Ce n'est que longtemps après la mort de ses parents qu'Alain BERENBOOM trouve le courage de fouiller leurs caisses remisées à la cave, incursion indiscrète dans un passé auquel il n'a jamais eu accès. Documents, lettres et photos précieusement conservés par sa mère lui ouvre l'accès à une histoire familiale mouvementée que la vie tranquille de ses parents de ne laissait pas présager. Il découvre son père sous un jour nouveau, un père courageux, volontaire, aventurier, caché derrière le pharmacien bruxellois bien établi. Au fil de ses découvertes se dessine l'histoire d'un homme
: la naissance dans un shetl proche de Varsovie, les premiers pas en Belgique terre d'accueil, la rencontre avec Rebecca, sa "princesse lituanienne", la soif d'intégration, l'amour pour sa nouvelle patrie, les années de clandestinité pendant la guerre, le deuil de ceux qui n'ont pas survécu, et surtout l'indéfectible optimisme qui lui a permis de surmonter tous les drames. Ne parlant ni le polonais, ne le yiddish, Alain attend avec de plus en plus d'impatience les traductions des lettres rassurantes et confiantes qui racontent la douceur de vivre au shetl, les espoirs, les projets de toute une communauté qui, par-delà les menaces nazies et soviétiques, continue d'étudier la Torah, d'organiser des mariages, de s'inquiéter d'un célibat prolongé, sourde et aveugle au fracas du monde. Des grand-parents, des tantes dont il ne savait rien, lui proviennent d'un passé à jamais révolu, balayé par les horreurs de la guerre. Chaïm Berenboom est devenu belge et a choisi de garder un silence hermétique sur cette ancienne vie, sur l'Occupation, sur les drames et les souffrances, préférant mettre en avant les bons côtés de la vie. Pourtant, sous ses airs débonnaires gonflait une colère sourde, sous le pharmacien respectable, athée et optimiste, se cachait l'assistant d'un magicien, un résistant, un lecteur assidu de la Bible, un admirateur des kibboutz israélien, un homme complexe et contradictoire.
Elevé dans le respect du roi, nourri à la carbonade, bilingue franco-flamand, y a-t-il outre-Quiévrain citoyen plus belge qu'Alain BERENBOOM ? C'est ainsi que ses parents l'ont éduqué, coupé de ses racines, premier d'une ligne de Berenboom, belge avant tout. Pourtant, son enquête dans les archives familiales va lui faire entrevoir une histoire familiale marquée par les affres de la guerre. Mais en bon belge, l'auteur fait fi du ton tragique de rigueur pour adopter l'humour et la dérision, cachant ses larmes derrière les folles aventures d'un père habité par la soif de vivre et la confiance en des lendemains meilleurs. Rire pour ne pas pleurer mais surtout redonner une voix à ceux qui ont été broyés par le nazisme. Du shetl au ghetto, les lettres dévoilent un quotidien de plus en plus difficiles mais gardent la flamme de l'espoir, celle qui s'éteint sur le chemin des camps. Chaïm aura perdu une grande partie de sa famille mais il ne dira jamais rien de sa peine, épargnant son fils, mais le privant aussi de son histoire. Alain remonte la piste, renoue avec l'héritage familial, tentant de garder une distance pudique mais qui ne masque pas tout à fait le flot de ses émotions. Hommage aux siens et surtout au père, ce Monsieur optimiste est un hymne à la vie, une suite de chroniques drôles et émouvantes qui nous rend chers et intimes des êtres dont les voix se sont éteintes trop tôt. A lire pour la leçon d'Histoire et pour l'exploit d'avoir su alléger l'horreur des faits par des touches d'humour bienvenues.
Il suffit de ranger ses archives pour...
Ranger les archives fut, pour l’auteur, une révélation totale, lui qui pensait que la vie de ses parents fut un long fleuve tranquille.
Ce ne fut pas la boîte de Pandore, mais une porte ouverte sur le passé de ses parents et par la-même, sur son ascendance. De ses boîtes sortent des lettres écrites en polonais et ou Yiddish. Comme ses parents n’ont jamais voulu lui apprendre ses deux langues, il a recours à des traducteurs pour pouvoir avancer à l’envers de la vie de ses parents. Son père a tout fait pour « belgiser » son fils. Après avoir survécu à la seconde guerre mondiale, il flamandise son propre nom qui de Berenbaum devient Berenboom.
Avant d’être ce pharmacien sans histoire qu’il a connu, Chaïm Berenbaum a parcouru un chemin semé de surprises, d’embuches depuis shtetl polonais natal. Cet homme surnommé Monsieur Optimiste l’est vraiment. Ses aventures furent rocambolesques, émouvantes. Il fut à ses débuts belges, aide d’un magicien coupeur de femme en deux !
Alain Berenboom nous offre un livre optimiste, empli de pudeurs, d’amour pour ses parents, plein de notre histoire européenne et plus particulièrement de l’histoire belge. Son écriture dense, est parsemée de traits d’humour et d’autodérision qui lui permettent de cacher l’émotion que l’on ressent à la lecture certaines phrases.
Oui, vraiment, un très bon livre ; je comprends qu’il ait obtenu le prix Rossel, souvent qualifié de "Goncourt belge". Une lecture vivifiante et un coup de cœur tant pour l’écriture que la profondeur du sujet, bien qu’affaibli par les dernières pages inutiles à mon sens, mais ce n’est que le mien.