"Les enfants de toute l'Amérique avait le croquemitaine pour se raconter des histoires qui font peur. A Carson Mills, ils avaient Jon Peterson."
C'est sur cette phrase que s'ouvre le 20° roman de Maxime Chattam. "Que ta volonté soit faite" nous plonge dans le quotidien d'une petite bourgade conservatrice du Midwest américain.
On y suit l'évolution de ses habitants, et surtout, celle de ce Jon Peterson, des années 60 aux années 80. A travers plusieurs générations, les femmes et les hommes de Carson Mills ne sont épargnés ni par le temps qui passe, ni par les tentations.
La
rudesse, la froideur, la cruauté étraignant cette petite ville trouvent écho dans la plume précise et frénétique, glaçante et détachée de Maxime Chattam. Son écriture habile frôle le 7° Art : on voit, sans peine, défiler toutes les images peintes devant nos yeux. Comme devant un grand écran, on se retrouve happé par et dans l'histoire.
J'avoue que j'ai appréhendé la lecture de ce thriller. L'auteur n'a lésiné ni sur le langage cru, explicite, ni sur la violence des images et des actes. Pourtant, rien, dans le style, n'est gratuit. Et c'est pourquoi, on ne peut s'arrêter de lire jusqu'à ce que le point final apparaisse.
C'est passionnant, c'est hypnotisant.
C'est noir, c'est terrifiant.
Le nom du dit-méchant est révélé dès les premières lignes : Jon Peterson. Les meurtres, les viols, les agressions en tous genres se succèdent et ne cessent. Mais Peterson agit-il seul ? Pourquoi fait-il cela ? Que va-t-il se passer ? Quelqu'un parvendra-t-il à l'arrêter ? Et quand ?
On frissonne d'appréhension et de plaisir coupable.
Maxime Chattam nous interroge sur les notions de bien et de mal, sur la portée de nos actes. Sa plume est vive, fluide. Et c'est grâce à tous ces éléments qu'on endure cette histoire macabre. Oui, on l'endure, car ce n'est pas sans peine qu'on se retrouve confronté au mal avec un grand M.
Ponctuellement, un mystérieux narrateur vient à notre aide. Il nous aide à assembler les pièces du puzzle. Il n'est ni Jon Peterson, ni le Shériff, ni une des victimes. Il en sait davantage que tous les personnages réunis. Mais il n'est pas omniscient. Découvrirez-vous qui il est ? Le rideau de fin finira par tomber mais seulement si vous, lecteurs, avez été vigilants.
Avec "Que ta volonté soit faite", on est plus proche du thriller gore que du polar noir. ça fait penser à King tout en sortant des sentiers battus. Maxime Chattam charme, étonne.
Chattam au tournant
Le nouveau roman de Maxime Chattam est une excellente surprise. Depuis sa fameuse trilogie du mal, qui l'a hissé sur le podium des auteurs français les plus lus, on connait l'un de ses sujets de prédilection : l'étude du mal, dans son expression la plus crue et la plus inimaginable.
Avec ce 20ème roman, l'auteur prend cependant un virage. Non pas thématique, le mal est toujours au cœur de l'intrigue, encore qu'il en questionne davantage l'origine conjoncturelle, voire ontologique.
Non, c'est le changement dans l'écriture, d'ordinaire très directe, qui frappe. Chattam prend son temps : celui d'évoquer ces petits riens indispensables, de ceux qui donnent à un roman toute son épaisseur.
Sa toile de fond, qu'il décrit en « cinémascope », c'est celle de l'Amérique profonde des sixties, découpée par moment en plan large et évocateur, ce qui crée un contrepoint particulièrement saisissant avec l'itinéraire monstrueusement inhumain de Jon.
« Que ta volonté soit faite » n'est donc pas un Chattam de plus. C'est un autre Chattam, plus étoffé, littérairement plus abouti, et qui pourrait en surprendre plus d'un...