Voici un roman dont j'ai beaucoup entendu parlé il y a plusieurs années maintenant. Mais vous savez ce que c'est : on note un titre, un jour on l'achète, il prend la poussière avant que, mu par une envie subite, on le lise enfin. L'avantage de cette technique, c'est que les éloges des autres ne sont que de vagues réminiscences et qu'ainsi le lecteur n'est plus vraiment influencer. J'ai donc pu me faire mon propre avis, sans trop en attendre, et donner toute sa chance à ce roman.
L'auteur, je le connaissais de nom, bien sûr. Mais c'est tout. Du coup, son écriture est d'autant plus frappante.
Philippe Claudel utilise des mots simples mais justes pour décrire une ambiance de fin de siècle, voire de fin de monde et des êtres humains qui se débattent au milieu avec leurs sentiments. En prenant le parti d'un récit à la première personne, Claudel ajoute une touche de mystère. Son personnage narratif ne se découvre que petit à petit. On ne connait pas son nom, on devinera son âge, puis sa profession. L'Affaire, le meurtre de la petite Belle, dont il est question tout au long de ce roman, est bien plus un prétexte qu'une réelle question. En lisant le portrait de ce petit village où personne n'envisagerait de suspecter quelqu'un, le lecteur se rend compte que chacun est suspect, du procureur enfermé dans son Château, le maire pompeux, les autres notables, les militaires de passage en route vers le front... Au final, personne n'est ni bon ni mauvais, ni blanc ni noir, chacun porte en lui une part d'ombre, chacun est une âme grise.
Du front, seuls les bruits des canons sont perceptibles. La majeure partie de la population, exemptée, tente de conserver le rythme de vie habituel, mais la guerre se rappelle à eux, par petites touches : le contingent de recrues envoyées au front, l’hôpital qui reçoit les blessés, l'instituteur qui perd la tête... Le drame qui se joue ne peut être mis de côté. De même, le narrateur a une parole hachée qui laisse transparaître un drame intime. Le lecteur devine une déchirure qui se dessine peu à peu et qui ne se révèlera qu'à la toute fin. Les sentiments sont comme tenus à distance mais d'autant plus présents dans la narration du coup.
C'est fort et délicat. C'est sombre. C'est humain. Et ça me donne envie de découvrir un autre roman de Philippe Claudel.
http://nourrituresentoutgenre.blogspot.fr/2014/05/les-ames-grises-philippe-claudel.html
Epoustouflant
L'histoire se passe durant la première guerre mondiale dans un village près de Verdun.
Un meurtre est commis et les suspicions commencent.
Une ambiance sombre et un très bon suspense.