouille la distinction entre réalité et fiction ». La chose est particulièrement frappante dans l'affaire du foulard. Comme l'explique Jean Baubérot, les partisans de la tolérance ont « perdu la bataille iconographique ». C'est l'image qui guide l'opinion, les médias sélectionnent les photos chocs afin de provoquer la peur et … l'audience. L'actualité telle qu'elle est présentée à la télévision est loin d'être le reflet de la réalité puisqu'elle obéit avant tout aux lois de la « chose à voir ».
La grande réussite de la loi de 1905, c'est l'instauration de « l'équilibre entre le souci de l'individu et les besoins du collectif ». La meilleure manière de bloquer la société consiste à vouloir appliquer, à la lettre et sans aucun discernement, les lois et les règlements.
La laïcité, à l'image de l'application de la loi de 1905, prend sa pleine mesure lorsque comme le roseau, elle se plie mais elle ne rompt pas malgré les tempêtes. C'est là que peut résider sa réussite.